Colère de Christian Lacroix contre ses actionnaires

Luxe Divorce de sang entre Christian Lacroix et ses actionnaires, les frères Jérôme et Léon Falic. La maison Lacroix a indiqué hier avoir déposé auprès du tribunal de commerce de Paris une déclaration de cessation des paiements. Le tribunal devrait statuer la semaine prochaine sur le redressement judiciaire. « Nous proposons un plan de continuation de l'exploitation de la société pour sauver ses actifs et ses 125 employés », a déclaré à « La Tribune» le président de la maison, Nicolas Topiol. L'option finale ? Soit une cession, soit une continuation avec les mêmes actionnaires, qui se ferait au prix de restructurations. Selon Nicolas Topiol, la situation de l'entreprise, soit 10 millions d'euros de pertes pour 30 millions de chiffre d'affaires et une chute de 35 % des ventes de la dernière collection, résulte essentiellement de la crise actuelle. « Les frères Falic ont investi des dizaines de millions d'euros dans la société pour la repositionner sur le haut de gamme et céder des licences en accord avec Christian Lacroix, malheureusement sans succès dans le contexte actuel », a-t-il précisé.erreurs de positionnementMais le designer, lui, a une autre vision des choses. Dans une lettre interne à ses collaborateurs, que « La Tribune » s'est procurée, Christian Lacroix se plaint d'être laissé en dehors des décisions. « Dès 2004, lorsque Bernard Arnault et LVMH ont souhaité céder la maison aux frères Falic, j'ai été mis devant le fait accompli », écrit-il. Avant de qualifier leur gestion d'« opaque, puis perturbante? et finalement catastrophique ». Le designer se plaint notamment de ne pas avoir été payé depuis des mois. « Je n'ai pas honte de dire que l'on me doit 1,2 million d'euros et que je dessine les collections gratuitement depuis plusieurs saisons. » Ce à quoi M. Topiol répond que la maison, étant en cessation de paiements, ne peut pas payer un prestataire plus qu'un autre.Au-delà de ces querelles à chaud, l'échec de la maison Lacroix, qui n'a jamais gagné d'argent en vingt-deux ans d'existence, serait dû à des erreurs de positionnement historiques. Déjà sous Bernard Arnault, la maison s'était orientée vers un luxe de masse avec ouverture de boutiques et déclinaison de la griffe en accessoires et parfums, alors que Christian Lacroix excelle dans la très haute couture. « Il aurait fallu créer un marketing de niche ciblé sur une bien plus petite clientèle », commente un proche de la maison. L'arrivée en 2005 des frères Falic, propriétaires de DFA, une des principales chaînes de duty free américaine, a encore accentué l'écart de culture avec le designer. « C'est un peu le mariage de la carpe et du lapin », commente un fournisseur. Les partenaires, détenteurs de la licence, n'ont en tout cas pas fait une bonne affaire. La société SIL, qui distribuait les sous-vêtements de la griffe mais aussi d'autres marques comme Kenzo ou Galliano, a été mise en liquidation judiciaire le 29 décembre dernier. Inter Parfums, qui gérait les parfums, a, lui, signé un accord avec Avon pour écouler les stocks sur le marché américain. « Notre contrat s'arrête fin 2010 mais, vu la situation, nous allons essayer d'y mettre fin plus tôt », confie son président Philippe Benacin. Christian Lacroix, quant à lui, affirme à ses équipes qu'il fera tout pour que l'entreprise reste « une maison de couture à 200 % ». Visiblement pas prêt à transiger sur la qualité de ses collections.
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