Depuis le 1er septembre, les stations-service TotalEnergies sont prises d'assaut par les automobilistes. Certaines sont même en rupture de carburants. La raison ? Les prix à la pompe y sont actuellement moins élevés qu'ailleurs, grâce à la nouvelle remise de l'Etat, relevée à 30 centimes le litre, ainsi qu'au geste commercial concédé par le groupe pétrolier lui-même.
Après deux aides à la pompe déjà accordées au printemps et cet été, le géant gazier et pétrolier applique, depuis le 1er septembre et jusqu'à fin octobre, une ristourne de 20 centimes par litre sur les carburants dans ses propres stations-service. Cette remise passera à 10 centimes par litre à partir de novembre jusqu'à la fin de l'année 2022. Une manière pour TotalEnergies de montrer patte blanche, alors que le gouvernement et une partie des parlementaires voudraient taxer ses superprofits, dégagés avec l'inflation des matières premières, en pleine crise énergétique accentuée par la guerre en Ukraine.
Si les automobilistes sont gagnants, les autres stations-service ne voient pas ce geste d'un bon œil. Les stations-service adossées à des enseignes de la grande-distribution, comme les indépendantes, dénoncent « une distorsion de concurrence » et une situation « inéquitable » qui risque de fragiliser encore davantage certaines petites stations indépendantes en zone rurale ou péri-urbaine.
Les petites stations indépendantes ne peuvent pas s'aligner
Les représentants des stations-service indépendantes affirment qu'il leur est impossible d'effectuer une telle remise comme celle accordée par TotalEnergies à ses clients. « Les marges nettes en station-service sont de 1 à 2 centimes nets. On ne peut pas s'aligner », affirme à La Tribune Francis Pousse, président de la fédération des distributeurs carburants et énergies nouvelles chez Mobilians, qui représente les stations-service hors grandes surfaces.
« Si ça devait perdurer, il y aura des dégâts. Pour les stations qui sont déjà fragilisées, il est possible qu'elles ne survivent pas », prévient aussi Frédéric Plan, délégué général de FF3C, organisation professionnelle représentative des entreprises de distribution de produits pétroliers qui représente notamment 800 stations-service situées hors des métropoles. « C'est normal que les clients aillent là où c'est le moins cher. Mais nous on demande de laisser jouer les conditions normales de concurrence. Là, la situation est assez intenable», fustige Frédéric Plan.
Sur le réseau hors stations Total et grandes surfaces, il note une baisse immédiate de 30 à 40% des volumes de ventes en début de semaine. « Il y a un problème d'iniquité », déplore-t-il. « Le gouvernement doit prendre en compte cette situation tout à fait particulière », estime pour sa part Francis Pousse.
Systèmes U et E.Leclerc veulent bénéficier de la remise de TotalEnergies
De leur côté, les supermarchés Systèmes U et E.Leclerc dénoncent « une distorsion de concurrence » et se tournent directement vers TotalEnergies. Ces enseignes de la grande-distribution, qui perdent aussi des parts de marché sur leurs stations-service, exigent du géant pétrolier qu'il leur applique aussi sa ristourne. Or, « Total est à la fois notre fournisseur et notre concurrent », résumait mercredi Michel-Édouard Leclerc, président du comité stratégique des centres E.Leclerc sur RTL. « Systèmes U et Leclerc, on achète le carburant ensemble [...] c'est le même carburant dans nos stations. Une partie de ce carburant est livré par Total », avait aussi expliqué mardi le directeur général de Systèmes U, Dominique Schelcher.
Le groupe pétrolier est en effet un cas unique sur le marché des carburants en France, car il a la particularité de vendre à la pompe du carburant dans ses stations, mais il fournit aussi les deux tiers du marché français. Or, en tant que fournisseur, il ne fait pas de cadeaux. Compte tenu de cette situation, les stations clientes de TotalEnergies estiment donc qu'elles sont aussi en droit de bénéficier de la remise accordée aux automobilistes.
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