Qu'allons nous manger demain ?

Retranscription du "chat" du 22 octobre avec Xavier Terlet, consultant au Salon International de l'Agroalimentaire.

Bienvenue sur le chat la Tribune.fr. Aujourd'hui , nous avons le plaisir d'accueillir Xavier Terlet, consultant au Salon International de l'Agroalimentaire.

Xavier Terlet : Bonjour à tous...

T1ui : Quel est exactement votre rôle ? Qu'appelle t-on cabinet de veille ?

Mon rôle est d'informer les professionnels -industriels ou distributeurs- des nouveaux produits alimentaires qui peuvent apparaitre à travers le monde.
Nos clients disposent de notre base de données des innovations sur Internet...
Quant à ma fonction sur le Sial, je sélectionne les innovations et j'essaie de les analyser en termes d'évolution de marché et de tendance...

Jack : Travaillez vous en direct dans les sociétés. Si oui lesquels ?

XT : Nous travaillons directement avec de nombreuses entreprises dans le monde.
La liste des plus importantes peut être consultée sur notre site www.xtcworldinnovation.com...

Rem : Qu'avez-vous de plus délirants au salon ? en terme de produits. Ont-ils une chance d'arriver dans notre assiette ?

XT : Le Sial est le salon le plus important en termes d'offres nouvelles alimentaires. IL y a de tout, du bon, du moins bon, des produits sérieux et des gadgets.
Les gadgets ont plus de succès médiatique que commerciaux et ont peu de chances de se retrouver dans notre assiette...

motty : quel avenir pour les produits tres basiques et peu couteux comme le pain standard, les pates, le riz, les pommes de terre en frais, le lait non transformé.... ?

XT : Un bon avenir; Il s'agit là de matières premières qui nécessitent, pour être chez le consommateur, d'être au moins emballées pour être distribuées dans les grandes surfaces.
La naturalité est une des grandes tendances de l'offre alimentaire aujourd'hui.
Par exemple, pour rebondir sur la question précédente, les produits naturels comme les produits bio côtoient des boissons pour nous mettre de bonne humeur et des bonbons aphrodisiaques...

désirée : Est-ce que l'on doit s'inquiéter quand on entend souvent à la radio que des paquets de biscuits par exemple sont à ne pas consommer ? Les contrôles sont-ils de moins en moins sûrs, faut-il être un peu "parano" et se mettre à consommer en priorité du bio ?

XT : Aujourd'hui, les contrôles sont de plus en plus fréquents et de plus en plus sûrs.
C'est pour cela que nous avons les informations sur des retraits de produits. Le plus inquiétant de ne pas avoir ces informations.
Aujourd'hui, on peut dire que, d'une manière générale, l'alimentation industrielle est très sûre, même s'il peut arriver des incidents et les produits bio apportent une dimension naturelle en plus qui plaît à certains consommateurs, prêts à y mettre le prix...

Cdtek : Les gens dans le monde ont-ils les mêmes attentes en terme d'alimentation ?

XT : Bien sûr que non ! Dans nos pays occidentaux, nous avons la chance extraordinaire de pouvoir manger ce que l'on veut presque quand on le veut.
Selon les pays, les attentes diffèrent ; il ne suffit pas d'aller bien loin; par exemple, on ne mangera jamais le même pain en France et en Allemagne.
Au nord de la France, on aime bien la cuisine au beurre et, à l'huile, côté sud...

Jeannot : Il y a vingt ans, on nous prédisait que passé l'an 2000, on ne mangerait plus que comme les cosmonautes, de la nourriture en pilule, en poudre, lyophilisée. Cela ne s'est pas produit. Pourquoi et cela risque-t-il d'arriver ?

XT : Cela ne s'est pas produit et ne se produira jamais. Manger est avant tout une affaire de plaisir et il n'y a aucun plaisir à consommer des pilules ou des poudres...

Marc : L'essor des pays BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine...) pourrait il amener la nourriture de ces pays à s'imposer un peu partout sur la planète (au delà des restaurants spécialisés) au détriment de la nourriture internationale d'origine US comme les McDo ?

XT : Absolument ! Et c'est intéressant parce que cela permet de disposer d'une offre alimentaire de plus en plus variée.
Aujourd'hui, les sushis nous sont familiers, alors qu'ils nous étaient inconnus il y a quelque vingt ans. IL y a encore énormément de gastronomies à découvrir et c'est tant mieux !...

lily : Les produits montrés du doigt comme le sucre ou les graisses vont-ils connaître un retour en grâce ?

