Le malheur des uns fait le bonheur des autres... Bien connu, ce proverbe pourrait s'appliquer, en ce moment, à la SNCF. La compagnie ferroviaire a vendu plus de 4 millions de billets pour les vacances de la Toussaint. Soit 10 % de plus qu'à la même période de 2019 ou même 2021. Les ventes se sont notamment envolées ces derniers jours. Inquiets de ne pas pouvoir trouver de carburant, à cause du conflit social dans les raffineries, les Français se sont rabattus sur les lignes ferroviaires. La SNCF est d'autant plus satisfaite de cet afflux de voyageurs, qu'elle ne note pas d'annulations significatives alors même que la situation s'améliore dans les stations-service. Les ménages continuent de préférer le train.
Une dynamique favorable grâce aux tensions sur les carburants
Surtout, ce pic des réservations n'est pas nouveau. Cet été déjà, la compagnie avait fait le plein de voyageurs. Près de 15 millions de billets avaient été écoulés en juillet et août. Alors que les prix des carburants étaient très élevés, les ménages, s'étaient là encore, tournés vers les trains pour tenter de réduire la facture.
Et les tarifs de l'essence et du diesel n'étant pas amenés à baisser, la compagnie table enfin sur une fréquentation élevée les mois prochains, notamment pour les vacances de Noël. Preuve en est, le jour d'ouverture des réservations, le 5 octobre dernier, le site SNCF ainsi que l'application ont battu des records d'affluence. A tel point que la plateforme a connu des difficultés techniques.
L'enjeu : répondre à ces hausses de fréquentation
Reste maintenant à la SNCF d'être en mesure de répondre à cette fréquentation accrue. Faute de personnel, - en raison notamment d'une pénurie de conducteurs- , dans les Hauts de France, la compagnie a, par exemple, été contrainte de supprimer 136 trains quotidiens pendant la Toussaint. La SNCF peine à recruter.
Aussi, le groupe cherche-t-il à alléger ses procédures. Cette année, la SNCF Réseau a mené dans toute la France, des opérations « un job en 24 heures », destinées à attirer et évaluer des candidats rapidement, sur une journée.
Il faut dire que ses besoins en main d'œuvre sont conséquents : en 2022, SNCF Réseau - qui emploie déjà 53.000 collaborateurs - prévoit de recruter 2.500 personnes. Le groupe n'embauche plus sous statut cheminot depuis 2020, il lui faut donc trouver d'autres arguments pour attirer les recrues. Le salaire ? A la SNCF, il a été revalorisé de 5,8 % cette année, soit quasiment le niveau de l'inflation.
Éviter les grèves
Mais, pour éviter toute grogne sociale à venir, la direction des ressources humaines du groupe vient de proposer aux organisations syndicales d'avancer de quelques semaines, l'ouverture des négociations salariales obligatoires ... dès que les élections professionnelles, qui se tiendront entre le 17 et le 24 novembre, seront terminées.
Ce scrutin interne risque en effet d'inciter les centrales à faire monter les enchères. Et, l'entreprise veut prévenir, tant que possible, de futurs mouvements de grèves. Le 18 octobre, la CGT - 1ere organisation à la SNCF avec 34 % des suffrages -, et Sud Rail ont rejoint le mouvement national d'action.
Pour l'heure, à la SNCF, aucune grève n'est prévue, mais il y a fort à parier que ces organisations suivront les prochaines journées d'action nationales de leur direction nationale, du 27 octobre, mais aussi du 10 novembre.
Faire face aux surcoûts des prix de l'énergie
Enfin, la direction du groupe se réjouit de cette affluence record dans ses trains, qui lui permet d'engranger des recettes à un moment où elle doit faire face à une flambée des coûts.
La SNCF est la première entreprise consommatrice d'électricité en France. Et en 2023, pour ce poste de dépenses, il lui faudra rajouter presque 2 milliards d'euros à sa facture habituelle. Dans ce contexte, Jean-Pierre Farandou, le PDG, a d'ores et déjà prévu qu'une partie de la note sera transférée à la clientèle. Une hausse du prix des billets de train est donc à prévoir en 2023. Le niveau n'a pas été précisé, mais il pourrait s'élever jusqu'à 10% de plus. A moyen terme, la SNCF mise sur les énergies renouvelables, tant pour améliorer son empreinte carbone que pour réduire ses frais.
Parallèlement, le groupe cherche toujours à se désendetter, conformément à l'engagement pris vis-à-vis de l'Etat actionnaire dans le cadre de la réforme ferroviaire de 2018. La reprise de 35 milliards d'euros de dette devait s'accompagner d'un redressement de la trajectoire financière, avec en cible un cash flow positif. « En dépit d'une situation économique et géopolitique dégradée, l'objectif est en passe d'être atteint dès 2022 », précise l'entreprise.
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