
"Notre cap est clair, nous voulons sortir du diesel", affirme Christophe Fanichet, le PDG de SNCF Voyageurs. Le dirigeant pointe ainsi du doigt les 25% de TER qui fonctionnent encore en France avec cette énergie fossile. "Mais il faut développer des alternatives à l'électrification des lignes. Le coût s'élève à un million d'euros le kilomètre, c'est cher et cela prend beaucoup de temps", met en perspective le dirigeant.
Après trois années de développement, la SNCF et Alstom ont ainsi présenté, mercredi 16 février, le premier TER hybride. De la gamme Regiolis, ce TER - mis à disposition par le conseil régional d'Occitanie - était à la base une rame bi-mode et aura désormais trois sources d'énergie. Auparavant, le train assurait son fonctionnement par les caténaires électriques sur les lignes électrifiées, et les moteurs thermiques, alimentés par du diesel, prenaient le relais sur les portions non électrifiées. Dès à présent, ces deux sources d'alimentation classique seront accompagnées par une troisième, à savoir des batteries électriques au lithium-ion.
"Aujourd'hui, 230 rames bi-modes peuvent potentiellement connaître cette transformation (...) Le train représente actuellement 1% des émissions de gaz à effet de serre pour 10% des déplacements en France. Notre ambition est de tomber à 0% tout en doublant notre part dans le choix du mode de transport des Français. Avec cette solution, nous proposons de ne pas lancer une électrification coûteuse de toutes les lignes", expose le PDG de SNCF Voyageurs.
Moins de nuisances sonores
Pour l'heure, la SNCF ne souhaite pas communiquer sur le coût de cette transformation/expérimentation, en grande partie financée par quatre régions volontaires et partenaires sur le sujet (Occitanie, Nouvelle Aquitaine, Grand Est, Centre-Val de Loire). Mais dans des communications précédentes, le groupe français avait laissé filtrer le chiffre de 17 millions pour cette opération "rétrofit". Mais pour quels bénéfices sur le terrain ?
"Plus de 90% de l'énergie générée par le freinage est récupérée, ce qui permet une économie d'énergie de plus de 20% et des performances nettement améliorées concernant des nuisances sonores. Cette performance technologique est réalisée tout en conservant les performances et la puissance de la version précédente avec ses 1.000 kilomètres d'autonomie. Nos hypothèses, au départ du projet, sont plus que confirmées", se félicite le directeur général d'Alstom France, Jean-Baptiste Eyméoud.
Dans les faits, ce TER hybride fonctionnera de manière classique avec une alimentation par caténaire sur les lignes électrifiées et au diesel quand elles ne le sont pas. En revanche, les batteries lithium-ion seront rechargées à chaque freinage. Chargées, elles permettront d'assurer le bon fonctionnement du train quand il sera à l'arrêt en gare, évitant ainsi le rejet de polluants et diminuant les nuisances sonores. "Nous gagnons dix décibels", précise Carole Desnost, la directrice technologies, innovation, grands projets au sein de la SNCF. Au démarrage, et particulièrement dans les zones urbaines, ce sont encore ces batteries qui assureront le bon fonctionnement du train, avec une capacité d'autonomie maximale de 20 à 25 kilomètres selon la vitesse, toujours par souci sonore et environnemental.
Des commandes à venir
Pour officialiser ce bond technologique, ce premier TER hybride français va faire l'objet d'un processus de certification, "qui prendra toute l'année 2022", selon Christophe Fanichet. Auparavant, la rame aura fait l'objet de plus de 10.000 kilomètres en phase d'essai, notamment sur le site Alstom de Reichshoffen, qui va passer courant mai sous le contrôle de l'Espagnol CAF.
Une fois ce processus réglementaire passé, le train hybride devrait circuler sur le réseau des quatre régions partenaires à tour de rôle, dès le second trimestre 2023. Mais pour le moment, aucune commande ferme pour cette nouvelle technologie n'a été passée auprès d'Alstom et de la SNCF.
"Nous n'avons pas mis la main au pot pour laisser cette rame au garage !", assure Renaud Lagrave, le vice-président du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, chargé des Infrastructures, des Transports et de la Mobilité. La région du socialiste Alain Rousset pourrait ainsi passer commande prochainement pour la transformation de 20 de ses rames TER. "Les conseils régionaux ont participé au départ car il le fallait pour lancer le processus de développement de la technologie. Mais bien entendu, il y aura des commandes, nous ne nous sommes pas engagés pour ne pas suivre derrière", appuie Jean-Luc Gibelin, le vice-président de l'Occitanie en charge de la Mobilité pour tous et des Infrastructures de transports.
En plus de son TER hybride, la SNCF travaille également avec les conseils régionaux sur le développement d'un TER totalement alimenté par batteries, ainsi qu'un TER à hydrogène, attendu pour 2025.
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