Pays de Loire : le département de la Mayenne réfléchit à imposer une journée « pull-over » pour économiser le chauffage

Face aux répercussions du coût de l’énergie, l’inquiétude grandit dans les collectivités et les entreprises des Pays de la Loire où de nombreux contrats d'énergie doivent être renouvelés d’ici à la fin de l’année. Les Vendéens viennent de la tirer la sonnette d’alarme tandis que les Mayennais concoctent un plan de réduction des consommations évoquant le chauffage à 18°, ou l'obligation d'une journée « Pullover » ou « Friday Wear ».Entreprises et collectivités craignent une hécatombe économique.
Magali Panau, présidente de l’entreprise Ernest Soulard, David Soulard, directeur général de l’entreprise Gautier, Arnaud Ringeard, Président de la CCI de Vendée, Laurent Favreau,  Alain Leboeuf, président du Conseil Départemental de la Vendée Président du SyDEV Anne-Marie Coulon, présidente de l’Association des Maires de Vendée ont poussé un cri d’alarme au nom de la sauvegarde économiques des entreprises et les collectivités dont les factures d’énergie ont été multipliées par à 3 à 10.
Magali Panau, présidente de l’entreprise Ernest Soulard, David Soulard, directeur général de l’entreprise Gautier, Arnaud Ringeard, Président de la CCI de Vendée, Laurent Favreau, Alain Leboeuf, président du Conseil Départemental de la Vendée Président du SyDEV Anne-Marie Coulon, présidente de l’Association des Maires de Vendée ont poussé un cri d’alarme au nom de la sauvegarde économiques des entreprises et les collectivités dont les factures d’énergie ont été multipliées par à 3 à 10. (Crédits : Frédéric Thual)

A quelques jours du redémarrage de son outil de production après plusieurs mois d'arrêt en raison de la grippe aviaire, et à quelques semaines du renouvellement de son contrat d'énergie, Magali Panau, Présidente de la société Ernest Soulard, spécialiste du canard et du foie gras (250 personnes) ne cache pas son désarroi. « C'est simple, au regard des cours actuels, notre facture d'énergie passerait de 2,5 millions d'euros à 11 millions d'euros. Ce qui engendrerait une augmentation de nos coûts de revient de 15%. Impossible à répercuter... Sans un bouclier tarifaire, nous serons contraints à des arbitrages douloureux, voire des fermetures... Tout le secteur de l'agroalimentaire est à la même enseigne. Faire 10% d'économies, ce n'est plus la question depuis longtemps, c'était déjà dans nos réflexions comme un des enjeux de la filière. Hier, certains ne dormaient plus parce qu'ils avaient signé des contrats à 1.000 euros le Mwh, aujourd'hui, ils ne dorment plus parce que Mwh est tombé à 600 euros et qu'ils ont perdu 400 euros. C'est fou et nous sommes perdus, sans savoir si c'est la conséquence de politique ou de la spéculation», témoigne la cheffe d'entreprise venue aux côtés de David Soulard, directeur général des meubles Gautier (750 personnes) confronté aux mêmes problématiques et qui craint, en final, une remise en cause du « Made in France ».

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Avec eux, la présidente de l'association des maires de Vendée, le président de la Chambre de Commerce et d'Industrie, le président du syndicat de l'énergie vendéen (Sydev) et du président du Conseil départemental, Alain Leboeuf, poussent un cri d'alarme en faveur d'un département, « à l'économie remarquée au niveau national » - pour son faible taux de chômage et des démarches pionnières pour le développement des énergies renouvelables- , aujourd'hui au bord de l'asphyxie. « C'est le cri du cœur. Nous allons être dans de grandes difficultés. On nous incite à faire des économies d'énergie, or nous n'en sommes plus là. Nous sommes face à un problème de maîtrise des coûts de l'énergie dont les tarifs explosent. Si nous ne sommes pas inquiets pour les ménages, en revanche, ils auront de grosses répercussions pour les acteurs privés et publics», souligne Alain Leboeuf.