XT : Non, je ne pense pas. On assiste aujourd'hui à une responsabilisation du consommateur qui choisit les produits en fonction de leur apport nutritionnel.
C'est donc aussi de leur responsabilité de ne pas consommer de produits gras et de produits sucrés.
Encore, faut-il qu'ils aient l'information sur les conditionnements des produits? Aujourd'hui, les industriels vont tous dans ce sens là...

Isabelle : Bonjour, question sur la peau des fruits:les vitamines contenues dans les fruits se concentrent dans la peau; néanmoins, c'est aussi là où les engrais et les pecticides se concentrent? cela suffit-il de laver les fruits a l'eau et au savon ? ou faut-il mieux les éplucher dans tous les cas ?J'ai entendu dire que les pesticides résistaient aussi à l'eau et au savon...Alors, que faut-il faire ?

XT : C'est une excellente question. Et je dois dire que les nutritionnistes ne sont pas tous d'accord.
Pour ma part, en cas de doute sur l'origine et la naturalité du produit, je lave le fruit ou le légume et je l'épluche si je ne suis vraiment pas sûr.
Effectivement, les produits traités gardent certainement quelques traces de pesticides, mais ce superficiellement...

Emi : testez-vous tous les produits ?

XT : Non. Nous voyons plus de 20.000 nouveaux produits par an, du monde entier, et nous ne pouvons pas tous les tester.
Nous ne faisons que les enregistrer dans notre base de données, les photographier et les décrire.
Certains produits sont quand même dégustés, surtout s'il s'agit de foie gras, de chocolat et autres...

André : Comment concilier sécurité alimentaire et nouvelles tendances ?

XT : C'est justement l'enjeu des industriels qui, aujourd'hui, ne peuvent pas se permettre de jouer avec la sécurité.
Il n'y a jamais eu autant de contrôles qu'aujourd'hui et, par le passé, l'alimentation était beaucoup moins sûre qu'actuellement.
Aujourd'hui, justement, la tendance est au plaisir et , pour que ce plaisir demeure, il faut que le consommateur ait des garanties en termes de sécurité, de santé, de praticité et même d'éthique...

Sam : Plaisir ? Santé ? Forme ? les attentes en apparence semblent parfois incompatibles ? Quel est le bon cocktail ?

XT : Pourquoi incompatibles ? Un jus d'orange pressé, c'est très bon et c'est très bon pour la santé.
Aujourd'hui, l'enjeu des industriels est justement de répondre à ces attentes multiples...

Michel : Que pensez-vous de la fameuse cuisine moléculaire ?

XT : Ici, on est proche du gadget, mais la cuisine moléculaire est un phénomène révélateur de la créativité nouvelle du plaisir alimentaire.
Ainsi, les cuisiniers nous montrent qu'en tenant compte des ingrédients, des supports qu'ils utilisent, ils peuvent multiplier les différentes recettes et des nouveaux horizons gastronomiques.
Tout cela est très prospectif, comme une plate-forme de recherche et développement. C'est le seul intérêt de la cuisine moléculaire...

Sab : Qu'appelle ton alicament ?

XT : Peut on faire confiance à ces produits ? on lit beaucoup de choses dessus mais je ne les vois jamais dans les linéaires.
Vous avez parfaitement raison. Ils ont plus de succès médiatiques que commerciaux.
Les alicaments sont des produits qui apporteraient une fonction santé avant même la fonction plaisir.
Leur place est dans une pharmacie...

Marie : J'ai entendu parler de cosmestofood mais j'ai du mal à croire que cela peut m'aider à mieux vieillir. Je pense que les industriels jouent à fond la carte du marketing pour mieux vendre leur produit mais que ces produits ne m'aideront pas à améliorer mon aspect physique.

XT : Là aussi, vous avez raison. Les cosmétofoods sont des inventions marketing.
Notre alimentation a, en évidence, un rôle sur notre santé et notre aspect.
Bien manger est donc nécessaire pour être en bonne santé et avoir une bonne apparence.
Et ces fameux cosmétofoods sont déjà très rares dans leur pays d'origine, au Japon. En France, cela n'a jamais marché.
Plutôt que manger un yaourt cosmétofood, je vous conseillerai davantage une bonne salade de carottes râpées, riches en bétacarotène...


Charles : Pensez vous que les habitudes alimentaires du monde entier se sont mis à converger ? Y a til uniformisation alimentaire ?

