Un an après, quel bilan pour le plan de rénovation des bâtiments ?

Par César Armand  |   |  959  mots
Il y a un peu plus d'un an, Nicolas Hulot, alors ministre de la Transition écologique et solidaire, présentait le plan du gouvernement visant à rénover les bâtiments publics et privés. Où en est-on aujourd'hui ? Que reste-t-il à faire ? Le point sur les principales avancées.

"Essayer de provoquer la confiance au niveau des banques", "clarifier, fluidifier et simplifier tous les dispositifs", "faire des bâtiments publics des bâtiments exemplaires". Le 26 avril 2018 à Angers (Maine-et-Loire), Nicolas Hulot, alors ministre de la Transition écologique et solidaire, réaffirmait la nécessité de réhabiliter 500.000 logements par an : 100.000 logements sociaux, 250.000 logements particuliers et 150.000 passoires thermiques. Un an et une semaine après, force est de constater qu'une fois encore, comme cela a été chaque année le cas depuis le Grenelle de l'Environnement qui fixait déjà cet objectif en... 2008, les objectifs ne sont pas tenus. L'observatoire censé suivre ces mesures et effectuer un suivi statistique n'a même pas été créé.

"La situation est préoccupante, s'alarme Jean-Baptiste Lebrun, directeur du réseau Cler pour la transition énergétique. "Il n'y a pas de suivi ni de pilotage de ce plan. Le comité de pilotage ne s'est réuni qu'une seule fois." Philippe Pelletier, président du Plan bâtiment durable, ne dit pas autre chose : "Nous avons besoin d'un ministre qui porte l'étendard. Dans quelques jours, je vais voir la secrétaire d'Etat Emmanuelle Wargon et le lui demander. Le verbe politique a du poids dans notre pays."

Imbroglio sur les prêts de la Caisse des Dépôts

Sur les 14 milliards d'euros mobilisés d'ici à 2022 dans le cadre du grand plan d'investissement, 3 milliards de la Caisse des dépôts sont prévus pour aider les collectivités. En réalité, d'après le député (ex-LREM) du Maine-et-Loire Matthieu Orphelin, seuls 6 millions d'euros sur 2 milliards de prêts ont été consommés, pas plus que ne l'a été l'enveloppe de 500 millions d'euros d'avances.

"Dès février, j'ai alerté l'Elysée et Matignon, assure Matthieu Orphelin. Les taux de la Caisse ne sont pas attractifs. Cet argent dort. Il faut absolument changer la donne et faire campagne, avec un suivi très précis et qui serait bien utile. C'est de la gabegie financière !

Le président du Plan bâtiment durable nuance : "les prêts ne sont pas compétitifs car la Caisse est enfermée dans un rapport entre le taux du livret A et les taux d'intérêt qu'elle propose. Il faut sortir de cet imbroglio grotesque !" Néanmoins, les garanties financières que peut apporter une collectivité dans le cadre d'une société d'économie mixte se consolident avec sa dette et entrent dans les critères de Maastricht. "Il faut que ce soit perçu comme de l'investissement et il est probable que les banques mutualistes proposent une capacité de financement", plaide Philippe Pelletier. Ce dernier assure par ailleurs que l'enveloppe de 500 millions d'euros d'avances aux collectivités "fonctionne".

150 citoyens chargés de redessiner les aides

L'ex-ministre Nicolas Hulot voulait créer "un choc de confiance" et "associer" tous les Français à l'effort collectif. Lors de sa conférence de presse du 25 avril dernier, le président Macron a, lui, décidé d'impliquer 150 citoyens tirés au sort pour "redessiner toutes les mesures concrètes d'aides aux citoyens (...) de la rénovation des logements (qu'il s'agisse de l'isolation ou du chauffage) pour les rendre plus efficaces, de définir si besoin était d'autres mesures incitatives ou contraignantes et aussi des ressources supplémentaires et de proposer des financements pour ce faire".

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En réalité, le gouvernement semble avoir délégué aux bailleurs sociaux la responsabilité de prendre en charge le sujet de la rénovation. En échange d'un pacte d'investissement 2020-2022 signé jeudi 25 avril à Matignon, les offices HLM se sont engagés à réaliser chaque année la rénovation thermique de 125.000 logements sociaux. Lundi 29 avril, c'est le groupe Action Logement (ex-1% Logement) qui a annoncé le déblocage en septembre prochain d'un milliard d'euros pour "améliorer la performance énergétique" des logements. Sous condition de ressources, les propriétaires occupants pourront bénéficier d'une subvention d'un montant maximal de 20.000 euros et les propriétaires bailleurs de 15.000 euros. Les propriétaires pourront également profiter de prêts complémentaires de 10.000 euros à 30.000 euros.

"L'ensemble du dispositif pourra être cumulé avec les aides existantes", assure le président d'Action Logement, Bruno Arcadipane. 
"Un propriétaire occupant pourra bénéficier de maximum 20.000 euros de subventions et jusqu'à 30.000 euros de prêts, soit 50.000 euros pour ses travaux. C'est énorme et sans aucun reste à charge !"

Une simplification des aides qui se fait attendre

Présent lors de cette annonce, le ministre de la Ville et du Logement Julien Denormandie a refusé de commenter un plan de rénovation énergétique "qui tourne au ralenti""Faut-il porter ce plan avec plus d'énergie ? Évidemment au regard de l'ampleur de la tâche ! Il existe une myriade d'aides. Nous sommes dans une situation où l'on a accumulé les aides et où l'on dit aux Français : "Adaptez-vous à ce volet kafkaïen !" Ma démarche est de rendre tout cela accessible." Le 26 avril 2018, Nicolas Hulot avait lui aussi promis "un effort drastique de simplification des aides nombreuses, complexes, mal articulées et souvent méconnues."

Par exemple, parmi ces aides, le crédit d'impôt pour la transition énergétique n'a pas été transformé en prime en 2019, mais le sera en 2020. "Il faut trancher rapidement pour les ménages qui la percevront, s'impatiente Philippe Pelletier du Plan bâtiment durable. "Que la solution soit pérenne pour 2021, 2021, 2022..."  Le député Matthieu Orphelin s'agace également de ce délai : "Beaucoup d'aides s'additionnent et il est compliqué d'arriver à toutes les mobiliser. La prime permettrait d'inciter plus de gens qui ne peuvent pas attendre dix-huit mois avant de toucher un crédit d'impôt."