Éolienne géante : la sensible question du recyclable des pales en voie d'être résolue

Le projet Zebra, piloté par l'IRT Jules Verne, a annoncé le déploiement du premier prototype à l'échelle 1 de la plus grande pale d'éolienne au monde 100 % recyclable. Un enjeu fondamental pour la filière qui doit faire face au défi de la fin de vie de ces types de constructions.
Longue de 62 mètres, la pale d'éolienne produites par les acteurs du projet Zebra serait 100% recyclable.
Longue de 62 mètres, la pale d'éolienne produites par les acteurs du projet Zebra serait 100% recyclable. (Crédits : DR)

Elles sont le maillon faible dans le recyclage des éoliennes terrestres et off-shore. D'une durée de vie de 20 à 30 ans, les pales, jusqu'ici fabriquées à base de fibres de verre, de résines thermodurcissables ou de carbone font l'objet de deux programmes de recherches pour les rendre entièrement recyclables. En compétition avec le projet Cetec (Circular Economy for Thermosets Epoxy Composite) lancé par le géant de l'éolien Vestas sur une technologie différente, le projet Zebra (Zero wastE Blade ReseArch) vient d'annoncer la sortie du premier prototype à l'échelle 1 de la plus grande pale d'éolienne au monde, 100 % recyclable.

« C'est une étape importante dans la transition de l'industrie vers une économie circulaire », indique l'institut de Recherche Technologique (IRT) Jules Verne. Cette entité pilote et coordonne le consortium associant cinq industriels : le chimiste français Arkema, l'américain Owens Corning, spécialiste des nouveaux matériaux, le fabricant de pales espagnol LM Wind Power, l'énergéticien et opérateur de champs éolien Engie, le spécialiste de l'eau et des déchets Suez et deux centres techniques (CANOE et IRT Jules Vernes).

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« On a, cette fois, réuni, l'ensemble de la chaine de valeur, des matériaux, à la fabrication, la valorisation et la gestion des déchets. Ce qui va nous permettre de démontrer la pertinence technique, économique et environnementale de pales en thermoplastique réalisées à l'échelle 1, dont la conception facilite le recyclage», mentionne Céline Largeau, cheffe du projet Zebra, lancé en septembre 2020.

Les données chiffrées seront connues à l'issue du projet. Financé dans le cadre du PIA (Programme d'Investissements d'Avenir), Zebra bénéficie d'un budget de 18,5 millions d'euros. C'est le plus gros programme piloté par l'IRT Jules Vernes, qui depuis sa création il y a une dizaine d'années, à Nantes, a engrangé quelques 450 partenariats de recherche, autour des technologies de fabrication pour l'aéronautique, la navale, l'énergie ou l'automobile...

Des qualités équivalentes au thermoplastique...

Le développement d'un an a engendré des tests de performance et de fatigue des matériaux, d'essais de procédés, d'optimisation de la robotique, d'amélioration des techniques d'infusions, de développement du monitoring à l'aide de capteurs pour surveiller le procédé et la structure, de recherche de produits recyclables et d'intégration des contraintes industrielles. Les verrous technologiques ont été levés, permettant à l'industriel espagnol LM Wind Power de construire, sur son site de Ponferrada, une pale de 62 mètres en thermoplastique, dont le diamètre et le poids demeurent des données trop concurrentielles pour être communiquées.

Adaptée à la fabrication de grandes pièces par infusion, la résine thermoplastique liquide, associée à des renforts en fibres de verre haute performance a permis d'obtenir des qualités équivalentes à celle du thermoplastique. Avec, toutefois, un atout non négligeable, elle serait entièrement recyclable.

« Avec ce projet, nous relevons deux défis industriels cruciaux. D'une part, nous progressons dans la réalisation de notre vision "zéro déchet" en recyclant les déchets de fabrication. D'autre part, nous portons la recyclabilité des pales à un autre niveau : la combinaison de matériaux en fibre de verre haute performance et de la résine thermoplastique pourra montrée sa capacité être utilisée dans d'autres industries, et en séparant mécaniquement la résine, elle pourra être réutilisée dans la production de nouvelles pales, » détaille John Korsgaard, directeur ingénierie, de LM Wind Power.

Une seconde pale plus longue

Selon l'IRT Jules Verne, « les composites à base de résine (Elium®) peuvent être recyclés en utilisant une méthode avancée de recyclage chimique qui permet de dépolymériser complètement la résine, de séparer la fibre de la résine et de récupérer une nouvelle résine vierge et de fibre de verre prêtes à être réutilisées. »

Testée sur toutes les pièces en composite, y compris les déchets générés par la production, cette méthode élaborée par le chimiste Arkema et le centre technique Canoe pourraient aussi permettre à Owens Corning de trouver des solutions de recyclage de la fibre de verre. Une fois refondues, celles-ci pourraient être réutilisées pour diverses applications, dans l'automobile par exemple, si elles sont raccord avec la législation et les normes environnementales, ce qui pourrait répondre à certaines pénuries d'approvisionnement ou, encore mieux, pour fabriquer de nouvelles pales.

« Faisabilité, résistance, recyclabilité, industrialisation, augmentation des cadences de fabrication, automatisation des process... nous sommes à mi-chemin, et c'est tout le travail que nous poursuivons jusqu'en 2024 pour démontrer la viabilité économique du projet », précise Céline Largeau pour qui la livraison d'une pale de soixante mètres a déjà permis de lever un certain nombre de verrous.

« Il s'agit maintenant de s'attaquer à la fin de vie et au recyclage pour démontrer, cette fois, l'équation environnementale », dit-elle.

D'ores et déjà, à l'aide des travaux réalisés et pour confirmer les résultats obtenus, les acteurs du projet Zebra doivent se lancer dans la construction d'une seconde pale, dont les dimensions, n'ont officiellement pas été arrêtées. Sans doute pourrait-elle dépasser les cent mètres de long. Ce qui correspondrait aux critères exigés par l'éolien en mer où la présence de vents constants et plus puissants, et l'absence de contraintes territoriales, permet de déployer des pales plus longues offrant une rentabilité énergétique plus importante.

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