Une alimentation durable à un prix attractif : le casse-tête des cantines face à l’inflation

Alors que le prix des denrées alimentaires ne cesse d'augmenter, la restauration collective se heurte à l'enjeu de proposer des repas attractifs. Plusieurs solutions ont déjà été établies pour réduire les coûts mais certaines communes n'ont pas d'autres choix que de demander un financement supplémentaire. Explications.
L'inflation sur les denrées est un facteur qui booste la demande de plats végétariens
L'inflation sur les denrées est un facteur qui booste la demande de plats végétariens (Crédits : Reuters)

Le prix du repas à la cantine va-t-il augmenter ? C'est en tout cas l'option que pourrait prendre de nombreuses communes pour 2023. La faute à l'augmentation du coût des matières premières couplée à un déficit en approvisionnement. Pour rappel, la hausse des prix alimentaires avait augmenté de 12% en octobre, un rythme deux fois plus rapide que l'inflation (+6%). Et la valse des étiquettes n'est pas terminée puisque d'autres augmentations sont encore à prévoir. De quoi fragiliser encore un peu plus la filière de la restauration collective, déjà mal en point après la pandémie de Covid-19. « On a évalué notre besoin pour faire face à cette crise : il est de 45 centimes supplémentaires pour chaque repas pour répondre à la fois aux enjeux alimentaires et faire face à l'inflation », explique Marie-Cécile Rollin, directrice de Restau'Co, le réseau interprofessionnel de la restauration collective. Un montant qui est loin d'être neutre si l'on songe que le coût des repas varient entre 1 euro et 7 euros selon les revenus familiaux.

Augmenter le prix des repas pour ne pas être dans le rouge

Pour éviter la catastrophe, la moitié des communes françaises ont déjà demandé aux parents d'élèves de mettre la main à la poche, d'autres ont quant à elles préféré puiser dans leurs fonds propres. Nul doute que ce sujet fera l'objet d'une grande partie des discussions des budgets des communes pour l'année 2023.

D'autres actions ont par ailleurs été mises en œuvre pour ne pas pénaliser les budgets des contribuables. Certains produits de qualité ont ainsi été écartés des menus, en particulier le bio, en moyenne plus cher que les produits conventionnels. « Même si l'inflation a été moins élevée sur le bio, c'est le plus simple à écarter pour dégager une marge de manœuvre », explique Marie-Cécile Rollin.

Autre moyen de faire des économies, la lutte contre le gaspillage. « On retravaille l'offre avec des cartes plus courtes, il y a moins d'entrées, de plats... ça permet de lutter aussi contre le gaspillage alimentaire qui représente un gros poste de dépenses », précise le groupe Elior. En 2016, l'Ademe avait chiffré à 27 centimes par repas le coût du gaspillage en restauration collective et jusqu'à 68 centimes si on intégrait les coûts indirects comme le temps passé en cuisine, la facture sur les déchets... Certaines cantines ont quant à elles décidé de proposer des menus avec quatre composantes au lieu de cinq, c'est-à-dire un choix entre l'entrée ou le fromage.

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L'option végétarienne, un levier intéressant

Autre option, augmenter la proposition de plats végétariens. Cuisiner sans viande revient généralement moins cher, à condition de cuisiner des produits bruts. Une option d'autant plus intéressante que les plats végétaux sont de plus acceptés.

« Aujourd'hui il n'y a pas qu'une augmentation du prix des matières premières, il y a aussi un problème d'approvisionnement en viande en particulier en volaille avec la grippe aviaire. Ces deux facteurs font qu'on a une accélération de l'acceptation des plats végétariens », souligne Marie-Cécile Rollin.

Mais cette solution peine à se développer. La faute à un problème de formation du personnel à la cuisine végétarienne qui ne permet pas de proposer des repas diversifiés et appétissants sans protéines animales. « Le problème c'est qu'au début, il y a une forte tendance à acheter des produits transformés pour l'option végétarienne, ce qui revient aussi cher que la viande. Mais à long terme, ce choix est stratégique. Lille, par exemple, a économisé 20 centimes pour chaque repas végétarien proposé », souligne Sarah Bienaimé, chargée de plaidoyer à Greenpeace.

Problème : si l'option végétarienne a le vent en poupe, elle pourrait bien se heurter à une nouvelle version de l'arrêté de 2011 relatif à la qualité des menus dans les cantines scolaires, proposé par les ministère de l'Agriculture, la Transition écologique et de la Santé dans les prochains mois.

Les objectifs d'EGALIM encore loin d'être atteints

Aujourd'hui, il est en effet obligatoire d'avoir un menu végétarien par semaine avec la loi EGALIM, complété par la possibilité de proposer une option végétarienne à chaque repas pour les communes qui le souhaitent. Une alternative actuellement en test dans plus de 200 villes et communes. Mais les ministères souhaitent désormais inscrire dans la loi l'obligation de manger du poisson et de la viande pour des raisons de santé, ce qui annulerait de facto la proposition de plats végétariens chaque jour.

Pour Greenpeace en revanche, annuler l'option végétarienne serait une mauvaise idée car il s'agit d'une bonne alternative pour répondre à la fois aux enjeux de durabilité et d'économie et la demande est élevée. « Selon nos données, les plats végétariens sont choisis dans 25% des cas lorsqu'ils sont proposés, c'est énorme. »

La restauration collective essaie donc de jongler entre une volonté de l'Etat d'améliorer la qualité des repas et la nécessité de ne pas proposer des plats hors de prix. Une situation délicate en ces temps d'inflation et qui pénalise surtout la filière bio. Laure Verdeau, directrice de l'Agence bio déplorait, dans un entretien avec La Tribune récemment, le manque de produits bio dans ce secteur. En effet, alors que la loi demande 50% de produits durables dont 20% de bio, les restaurations collectives sont à peine à 6%. Le chemin pour atteindre les objectifs d'EGALIM semble encore long.

Sodexo démarre fort

L'entreprise Sodexo a annoncé ses résultats commerciaux de l'année ce vendredi 6 janvier. Sur son premier trimestre, soit entre septembre et novembre 2022 et alors que l'inflation sur le panier alimentaire était au plus haut, le géant de la restauration collective a enregistré une hausse de 20% de son chiffre d'affaires pour atteindre 6.3 milliards d'euros. Une hausse expliquée notamment par un taux de change entre le dollar et l'euro favorable. L'entreprise s'en sort bien grâce à son marché hors de France qui lui a permis de répercuter les coûts de l'inflation sur ses prix contrairement au marché français. Le groupe a annoncé des objectifs de croissance interne compris entre 8% et 10%  pour 2023.

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Commentaires 3
à écrit le 07/01/2023 à 23:58
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Ma cantine d entreprise - grosse boîte public en idf sans ticket restau- est passée de 5 € à 8 € le repas en reste à charge au salarié ( seulement 3€ De participation employeur, quand mon épouse sans le privé sur 9€ en a 6€ De son employeur). Cett...

à écrit le 06/01/2023 à 19:07
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Le prix des repas en cantine est trop élevé pour beaucoup de familles. Il devrait etre mise à disposition une "salle hors sac" pour les enfants qui desireraient apporter leur repas. Même succinct, ce serait souvent bien mieux que ce qui est serv...

le 07/01/2023 à 0:28
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En fait se reproduire c'est beaucoup de dépenses contraintes, pour peu de bénéfices, même pas de retour sur ses vieux jours. Quel intérêt ?

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