Le tribunal de commerce examine sur le fond la vente d'Artémis

Le contentieux entre François Pinault et le Consortrium de réalisation (CDR) à propos des 24,5 % d'Artémis que la structure de cantonnement du Crédit Lyonnais projetait de céder à l'Etablissement public de financement et de restructuration (EPFR) entre à présent dans le fond du dossier. Après avoir obtenu le 23 juin du président du tribunal de commerce de Paris la mise sous séquestre des titres en question ainsi que de 1 milliard et demi d'obligations Financière Pinault, les avocats de l'homme d'affaires s'apprêtent à déposer ce matin même auprès du même président de tribunal, une « assignation à bref délai » contre le CDR. L'objectif de cette action revient, en évoquant le caractère d'urgence de l'affaire, à obtenir de Jean-Pierre Mattei qu'il autorise le recours à une procédure accélérée de jugement et qu'il fixe dès maintenant une date de plaidoirie. En cas d'accord, le jugement sur le fond du litige pourrait ainsi être rendu dès cet automne. Sévère moins-value. Dans les faits, François Pinault veut faire valider l'exercice de son option d'achat des titres Artémis le 19 juin dernier et, partant, l'accord conclu en novembre 1996 avec le CDR. Selon cet accord, en cas d'absence de repreneur trouvé avant le 29 mai 1997 par Goldman Sachs, l'homme d'affaires pouvait récupérer les titres et les obligations pour un prix convenu de l'ordre de 2 milliards de francs (1,5 milliard et une clause de participation aux cessions à venir). Le 28 mai, le CDR fait savoir qu'il a trouvé à temps un acquéreur, en l'occurrence l'EPFR - et, en fait, derrière lui l'Etat - proposant de lui racheter les titres pour 3,7 milliards de francs et lui évitant par la même occasion une sévère moins-value. Selon sa lecture de l'accord de novembre 1996, François Pinault disposait d'un mois pour faire jouer son droit de préemption à ce prix de 3,7 milliards, délai qui expirait donc vendredi dernier. De son coté, l'EPFR a lui-même engagé une action contre le CDR et François Pinault, mais cette fois devant le tribunal de grande instance, en vue de faire reconnaître la validité de son offre. Pour obtenir gain de cause, les avocats de François Pinault devraient reprendre les arguments déjà développés dans le cadre de l'assignation en référé : l'offre de l'homme d'affaires est valable dès lors que la recherche d'un repreneur par Goldman Sachs est demeurée infructueuse ; l'EPFR ne peut pas être considéré comme un acquéreur tiers par rapport au CDR ; enfin, considérant la précipitation dans laquelle cette offre a été présentée et le prix qui a été retenu - dénoncé comme purement arti- ficiel -, elle n'a pas respecté les conditions de forme. Ces arguments n'ont apparemment pas laissé indifférent le président du tribunal de commerce dont l'ordonnance de référé, très largement motivée, n'a pas manqué d'étonner certains qui y ont vu une sorte de préjugement sur le fond. Questions de détail. Seule certitude, l'examen sur le fond du dossier ne va pas manquer de soulever nombre de questions, ayant trait en particulier au mode d'évaluation des titres Artémis par rapport à l'estimation réalisée il y a un an par René Ricol, président du Conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables, pour le compte du CDR, et qui aboutissait à l'époque à un prix théorique de 2,65 à 2,95 milliards de francs. Mais le dossier risque par la même occasion de replacer sur le devant de la scène la question du détail des relations d'affaires entre le groupe Pinault et le Crédit Lyonnais telles qu'elles existaient à l'origine et telles qu'elles ont ensuite évolué selon les protocoles successifs établis par la direction de la banque avec l'homme d'affaires (voir ci-contre). Philippe Reclus
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