Outre-Manche, les emprunteurs à taux variables se frottent les mains

Jean peut avoir le sourire. Grâce à la crise, ce Français de Londres a fait une excellente opération financière. En 2007, il a contracté un prêt immobilier à taux d'intérêt variable sur 15 ans. Un taux fixé à 0,6 % au-dessus du taux d'intérêt de la banque centrale. Bingo ! De 5,75 %, la Banque d'Angleterre a réduit son taux à 0,5 %, son plus bas niveau en trois siècles d'histoire. Le remboursement mensuel de Jean est soudain passé de 980 à 620 livres (1.090 à 690 euros).« J'avais beaucoup hésité à prendre un emprunt à taux variable, craignant de trop m'exposer, explique ce traducteur franco-anglais. Mais ça a été une très bonne surprise. Aujourd'hui, je ne paye pratiquement plus d'intérêts et l'essentiel de mon paiement rembourse le capital emprunté. »Quelque quatre millions de personnes en Grande-Bretagne sont aujourd'hui dans le même cas que Jean. Les prêts à taux fixe n'appartenaient pas à la culture bancaire britannique jusqu'à il y a peu, et sont souvent nettement plus chers. Depuis la baisse des taux directeurs, ceux qui ne paient chaque mois que les intérêts de leur emprunt réalisent des opérations étonnantes, ne déboursant parfois que quelques livres sterling. Bien sûr, les banques ne se sont pas laissé faire. Certaines avaient prévu dans les contrats un niveau minimum en dessous duquel le taux ne pouvait pas descendre. Nationwide, l'un des principaux prêteurs britanniques, a ainsi tout bloqué à 2,75 %. Sous la pression de ses clients ? et du gouvernement ? il a cependant accepté de laisser diminuer le coût des emprunts jusqu'à 2 %, mais refuse d'aller au-delà.Paradoxe, les bonnes affaires réalisées par ces millions de Britanniques ne semblent pas se répercuter sur l'activité économique. Face à l'ampleur de la crise, ces chanceux ont pour l'instant choisi d'augmenter leur épargne plutôt que de dépenser. Le taux d'épargne, au quatrième trimestre 2008, a d'ailleurs fait un bond en Grande-Bretagne, passant de 1,7 % à 4,8 %.Le cas de Jason Costello l'illustre clairement. Cet employé de Honda craint pour son emploi, l'usine du constructeur automobile japonais étant actuellement fermée pour quatre mois, le temps d'écouler ses stocks. « Mon remboursement mensuel baisse, mais je suis très inquiet, témoigne-t-il. Si je perds mon travail, je ne pourrai plus rembourser et j'ai peur de voir ma propriété saisie. »retournement Les économistes estiment toutefois que l'impact de la baisse des taux finira bien par se faire sentir. « L'impact de cette forte détente monétaire sur la consommation ne doit pas être sous-estim頻, relève ainsi Ben Read, économiste au Center for Economic and Business Research (CEBR). À tel point que certains spécialistes commencent à prévoir un début de retournement de tendance. Le CEBR estime que le marché immobilier pourrait repartir dans les mois qui viennent. Quant à Jean, qui travaille parfois en France, il a doublement gagné. Grâce à la chute de la livre sterling, il touche 30 % de plus qu'avant la crise quand il est payé en euros.Éric Albert, à Londre
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