XT : Je n'y crois absolument pas ! La mondialisation n'est pas uniformisation, au contraire.
Plus nous connaissons les nouveaux produits du monde entier, plus nous les utilisons et les mélangeons à notre alimentation en les adaptant à nos coutumes et habitudes.
Cela donne une multiplicité des possibilités et des variétés à notre disposition.
Ce n'est pas parce que nous connaissons, depuis quelques années, les produits japonais, que nous consommons comme les Japonais.
Et, un signe : il y a peut-être moins d'une dizaine de produits qui sont identiques d'un bout à l'autre de la planète.
Même la recette de McDo diffère d'un pays à l'autre ; même Coca-Cola a été obligé de changer ses recettes selon les pays où il veut s'implanter.
Dans certains pays, il est plus sucré, dans d'autres on le mélange à des fruits, etc.
McDonald's aux Etats-Unis ne croyait pas à la salade typiquement française. C'est aujourd'hui une des meilleures ventes des produits vendus en France, chez McDo...

Spide : Y a til un pays qui est le plus représentatif en terme de nouveauté où se situe la France ?

XT : Les pays les plus innovants en matière d'alimentation sont, dans l'ordre : Etats-Unis, Japon, Royaume-Uni. La France doit arriver en quatrième ou cinquième position.
Je parle là du nombre de nouveautés lancées sur le marché.
Mais sur toutes ces nouveautés, il faut savoir que, seulement, une sur deux existera encore dans deux ans. C'est donc beaucoup d'argent investi en pure perte.
Il est donc important que les industriels ne lancent pas de fausses innovations et qu'ils répondent le plus justement possible aux attentes du consommateur et, surtout actuellement, avec un prix adapté...

Dess : La crise va-t-elle ralentir les innovations de nouveaux produits ?

XT : Tout à fait. On observe actuellement un certain ralentissement des initiatives industrielles et des projets gardés sous le coude.
Cependant, mon conseil aux industriels est de ne pas attendre pour lancer leurs innovations, car cela demeure une attente du consommateur.
La seule exigence du consommateur aujourd'hui, c'est que les nouveaux bénéfices apportés soient au meilleur prix.
A ce titre là, le consommateur se retournera volontiers vers les marques de distributeurs, qui sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus innovantes.
IL sera difficile pour l'industriel de reséduire le consommateur, le moment venu, qui restera peut-être fidèle au produit marque distributeur qu'il aura choisi...

Emilio : Peut on faire confiance aux produits bio ou aux produits issus du commerce équitable ? Seront-ils demain une vraie solution dans notre alimentation ?

XT : Je crois qu'on peut faire confiance aux caractères bio ou équitable de ces produits, dès lors qu'ils disposent d'un label officiel.
Il faut se méfier des simples discours marketing sans preuves.
Quant à savoir s'ils seront une vraie solution dans notre alimentation, je crois en tout cas qu'ils en seront une réalité à prendre en compte...

Axel : Quelle a été le produit qui vous a le plus bluffé depuis que vous avez commencé ?

XT : Le prochain produit qui rentrera dans notre base de données.
Blague à part, je fais ce métier depuis plus de vingt ans.
Enormément de produits me bluffent. Certains sont tellement étonnants qu'il m'est arrivé d'en faire un livre, épuisé aujourd'hui ("Drôle de goût", Ed. Glénat)...

Merci Xavier Terlet. Le mot de la fin ?

XT : Après toutes ces années, une chose dont je suis sûr, c'est que l'alimentation doit être affaire de plaisir.
Ne laissons pas les nutritionnistes, les docteurs et autres prendre le contrôle des fourneaux.
La cuisine, la transformation et l'assemblage des ingrédients est un art au service du plaisir. Et espérons qu'il en sera toujours ainsi...

 

 

 

 

 


 

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Commentaires 3
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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est ce que le seul fait d'indiquer 7 additifs signaler comme plus ou moins noçifs et présents dans un plat préparé du style pizza ou diverses tartes suffit à légaliser leur prèsence sur le marché de la malbouffe!!!?

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Les résultats d'analyses indiquent que les pesticides sur les fruits tels que les pommes pénètrent jusqu'à un centimètre de profondeur. Nous avons ici un florilège de réponses de l'industrie qui démontrent le but réel des fabricants. L'industrie a...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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A toujours et encore parler de plaisir, on affaiblit ce concept. Peut être faudrait-il créer un nouveau mot. Manger est d'abord une nécessité vitale; rien que ça est un plaisir. Toujours parler de plaisir est un diktat obligée en France dés lors qu'o...

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