Variations sarkoziennes

Ils sont à la politique ce que Laurel et Hardy sont au cinéma comique et Dupont et Dupond à la bande dessinée : inséparables et dissemblables à la fois, d'accord sur (presque) rien et en opposition sur (presque) tout, mais toujours soucieux de cantonner l'autre dans le rôle de faire-valoir. Lorsque l'un se montre, l'autre n'est pas bien loin. Lorsque l'un s'exprime, on peut tenir pour certain que l'autre l'a fait avant lui ou s'apprête à le faire. Et, de toute évidence, l'ambition virtuelle de l'un répond à celle bien réelle de l'autre. En tout cas, la rivalité entre Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy - puisque, bien sûr, il s'agit d'eux - nous promet du spectacle et de l'animation tout au long de 2006 que le ministre de l'Intérieur-président de l'UMP appelle, non sans malice, "une année de préparation de l'avenir". Chacun étant libre d'imaginer de quel "avenir" il est question. Répondant, à quelques jours d'intervalle, aux voeux du Premier-ministre-au-service-de-la-France-à-plein-temps, le numéro deux du gouvernement a exécuté hier, avec le brio qu'on lui connaît, sa symphonie de la rupture. Institutions, Europe, insécurité, immigration, mais aussi violence dans les stades et à l'école, nouvelles technologies, Nicolas Sarkozy n'a pas manqué une fois encore de faire la démonstration qu'on peut être ministre à plein temps et avoir des idées sur les sujets les plus divers. Et de préférence les plus porteurs dans l'opinion. Une bonne occasion aussi de faire entendre sa différence sur les options économiques les plus récentes sorties de Matignon. En appelant, comme à son habitude, un chat un chat. Là où Dominique de Villepin évoque pudiquement un coup de frein aux dépenses de l'État, Nicolas Sarkozy met les pieds dans le plat et suggère une réduction du nombre des fonctionnaires et une revue des programmes budgétaires - y compris militaires ? - pour désendetter la France. Le chef du gouvernement lève-t-il le pied sur les baisses d'impôts, son ministre et rival est d'avis de n'en rien faire, jugeant l'arme fiscale indispensable pour dynamiser la croissance et le pouvoir d'achat des Français. En somme, deux visions du changement, deux voies d'évolution pour le modèle français - rénovation ou refondation - et tout ça dans un même gouvernement ! Quelle richesse !
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