Remettre les clés de la commune au préfet

Pour le Sydev, plus gros syndicat d'énergie de France qui, depuis dix ans, coordonne l'achat d'électricité et de gaz pour les collectivités, le montant des achats pourrait passer de 40 à 150 millions d'euros en 2023. La facture pourrait passer de 500.000 euros à 2 millions d'euros pour un complexe aquatique, de 50.000 à 200.000 euros pour un Ehpad et de 6 à 24 millions d'euros pour l'éclairage public du département. Déjà, le Sydev dit avoir déboursé 15 millions d'euros pour aider les collectivités à réduire leur facture énergétique. 60% d'électricité auraient été gagnés. « La Vendée n'a pas attendu pour investir dans des plans d'économie, comme la réduction des amplitudes horaires de l'éclairage public », rappelle Laurent Favreau, président du Sydev, qui après avoir acheté 25% d'électricité à 293 € le Mwh, dit ne plus se sentir légitime pour appuyer sur le bouton au nom des maires pour les 50% restant. Lui-même, maire de la commune de Venansault (85) s'estime incapable de boucler le budget de la commune pour 2023. De fait, la facture énergie a déjà flambé de 80.000 à 140.000 euros. « A 1.000 euros /Mwh cela représente 554.000 euros et même à 600 euros, c'est 350.000 euros. Franchement, je me sens prêt à remettre les clés de la commune à Monsieur le Préfet »,dit-il.

Un bouclier tarifaire et l'ouverture aux énergies renouvelables

A la tête de l'association des 257 maires de Vendée, Anne-Marie Coulon rapporte les mêmes sentiments d'impuissance.  « Nous allons être confrontés à des budgets non estimés. Aucune commune ou collectivité ne pourra supporter de tels impacts, qui se répercuteront sur l'investissement, sur le coût de l'alimentation dans les écoles, etc. Sauf à supprimer des services pour la population, nous ne pouvons pas imaginer arrêter les investissements. D'autant que la commande publique représente 8% du PIB et des ressources importantes pour les entreprises locales Or, ce que ce nous dépenserons en fonctionnement ne pourra être affecté ailleurs. Ça va être catastrophique. C'est la destruction des entreprises et des emplois en raison d'une construction de prix inadaptée. Tous réclament la mise en œuvre d'un bouclier tarifaire et le maintien des tarifs régulés jusqu'en 2023 au lieu du 31 décembre 2022. L'autre bataille des vendéens, pionnier des énergies renouvelables avec 17% de production en locale -qui atteindra 40% avec la mise en service des sites de l'île d'Yeu et Noirmoutier-, c'est l'évolution des codes du marché public, la simplification tarifaire et le développement de l'autoconsommation. Autrement dit, le Sydev voudrait être en mesure de pouvoir vendre de « gré à gré » à des entreprises ou collectivités vendéennes, de l'électricité produite en Vendée. « C'est un sujet sur lequel nous travaillons. Nous avons trois parcs d'éoliennes de plus de quinze ans, et donc libérés de leurs obligations légales et commerciales. Mais cela nécessite encore de faire évoluer le code des marchés publics et de l'Energie, et de finaliser un montage juridico-administratif spécifique », indique Olivier Loiseau, directeur de la Sem Vendée Energie, spécialisée dans le développement des énergies renouvelables. Aussi séduisante soit-elle, l'idée est actuellement difficilement duplicable ailleurs qu'en Vendée.

Le rétrofit des cars régionaux en question

Plus largement, la question des plans de sobriété et de l'accélération des économies d'énergies est, dans la région, dans toutes les têtes, même si certains préfèrent garder le silence et semblent avancer à tâtons. Le Conseil régional des Pays de la Loire préparerait un plan de sobriété de l'énergie touchant les lycées, les transports et l'aide aux entreprises. Il devrait être proposé à l'assemblée le 20 octobre prochain. D'ici là, la collectivité dit balayer l'ensemble des politiques publiques pour évaluer les mesures à mettre en œuvre ; baisse du chauffage à 19°, « debitumages » des cours de lycées pour en faire des espaces verts, une expérimentation est en cours dans trois établissements..., poursuite de la construction d'établissements économes en énergie. Évaluée avant l'été, la hausse des factures énergétiques pour les 115 lycées était estimée à 60%. Deux millions leur ont d'ores et déjà été allouées pour les aider, mais l'explosion des coûts devrait s'élever à 15 millions d'euros, même si les efforts engagés dans la rénovation des établissements ont permis de gagner 2 à 3 millions d'euros. La région dit réfléchir à la mise en œuvre d'un plan de rétrofit qui consisterait à changer la motorisation des cars scolaires pour les passer au gaz. Un état des lieux serait également en cours avec l'Etat et la Chambre de Commerce et d'Industrie pour mesurer l'étendue des risques d'arrêts de chaine de productions ou de fermeture d'entreprises.

Dans un communiqué, la métropole nantaise indique, elle, qu'elle annoncera dans les prochains jours des mesures d'urgence pour accélérer « la résilience du territoire autour de l'eau, de l'énergie et de la lutte contre les îlots de chaleur» pour faire face au changement climatique. Saint-Nazaire comme le département de Loire-Atlantique estiment qu'il est trop tôt pour prendre la parole sur ce sujet Plus prompt à réagir, le département de Mayenne, qui ambitionne d'être le premier département bas carbone de France, a dès cet été mis les mains dans le moteur.

