Comment Eurostar échappe in extremis au dépôt de bilan

Frappée de plein fouet par la crise sanitaire (son trafic a fondu de 85%), la compagnie ferroviaire détenue à 55% par la SNCF n'a bénéficié d'aucune aide d'État qu'il s'agisse de la France ou du Royaume-Uni. Elle vient pourtant de réussir à trouver de l'argent frais pour éviter une faillite imminente.
Photo d'illustration: annulations de trains Eurostar en cascade le 21 décembre 2020 sur le panneau des départs à la gare londonienne de St-Pancras, alors que les pays de l'UE imposent une interdiction de voyager depuis le Royaume-Uni à la suite de l'épidémie de Covid-19.
Photo d'illustration: annulations de trains Eurostar en cascade le 21 décembre 2020 sur le panneau des départs à la gare londonienne de St-Pancras, alors que les pays de l'UE imposent une interdiction de voyager depuis le Royaume-Uni à la suite de l'épidémie de Covid-19. (Crédits : Reuters)

Très affaiblie par les sévères restrictions de liberté de circulation intra-européenne (la compagnie n'assure plus qu'un seul aller-retour Paris-Londres et un Paris-Bruxelles par jour en ce moment), Eurostar devait absolument trouver de l'argent frais avant fin mai-début juin pour éviter le dépôt de bilan.

Or, jusqu'ici perçue au Royaume-Uni comme une entreprise publique française (elle est filiale à 55% de la SNCF) et, inversement, en France, comme une compagnie britannique puisqu'elle est basée à Londres, le service ferroviaire à grande vitesse qui relie le Royaume-Uni à la France, la Belgique et les Pays-Bas n'avait pas réussi à bénéficier d'aides directes ou de prêts garantis par les États.

Le 15 janvier dernier, Christophe Fanichet, PDG de SNCF Voyageurs avait partagé son inquiétude à l'égard de la société franco-britannique:

"Je suis extrêmement préoccupé par Eurostar. Eurostar est dans une situation critique, je dirais même très critique. C'est une entreprise qui est plus touchée que l'aérien", a-t-il dit.

Lire aussi 3 mn"Eurostar est dans une situation très critique", s'inquiète la SNCF

Refinancement trouvé in extremis

Mais, in extremis, Eurostar annonce, ce mardi 18 mai, avoir conclu un accord de refinancement avec ses actionnaires et ses créanciers, une mesure qui pourrait lui permettre d'éviter la faillite.

"Cet accord de refinancement se monte à 250 millions de livres sterling (290,7 millions d'euros) sous forme essentiellement de capitaux propres et de nouveaux prêts bancaires", dit Eurostar dans son communiqué.

Ce refinancement de 250 millions de livres se décompose ainsi:

  • un apport de 50 millions de livres de capitaux propres par ses actionnaires,
  • un emprunt de 150 millions garanti par ces mêmes actionnaires et
  • 50 millions de facilités de crédit existantes restructurées.

Ces montants sont garantis par les actionnaires, SNCF, Patina Rail LLP et des fonds gérés par l'équipe Infrastructure de Federated Hermes et SNCB, l'entreprise ferroviaire publique belge, précise le communiqué.

Pour rappel, outre les 55% de la SNCF, Eurostar est détenu à 40% par le consortium Patina Rail (composé pour 30% de la Caisse de dépôt et placement du Québec et 10% du fonds britannique Hermes Infrastructure) et à 5% par la SNCB belge.

Ces actionnaires lui ont déjà apporté 210 millions d'euros.

Sécuriser l'avenir, réduire les coûts, redémarrer l'activité

L'accord trouvé "permet de sécuriser l'avenir d'Eurostar dans un contexte de levée des restrictions de déplacement et de reprise progressive de l'activité", a indiqué la compagnie dans un communiqué.

"Les mesures de soutien décidées ce jour lui permettront de faire face (aux) obligations financières à court et moyen termes".

En parallèle, Eurostar, qui avait auparavant emprunté 400 millions de livres (450 millions d'euros), déjà consommés, a travaillé à réduire drastiquement ses coûts, notamment en mettant ses effectifs au chômage partiel.

La compagnie doit remonter son offre à deux allers-retours quotidiens sur la ligne Londres-Paris, puis avec un troisième service à partir de fin juin. Elle "augmentera la fréquence progressivement au cours de l'été, au fur et à mesure de l'assouplissement escompté des restrictions de voyage", selon le communiqué.

Inconnue sur l'avenir de la fusion avec Thalys

Reste à voir maintenant comment ce sauvetage permettra de relancer ou pas  la fusion avec Thalys. Le projet devait être effectif en 2021.

Lire aussi 4 mnThalys : le projet de fusion avec Eurostar est confirmé pour 2021

(avec AFP et Reuters)

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Commentaires 3
à écrit le 18/05/2021 à 21:44
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David Cameron a vendu la participation du Royaume-Uni dans Eurostar pour 830 millions d'Euros en 2015. Donc, même si le siége d'Eurostar situe à Londres, il n'y pas vraiment de raisons pour lesquelles le Royaume-Uni devrait remettre de l'argent dans...

à écrit le 18/05/2021 à 17:03
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Honte sur nos gouvernants qui ont massivement subventionné le secteur aérien, qui l'ont arrosé de dizaine de milliards tandis que ne donnant rien pour ce train. Par contre l'avantage est que cela prouvre formellement que leurs discours écologiques ne...

le 19/05/2021 à 13:44
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Je partage votre constat "citoyen blasé". Tandis que l'aérien carbure à 100% au pétrole (kérosène) et ce de façon quasi provocatrice en ces temps de prise de conscience climatique avec ZERO TAXE sur le combustible fossile , le train à grande vitesse ...

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