Renault ne s'opposera pas à la nomination de Carlos Tavares comme patron de PSA

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  717  mots
Renault ne s'opposera pas à la nomination de son ancien numéro 2, Carlos Tavares, à la tête de PSA
Renault ne fera pas barrage à l'arrivée de Carlos Tavares, ex-numéro 2 du groupe, chez PSA, selon une source industrielle. La clause de non-concurrence devrait être levée.

Renault "ne s'opposera pas" à l'arrivée de Carlos Tavares, ex-numéro 2 du groupe, chez PSA, selon une source industrielle. PSA Peugeot Citroën doit annoncer ce lundi après bourse la nomination de Carlos Tavares. Pour remplacer d'ici à l'été prochain Philippe Varin à sa tête. "Il y a une clause de non-concurrence. Et il faut que la clause soit levée pour que Carlos Tavares puisse accepter le poste qu'on lui propose chez PSA", explique officieusement Renault.

Pas intérêt à l'écroulement de PSA

Mais, "Renault n'a pas intérêt à ce que  PSA s'écroule. Il ne fera donc pas barrage", affirme notre informateur. On voit mal en effet Carlos Ghosn, PDG de Renault, se mettre tout le monde à dos en refusant que Carlos Tavares, qu'il a limogé l'été dernier après des déclarations jugées intempestives, rejoigne PSA pour sauver ce dernier de la crise dans laquelle il est englué.

Pourtant, Carlos Tavares connaît, et pour cause, tous les secrets de Renault - et de son allié japonais Nissan -, les plans des futurs produits, les coûts de revient en fabrication... Chez Renault, toutefois, on relativise. "Les deux entreprises sont très différentes. Même s'il veut tenir compte de tout ce qu'il connaît de l'avenir de Renault, ça va lui prendre trois ans chez PSA  pour préparer la riposte. A ce moment-là, Renault en sera à une autre étape. Ce n'est donc pas très grave", souligne une source bien informée.

Négociations avec Dongfeng

Philippe Varin, président du directoire depuis 2009, va céder les rênes de PSA . Il doit toutefois au préalable conclure une nouvelle alliance stratégique pour PSA, après le ratage de son rapprochement avec le japonais Mitsubishi, puis le semi-échec de son mariage avec GM. Il négocie actuellement une vaste alliance avec le consortium chinois Dongfeng, en vue d'une augmentation de capital jusqu'à trois milliards d'euros. Cette opération verrait l'Etat français et Dongfeng prendre chacun une participation de l'ordre de 20-30% dans le constructeur, toujours d'après l'agence Reuters. "Une lettre d'intention entre PSA Peugeot Citroën et Dongfeng pourrait être signée avant Noël", affirmait récemment une source interne du groupe auto français. 

Une expérience intercontinentale

Ingénieur d'origine portugaise, passionné et fin connaisseur de l'automobile, Carlos Tavares apportera au groupe PSA les talents et les connaissances stratégiques et technologiques  qui lui manquent. Ce sportif, qui dispute à ses heures de loisirs des épreuves avec sa propre voiture de course, pourra rivaliser avec les spécialistes de l'automobile que sont la plupart des patrons des constructeurs allemands !

Ce centralien arrivé chez Renault en 1981, où il a notamment dirigé le projet de la Mégane, est parti chez Nissan en 2004 . Homme lige de Carlos Ghosn, il a notamment été responsable de la stratégie et du planning des produits au sein de l'allié nippon de Renault, avant de devenir le patron de la zone Amériques du groupe japonais. Il est revenu chez Renault en 2011 comme Directeur général délégué, pour remplacer Patrick Pelata, sacrifié par Carlos Ghosn à cause de la pseudo affaire d'espionnage.

Polyglotte, cet homme réputé austère, intègre, travailleur et exigeant, supportait mal chez Renault d'être cantonné au rôle de numéro 2. A l'initiative du projet de renaissance de la marque sportive Alpine au sein de l'ex-Régie, Carlos Tavares apportera, outre sa connaissance de l'automobile, sa vision internationale et sa vaste culture d'entreprise japonaise et anglo-saxonne. Cet excellent patron opérationnel n'a toutefois jamais eu encore la responsabilité stratégique d'un constructeur. Rude gageure, vu l'état de PSA.

Crise financière profonde

PSA a vu son chiffre d'affaires baisser de 3,7% sur un an au troisième trimestre, et de 3,8% sur les neuf premiers mois de l'année, alors que les incertitudes sur son avenir restent vives. Sa division automobile, qui se trouve au cœur de ses activités, demeure lourdement déficitaire, avec une perte opérationnelle de 510 millions d'euros sur le premier semestre. PSA devrait encore brûler 1,5 milliard d'euros de cash cette année! Les usines tournent en Europe à 74% à peine de leurs capacités, et même à 61% seulement sur la seule France. C'est peu.