
Tous ont été échaudés par le scandale du Daraprim, un médicament luttant contre une infection parasitaire potentiellement mortelle, augmentée de 5 000 % par Turing Pharmaceuticals, fin 2015. Donald Trump, Bernie Sanders ou encore Hillary Cliton, tous ont déclaré vouloir s'attaquer au prix des nouveaux médicaments. La candidate démocrate prévoit, par exemple, une réforme pour donner plus de poids aux compagnies d'assurance, aux groupes de médecins et de patients pour faire pression sur les industries pharmaceutiques. Cela donnerait par exemple la possibilité aux Américains d'acheter certains médicaments à l'étranger, à un prix plus bas.
Les organismes payeurs font pression
Aux États-Unis, marché numéro un des laboratoires pharmaceutiques, le prix du médicament est fixé sur la base d'une politique de l'offre et de la demande, contrairement à la France. Après validation par la FDA, l'autorité américaine qui décide de la mise des médicaments sur le marché, « il y a une négociation entre les laboratoires pharmaceutiques et les assureurs locaux. Pour cela, ces derniers ont la liberté ou non de finaliser la négociation sur les différents produits », rappelle à La Tribune Cédric Foray pour le cabinet de conseil EY. Désormais, les mutuelles ont tendance à fusionner, et, en s'associant, mettent une pression de plus en plus importante sur les prix.
Les fabricants de médicaments acceptent des concessions plus importantes afin que leurs produits restent remboursés, selon une étude du cabinet IMS Health.
Celle-ci montre en effet que les dépenses américaines s'orientent vers une croissance au ralenti. Le cabinet estime que la hausse annuelle des dépenses en médicaments va passer à 4% - 7% par an d'ici à 2020, contre une hausse des dépenses de 8,5% sur un an, en 2015 (274 milliards d'euros au total). Cette année-là, ce sont les nouveaux médicaments de spécialité, comme le Sovaldi et le Harvoni de Gilead, capables de guérir l'hépatite C, ou encore les nouveaux anticancéreux (immunothérapie) qui ont tiré les dépenses vers le haut, représentant 121 milliards de dollars de dépenses nettes à eux seuls.
Dans les années à venir, les dépenses ralentiront pour les produits moins innovants soumis à une forte concurrence, estime IMS Health. Déjà en 2015, pour la première fois, le prix du Lantus de Sanofi a baissé face à des insulines concurrentes, et notamment un produit de Novo Nordisk.
Entre 2010 et 2015, selon Bloomberg, le prix du blockbuster du géant français avait pourtant été augmenté de 168%...
La croissance des dépenses ne sera toutefois pas enrayée, car « il faut prendre en compte le facteur démographique », rappelle Cédric Foray. « Le vieillissement de la population va stimuler la consommation de médicaments dédiés aux maladies chroniques, avec des traitements susceptibles de s'allonger et de peser énormément sur les coûts. »
Un coup dur pour le chiffre d'affaires des "Big Pharmas" ?
Les médicaments innovants devraient moins subir la pression des organismes payeurs. Interrogé par le Financial Times en janvier, le chef exécutif de Roche, Severin Schwan, clamait que les Big Pharmas devaient se focaliser sur les médicaments innovants à valeur ajoutée, afin d'éviter au maximum la pression économique. Le géant suisse compte lui-même beaucoup sur ses nouveaux anticancéreux pour maintenir sa croissance à l'avenir.
Mais se focaliser sur le prix des médicaments innovants ne devrait pas suffire, estime Cédric Foray, qui a l'habitude de travailler avec les industries du médicament.
« Celles-ci sont inquiètes. Si l'on continue dans ce mode-là, avec une perte de confiance entre organismes payeurs et laboratoires pharmaceutiques, et si l'on ne change pas la façon de fixer les prix et de financer les médicaments, les industries perdront 17 % de chiffre d'affaires en 2020 », explique-t-il, en s'appuyant sur une étude du cabinet.
Un coup dur pour les Big Pharmas, mais un soulagement pour les caisses des organismes payeurs...
Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !