Total accusé de partager ses revenus du gaz avec les militaires birmans

L'entreprise Moattama Gas Transportation Company (MGTC) est propriétaire du gazoduc exploité par l'industriel français qui relie le champ gazier de Yadana. Or, celle-ci est domiciliée aux Bermudes, aux dépens de l'Etat birman. Elle aurait généré 523 millions de dollars de chiffre d'affaires en 2019, selon Le Monde.
(Crédits : Sarah Meyssonnier)

Un montage financier autour d'un gazoduc exploité par Total en Birmanie aurait permis de diriger depuis des années des centaines de millions de dollars des ventes de gaz directement vers les militaires de ce pays, au détriment de l'Etat birman, selon le journal Le Monde qui cite mardi plusieurs documents.

Total n'avait pas donné suite aux sollicitations de l'AFP mardi en milieu de journée.

L'entreprise en cause, Moattama Gas Transportation Company (MGTC), est propriétaire du gazoduc reliant le champ gazier de Yadana, au large des côtes birmanes, à la Thaïlande. Elle a été créée en 1994, lors de la mise en place du projet gazier, et est domiciliée aux Bermudes. Ses actionnaires sont les mêmes que ceux de l'entreprise exploitant le gisement, en particulier Total (31%) et la Myanmar Oil and Gas Enterprise (MOGE, 15%, contrôlée par l'armée birmane).

523 millions de dollars de chiffre d'affaires

Or, selon le quotidien, qui a consulté les comptes et audits de MGTC, cette entreprise facture "à un prix jugé exorbitant" le transport du gaz, généralement moins taxé que la production, ce qui permettrait de réduire le montant des royalties versées à l'Etat birman.

Ce montage permettrait à l'armée, via la MOGE, de toucher directement des dividendes sur l'activité de transport, qui affichait en 2019 un chiffre d'affaires de 523 millions de dollars pour seulement 11 millions de charges.

Le Monde, qui a interrogé plusieurs experts, évoque une forme d'"optimisation fiscale" pour les actionnaires de MGTC, aux dépens de l'Etat birman.

"Nous ne connaissons pas les raisons précises ayant conduit le choix de domicilier MGTC aux Bermudes il y a 30 ans", souligne-t-on chez Total auprès du Monde. Total y ajoute qu'aujourd'hui le groupe "ne domicilie plus aucune filiale nouvelle dans les paradis fiscaux".

Le groupe pétrolier est présent en Birmanie depuis 1992, et depuis le coup d'Etat militaire de février, les militants pro-démocratie le pressent de nouveau de "cesser de financer la junte".

Son PDG a indiqué en avril qu'il suspendait ses forages dans le pays mais qu'il continuait à exploiter le gisement de Yadana, en activité depuis 1998, pour approvisionner en énergie les populations birmanes et thaïlandaises. Il s'est aussi engagé à financer des ONG consacrées à la défense des droits humains à hauteur de ce qu'il verse à l'Etat birman.

Lire aussi : Total, pressé de partir par des ONG, maintient ses activités en Birmanie malgré la répression

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Commentaires 5
à écrit le 04/05/2021 à 20:09
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C'est particulièrement hypocrite tandis que le consortium de 400 journalistes venant du monde entier a démontré que la finance et la mafia utilisent les mêmes circuits financiers impossible de se fait à distinguer l'un de l'autre, je ne vois pas pour...

à écrit le 04/05/2021 à 19:30
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L'internationale socialiste n'apprécie le partage en Birmanie que dans les poches de son émissaire local Aung San Suu Kyi, prix Nobel de de la paix ayant chassé les musulmans indigènes au même titre que son homologue indien Narenda Modi. Ma foi...

à écrit le 04/05/2021 à 18:18
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Est-ce qu'une société implantée dans un pays donné est responsable des circuits financier dans ce pays ? La société paie son dû. Tout le reste ne le regarde pas. C'est au Birmans de régler leurs problèmes de gouvernance et de démocratie.Que peut Tota...

le 05/05/2021 à 14:03
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Total peut très bien consigner ses paiements à la Birmanie en l'attente de l'organisation d'un scrutin électoral...

le 05/05/2021 à 21:24
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@megadebt : Je crains que vous vivez dans un monde de bisounours. Vous voyez sérieusement ces brutaux généraux accepter un tel deal sans broncher. La Birmanie actuel n'est pas un état de droit. Et en plus dans ce type de contrat, cet échappatoire n'e...

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