53 mesures sur la table en Mayenne

« Dès le mois d'août, j'ai demandé aux équipes de sensibiliser leurs collaborateurs et de me faire remonter des propositions pour réduire les consommations d'énergie », explique Olivier Richefou, Président du Conseil départemental de Mayenne (53) qui vient de sélectionner et chiffrer 53 propositions parmi les 120 émises. Elles seront soumises aux syndicats et au vote des conseillers départementaux le 26 septembre prochain. Objectif : réduire de 10% les consommations d'énergie en deux ans, au lieu des 20% en 2030 demandé par le plan énergie-climat. Sur une facture habituelle d'un million d'euros, la collectivité devrait gagner 100.000 euros pour une collectivité dont le budget avoisine 250 millions d'euros. C'est peu ? « L'objectif n'est pas financier mais humain. Il s'agit avant tout de faire évoluer les comportements pour faire baisser les consommations », rappelle-t-il. Des consommations qui, dans les collèges, concernent le gaz pour 48%, l'électricité 38% , le fioul 5% et le bois-énergie et les réseaux de chaleur pour 13%.

Pour cela, le département a mandaté vingt-cinq collaborateurs motivés, choisis sur la base du volontariat, qui seront chargés d'être les messagers dans les services. Et a nommé une « Madame 10% » pour répondre aux interrogations et animer la démarche. Parmi les cinquante-trois mesures, il s'agirait d'abaisser le chauffage à 18° et non plus à 19°. Autres solutions, imposer une journée « Pull-over » ou « Friday Wear », le vendredi ou les jours de pointe de consommation, supprimer l'eau chaude dans les sanitaires, favoriser la recharge des appareils électroniques de 15 à 17 heures, la mise en place d'un logiciel d'autopartage des véhicules électriques, dont la flotte devrait être étoffée... « On veut marquer les esprits et faire évoluer les pratiques », souffle le président du conseil départemental, à Laval, où une bâche recouvrant la façade de l'édifice, rappelle, qu'« Ici, les travaux de rénovation énergétique permettront d'économiser 367.200 Kwh et 75 tonnes d'émissions de Co2 par an ». Pour y voir plus clair, le département envisage d'équiper de capteurs 80% des bâtiments exploités par la collectivité. « Ce n'est pas un investissement très élevé, mais cela permettra de sensibiliser et d'accélérer », estime Olivier Richefou. « Je veux embarquer et responsabiliser tout le monde », dit-il. Jusqu'à proposer de faire poser des sous-compteurs électriques sur divers lieux. A l'instar de la Préfecture voisine où historiquement la facture d'énergie était émise par le conseil départemental au prorata du nombre de mètres carrés utilisés, et non des consommations réelles. Ce qui désormais devrait changer.

Lire aussiSobriété énergétique : comment les collectivités d'Occitanie y participent (1/3)

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Commentaires 7
à écrit le 09/09/2022 à 19:07
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Pourquoi pas. Mais dans ce cas , je propose une journée du strings pendant les canicules.

à écrit le 08/09/2022 à 16:56
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A n'en pas douter il y aura bien une hécatombe économique car l'Etat ne pourra pas jouer les pompiers partout et pour tout le monde, donc 18°, baisse de production des entreprises, le pull-over, la chapka et le cache-nez n'y changeront rien sur le fo...

à écrit le 08/09/2022 à 14:02
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Il y a une vingtaine d'années, dans mon entreprise, le lundi matin, c'était non seulement pull over, mais aussi manteau, car chauffage stoppé le week end !

à écrit le 08/09/2022 à 13:49
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Un souvenir très lointain de l'Institut polytechnique de Grenoble : dans un des établissements, les amphis n'étaient chauffés qu'à partir de mi-novembre, ce qui n'empêchait pas d'ailleurs dans le même temps l'installation d'une sculpture très moche s...

à écrit le 08/09/2022 à 0:42
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Qu'en pensent les écolo-nudistes?

à écrit le 07/09/2022 à 18:20
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pitie!!!!!!!! les fachos de gauche vont faire une manif pour explique r que les riches peuvent chauffer, et pas les pauvres, donc y aura obligation chez les riches ( qui c'est?) de respecter la regele, et de payer un impot social de compensation pour...

le 08/09/2022 à 6:09
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Je fais l’inventaire des lieux qui resteront bien chauffés près de mon domicile pour y passer une bonne partie de mon temps

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