« Il y a un risque réel de surchauffe »

Philippe d'Arvisenet est directeur des études économi- ques à la BNP. Il prévoit de nouvelles hausses des taux britanniques pour tenter de maîtriser les tensions inflationnistes, alors que la montée de la livre pénalise déjà les industries traditionnelles. « La Tribune ». - La hausse de 0,25 % du taux directeur de la Banque d'Angleterre, annoncée hier, sera-t-elle suffisante pour résorber les tensions inflationnistes ? Philippe d'Arvisenet. - Il y aura assez rapidement 50 à 75 points de base de plus, en deux ou trois fois. On a beaucoup commenté le dernier indice des prix de détail, passé de 2,5 à 2,7 % en rythme annuel, mais si l'on regarde le dernier trimestre dans son ensemble, l'inflation britannique affiche en réalité un taux annualisé de 4,7 %. Il y a donc un risque réel de surchauffe. D'autant que dans le budget présenté le 2 juillet, les ménages n'auront à fournir qu'une partie modeste des efforts demandés - 1 milliard de livres sur un total de 5,5 milliards. Alors que les entreprises ont été pénalisées par la montée de la livre ? - Les exportateurs souffrent beaucoup. Le taux de change effectif de la livre s'est apprécié de 23 % en un an. Et elle va continuer à monter. Or la contribution extérieure au PIB était de + 1 % en 1995, de - 0,5 % en 1996, et sans doute de - 0,7 % cette année. Car le rythme des exportations a plafonné cependant que les importations continuaient à augmenter très fortement : + 4 % il y a deux ans, plus du double aujourd'hui. Justement, quel est l'impact de la « démutualisation », c'est-à-dire de la restitution à leurs membres par les mutuelles de crédit immobilier qui se transforment en banques de la valeur de leurs titres de propriété ? - Les évaluations ne cessent d'augmenter. On parlait au début de 22 milliards de livres, mais on évoque dernièrement le chiffre de 37 milliards, soit 370 milliards de francs. Cela représente une augmentation de 6,5 % du revenu disponible des ménages, ce qui est considérable. Toute la question est de savoir quelle proportion de ce revenu supplémentaire sera dépensée. Même s'il ne s'agit que de 15 %, cela représente tout de même 1 % de revenu disponible supplémentaire. Or, on s'attend déjà à une croissance en volume de la consommation de 4,5 % cette année. La décrue spectaculaire du chômage va-t-elle se poursuivre ? Des tensions sont-elles déjà perceptibles sur le marché du travail ? - Il n'est qu'à voir l'évolution des salaires. On était encore sur un trend de + 2,5 % par an il y a dix-huit mois, on est à 5 % à l'heure actuelle. Surtout, la baisse du chômage est en train de changer de nature. On a souligné à juste titre qu'elle a dans un premier temps beaucoup reposé sur le développement du temps partiel ou sur le retrait volontaire du marché du travail. Mais les choses ont changé depuis un an, les offres d'emplois ne cessent d'augmenter. Il devient par exemple très difficile de trouver du personnel qualifié dans les services. Les chefs d'entreprise ne commencent-ils pas à s'inquiéter ? - Le patronat britannique de continuer d'afficher son optimisme dans les études sur les carnets de commandes et les prévisions de production. Tout ce que l'on peut dire, c'est que cet optimisme ne se retrouve pas dans l'évolution de la production manufacturière et des exportations. Dans les biens d'équipement, la chimie ou la sidérurgie par exemple, la production a déjà baissé à cause du recul des exportations. Propos recueillis par T. A.
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