
Article mis à jour le 13 mai à 19h00
Le président du CNES Philippe Baptiste est beaucoup plus optimiste sur un premier vol d'Ariane 6 (version Ariane 62) à une échéance proche de la programmation officielle (dernier trimestre 2023) qu'en début d'année. « Je trouve qu'on est en ce moment sur une bonne dynamique sur le programme Ariane 6. (...) Je suis plutôt confiant », a confié jeudi Philippe Baptiste au Space Forum, organisé par La Tribune. Pourquoi un tel optimisme ? « Depuis quelques mois, plusieurs bonnes nouvelles sont arrivées. Et des problèmes techniques, qui étaient apparus, ont été résolus les uns après les autres », a-t-il assuré. Notamment, l'essai de mise à feu de l'étage supérieur (moteur Vinci) a été réalisé en janvier avec succès sur le banc d'essai à Lampoldshausen.
Par ailleurs, il a précisé qu'il y avait actuellement « un climat de confiance entre les différents partenaires et entre les équipes ». Notamment au sein de la Task Force Ariane 6, composée de l'Agence spatiale européenne (ESA), du maître d'œuvre de la base de lancement (CNES), du maître d'œuvre du système de lancement (ArianeGroup) et de la société de services de lancement (Arianespace). Si ce ne sont pas encore des certitudes, le ressenti de Philippe Baptiste semble bien meilleur qu'en janvier dernier. Les inquiétudes du président du CNES semblent beaucoup plus habituelles à ce stade du développement du futur lanceur lourd de l'Europe.
Essais combinés déterminants
Interrogé sur une éventuelle fenêtre prévue pour le premier vol d'Ariane 6, le patron du CNES a botté en touche, estimant qu'il était encore trop tôt pour s'assurer d'une programmation fiable. D'autant qu'Ariane 6 passe actuellement un jalon crucial : le CNES et ArianeGroup sont en train de réaliser les essais combinés du lanceur dans une configuration A64 au Centre spatial guyanais (CSG) pour connecter le lanceur à son pas de tir (connexions électriques, connexions numériques, connexions fluidiques), explique le patron du CNES. Cette séquence d'essais comprend notamment deux répétitions humides et un long essai de tir de l'étage inférieur sur le pas de tir. « La réussite de cette séquence est un préalable essentiel au vol inaugural », rappelle l'ESA dans son dernier rapport publié le 12 mai sur le déroulement du programme Ariane 6.
« On regarde si tout se passe bien. Ces tests sont effectués pour découvrir si oui ou non il y a des anomalies » sur le programme, a expliqué au Space Forum de Toulouse Philippe Baptiste.
En mai, l'ESA et ArianeGroup sont également en train de procéder aux essais de qualification du logiciel de vol en prévision du vol inaugural, en conditions nominales et dégradées. A partir de fin juin, ils lanceront en principe la revue de qualification globale du système de lancement (lanceur, système de lancement et pas de tir). Début juillet, ils effectueront un essai complémentaire de l'étage supérieur au Centre allemand pour l'aéronautique et l'astronautique (DLR) de Lampoldshausen en Allemagne. Cet essai sur banc d'essai simulera un profil de vol nominal comme celui prévu pour le vol inaugural, pour confirmer le comportement attendu de l'étage supérieur. Un autre test est prévu pour examiner le comportement du lanceur dans les cas dégradés.
A partir de novembre, ArianeGroup lancera l'assemblage du lanceur et débutera la campagne de lancement du vol inaugural. Cette étape inclura une répétition générale finale. Enfin, Philippe Baptiste a indiqué que le CNES serait « à l'heure » pour livrer le pas de tir Ariane 6. La revue de qualification technique de la base de lancement a débuté en décembre. La première partie (hors banc de contrôle) s'est achevée en avril. « L'examen n'a pas soulevé de préoccupations majeures quant à la qualification », a expliqué l'ESA. La qualification du banc de contrôle sera en principe obtenue d'ici à juin 2023.
Enfin, l'assemblage des éléments du premier lanceur (A62) prévu pour le col inaugural est « bien avancé », a expliqué l'ESA. L'intégration des modules progresse dans les usines d'ArianeGroup aux Mureaux et à Brême. En Guyane française, les deux moteurs à fusée solide P120C ont été coulés.
Objectif de Maia : un mini-lanceur réutilisable pas cher
Sous la maîtrise d'œuvre d'ArianeGroup, le programme Maia, un futur mini-lanceur réutilisable qui doit être opérationnel en 2026, a pour objectif de développer et concevoir « un petit lanceur liquide, réutilisable et à bas coût, a rappelé le président du CNES. C'est un challenge collectif pour la filière spatiale française ». Pourquoi est-ce un projet important pour la France ? « Avec Maia, la France a trouvé le moyen d'accélérer sur une brique technologique du réutilisable qu'elle a raté, non pas sur le plan technique, mais pour des raisons d'arbitrage », a-t-il expliqué. Il espère par ailleurs que ce projet sera « rejoint par des partenaires européens ».
Pour autant, il a rappelé qu'il y a peu de temps encore, il existait pas loin de 250 projets de mini-lanceurs dans le monde. « Je ne suis pas sûr qu'il y aura 250 lanceurs, a souligné Philippe Baptiste. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'y aura pas de marché, ni pour 250 mini-lanceurs, ni pour 25. Ce sera probablement nettement moins. Ce créneau n'est pas un créneau facile et il est très étroit. Il est pourtant très convoité ». La technologie des mini-lanceurs est aujourd'hui beaucoup plus accessible pour les nouveaux entrants, qui sont également encouragés par une volonté politique des pays, qui souhaitent avoir un accès souverain à l'espace.
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