Résistance aux antibiotiques : face à cette autre pandémie qui guette, l'OMS exhorte le monde à tirer les leçons du Covid

L'OMS publie une étude alarmante qui révèle qu'aucun des 43 antibiotiques actuellement en cours de mise au point ne permet de combattre efficacement les bactéries les plus dangereuses en circulation, ces super-bactéries capables de résister à plusieurs classes d'antibiotiques. Mais elle estime que, face aux réticences des labos à investir, des progrès rapides sont réalisables dès lors qu'une volonté politique se manifeste. Et c'est une véritable course contre la montre qui est engagée si l'on ne veut pas voir l'avénement d'une "ère post-antibiotique".
(Crédits : Denis Balibouse)

Qu'est-ce que la résistance aux antibiotiques? Santé Publique France l'explique sommairement sur son site:

"La résistance aux antibiotiques rend inefficace un ou plusieurs antibiotique(s) contre une infection bactérienne. Ce phénomène peut conduire à la difficulté, voir l'impossibilité de traiter certaines infections."

Dit autrement, les maladies autrefois traitables deviennent de plus en plus résistantes aux antibiotiques. Et, selon une vaste étude britannique menée en 2014, toujours pas démentie par la recherche depuis, ce fléau va produire quelque 10 millions de morts par an d'ici à 2050.

Une des 10 plus grandes menaces contre l'humanité, selon l'OMS

Alors que le développement de nouvelles molécules est devenu de plus en plus lent, le développement de la résistance antibactérienne est au contraire de plus en plus rapide. C'est une véritable course contre la montre. À terme, ce problème pourrait nous conduire dans une ère post-antibiotique, où la moindre blessure ou chirurgie constituerait un risque important d'infection dangereuse.

Le monde scientifique nous met en garde contre l'ampleur du problème de la résistance aux antimicrobiens depuis plusieurs décennies. Comme pour le changement climatique, il a malheureusement fallu beaucoup de temps pour sensibiliser les gouvernements et le grand public à la gravité de la situation.

L'Organisation mondiale de la santé (OMS), un acteur clé dans ce domaine, a identifié la résistance aux antimicrobiens en 2019 comme l'une des 10 plus grandes menaces pour la santé publique auxquelles l'humanité est confrontée. Plus récemment, l'OMS a également publié une liste des défis sanitaires critiques pour les 10 prochaines années, y compris non seulement l'éradication des maladies infectieuses mais aussi la préservation des médicaments antimicrobiens.

Lire aussi : L'OMS, pivot mondial de la prévention des pandémies ? (note du Quai d'Orsay) 1/4

Très peu de nouveaux médicaments efficaces contre les super-bactéries

Ce jeudi 15 avril, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié un nouveau rapport sur les médicaments en cours de mise au point pour lutter contre les super-bactéries (ainsi nommées parce qu'elles résistent à de nombreuses classes d'antibiotiques). Ce rapport fait le sombre constat qu'il n'y a que très peu de nouveaux médicaments efficaces dans les projets des laboratoires pharmaceutiques.

"Les antibiotiques sont le talon d'Achille de la couverture santé universelle et de notre sûreté sanitaire", a souligné Haileyesus Getahun, chargé à l'OMS de la division résistance aux antibactériens.

Tout est volonté politique, c'est la leçon du Covid

Pourtant, l'OMS estime que la mobilisation contre le Covid-19 a prouvé que des progrès rapides pouvaient être réalisés quand ils sont aiguillonnés par la volonté politique.

"Les occasions qui se présentent à la lumière de la pandémie de Covid-19 doivent être saisies pour souligner le besoin d'un investissement durable (dans la recherche) de nouveaux antibiotiques efficaces", a-t-il ajouté.

Il suggère la création d'un mécanisme mondial permettant de rassembler des fonds pour lutter contre la résistance des bactéries à l'instar de ce qui a été fait pour mettre au point des vaccins contre le Covid.

La résistance aux antibactériens n'a fait que grandir parce que les antibiotiques sont trop et mal utilisés, que ce soit dans l'élevage animal ou pour soigner les humains. Les bactéries développent alors des résistances et ne répondent plus aux traitements existants.

Créer de nouveaux antibiotiques coûte cher, et les labos sont réticents

Il faut donc créer de nouveaux antibiotiques, mais les groupes pharmaceutiques sont réticents à investir de grosses sommes dans un secteur qui est vu comme peu rentable.

Ainsi la plupart des antibiotiques qui ont été mis sur le marché sont des classes de médicaments découvertes avant les années 1980, a souligné l'organisation.

Dans son rapport annuel, elle note qu'aucun des 43 antibiotiques actuellement en cours de mise au point ne permet de combattre efficacement les bactéries les plus dangereuses en circulation.

Elle souligne aussi que 82% des antibiotiques récemment autorisés font partie de classes de médicaments auxquelles des bactéries se sont déjà montrées résistantes.

"Bien qu'il y ait des produits novateurs en cours de mise au point, il est probable que seule une fraction d'entre eux sera mise sur le marché en raison des taux d'échec élevés dans le processus", mettent en garde les auteurs du rapport.

Pour la première fois, l'OMS fait aussi le catalogue de médicaments antibactériens non traditionnels. Elle en recense 27, y compris des antigènes monoclonaux ou encore l'usage des phages, ces virus infectant uniquement des bactéries qui furent beaucoup utilisés derrière le "rideau de fer" pendant la Guerre froide et aujourd'hui redécouverts en Occident.

(avec AFP et Reuters)

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Commentaires 3
à écrit le 16/04/2021 à 9:48
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Sur 100 bactéries entre 3 et 5 sont dangereuses pour l'homme permettant un équilibre sain qui a accompagné l'humanité durant des millions d'années, puis l'homme avec tout ses produits chimiques a voulu tuer les bactéries mais comme les mauvaises bact...

à écrit le 15/04/2021 à 20:47
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Et à tenter d'éradiquer autant de petits virus via des vaccins, antibiotiques ou autres, ces virus mutent et deviennent résistant, comme tout être vivant il s'adapte pour survivre...

à écrit le 15/04/2021 à 18:11
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Est il possible en 2021 , d’interdire la production de masse , d’interdire l’ogm, de revenir à une agriculture noble ( c’est à dire ne pas utiliser des pesticides pour faire mûrir le blé , que nous trouvons partout dans tous les produits industriels)...

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