Un choc plus difficile à amortir

Les crises se suivent mais ne se ressemblent pas forcément. Du moins dans leur traitement comptable. Car depuis l'éclatement des bulles immobilières en 1992 et Internet en 2000, la règlementation a changé. « La comparaison entre la situation actuelle et l'éclatement des précédentes bulles est rendue d'autant plus difficile que les IFRS n'existaient pas. À l'époque de l'euphorie Internet, les référentiels comptables étaient différents en Europe et aux États-Unis. Sur les opérations en titre par exemple le « pooling of interest » (mise en commun d'intérêts) conduisait à ne pas reconnaître les écarts d'acquisition. De façon générale les « goodwill » faisaient l'objet d'amortissement et n'étaient donc pas dépréciés comme aujourd'hui », estime Françoise Gintrac, associée du cabinet PricewaterhouseCoopers. Si l'on voulait juger de l'ampleur de la crise actuelle par le montant des actifs dépréciés, il serait donc difficile de trouver des comparables. évaluation irréversible« À l'époque de la bulle Internet, poursuit Françoise Gintrac, les acquéreurs n'étaient pas forcément de grands groupes, mais beaucoup étaient des fonds de private equity ou des business angels n'étant pas du tout soumis aux mêmes exigences de communication que des sociétés cotées.» Et d'ajouter : « Ainsi il est très délicat de déterminer ce qui a été véritablement déprécié à l'époque. » Le rapprochement est d'autant plus difficile que la crise actuelle ne ressemble pas totalement aux précédentes. Ce qui complique le jeu des prévisions à moyen terme qui servent pourtant de base au calcul des dépréciations. « Il faut redoubler de mesure dans l'estimation et l'ampleur de la dépréciation. Il ne faut pas être trop volontariste pour coller au mieux à la réalité économique mais sans faire d'excès de prudence car la dépréciation est irréversible et le goodwill ne peut pas être réévalu頻, indique Françoise Gintrac. On l'aura compris, les nouvelles normes comptables rendront le choc plus difficile à absorber que lors des précédents retournements de marché. Jean-Louis Mullenbach, associé chez Bullot, Mullenbach et Associés, juge d'ailleurs que « combinée aux règles prudentielles, l'actuelle réglementation est trop procyclique » pour les banques et les assurances. Selon lui, on aurait très bien pu imaginer un système permettant de continuer d'amortir les écarts d'acquisitions. Ce qui, d'après lui, « ne dispenserait pas de réajuster le tir en constatant, le cas échant, des dépréciations sur la valeur résiduelle ».Françoise Gintrac pense, néanmoins, que « dans une grande partie des cas, on devrait retenir la valeur d'usage comme référénce dans le cadre de la réalisation des impairment tests sur les goodwill au titre de 2008 ». La spécialiste souligne que « cette valeur d'usage prend en compte les synergies susceptibles d'être plus importantes pour le détenteur que pour d'autres acquéreurs possibles, et pourrait jouer le rôle d'amortisseur ».
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