Solaire : le coup de froid sur le marché résidentiel se confirme

« La baisse des raccordements observée depuis début 2012 (notamment sur le marché du résidentiel) va se poursuivre sur les troisième et quatrième trimestres 2012 », prédit Daniel Bour, président de Générale du solaire et du think tank France Territoire Solaire, qui publie l'Observatoire de l'énergie solaire photovoltaïque. Des projets correspondants à une puissance globale de 2 GW ont disparu de la liste d'attente. « Cette différence entre la puissance cumulée des projets en liste d'attente et celle des raccordements réels est encore plus importante que ce à quoi on s'attendait », reconnaît Daniel Bour.La taille de la liste d'attente était pourtant l'un des arguments majeurs du gouvernement pour imposer le moratoire sur les tarifs de rachat en décembre 2010, de peur que l'objectif du Grenelle de l'Environnement (5,4 GW en 2020) ne soit atteint trop rapidement, en pesant trop lourdement sur les finances publiques et la facture d'électricité. Conséquence de cette tendance, le coût du solaire pour la CSPE (Contribution au service puiblic de l'électricité) est en baisse. « Ce n'est donc plus un argument pour freiner le développement des installations », observe Daniel Bour.Un marché du résidentiel divisé par quatre depuis le moratoireComme le montrent les chiffres de l'Observatoire, dans toutes les catégories de projets les listes d'attente représentent plusieurs trimestres d'installation. Sur le résidentiel, il s'est installé quatre fois moins de puissance depuis la suppression du crédit d'impôt (en octobre 2010) et le moratoire sur les tarifs (en décembre 2010). Entre le premier et le dernier trimestre 2011, il est passé de 99 MW à 43 MW, détruisant, rappellent les auteurs de l'étude, plusieurs milliers d'emplois.Les derniers projets d'une taille supérieure à 100 kW et bénéficiant encore de tarifs de rachat (avant d'être soumis à des procédures d'appels d'offres) ont été construits.A fin 2011, la puissance installée en France atteignait 2,3 GW (contre 24,8 en Allemagne), pour environ 200.000 installations (contre plus d'un million en Allemagne). Au cours du seul mois de décembre 2012, l'Allemagne a raccordé pas moins de 3 GW.La difficulté de financement pointée du doigtPour Daniel Bour, derrière tous ces chiffres se cache une même réalité : la difficulté de trouver des financements pour des projets solaires. Une difficulté que les auteurs de l'Observatoire attribuent, certes, en partie à la crise, mais aussi à l'instabilité réglementaire et à la baisse continue des tarifs de rachat, qui n'offrent pas aux investisseurs la visibilité suffisante. Sans contester la compétitivité des produits chinois liés au coût de la main d'oeuvre et aux économies d'échelle, Daniel Bour estime que ces difficultés de financement sont l'une des grandes faiblesses des industriels occidentaux face aux asiatiques. « Alors qu'il s'agit de projets sans risque, avec des tarifs garantis sur 20 ans par EDF, les banques prennent 350 points de base ! » s'étrangle-t-il.En revanche, la France dispose d'atouts sur des produits à haut rendement. Alors que la technologie chinoise ne pourra dépasser les 30 % (aujourd'hui, les rendements les plus élevés du marché plafonnent à 22 %), d'autres technologies issues de la R&D occidentale pourraient atteindre les 50 %. Or « le rendement devient plus important à mesure que le prix du panneau baisse (il est déjà passé des deux-tiers à seulement un tiers du total), car c'est cela qui permet de faire baisser le coût de toute le reste », observe Daniel Bour.Un marché français plus solide, c'est plus de force à l'internationalPour l'heure, il réitère la demande de la profession pour un soutien public à la filière sur une période d'environ cinq ans, jusqu'à ce le coût de l'électricité solaire devienne compétitif avec celui de l'électricité conventionnelle, ce qu'on appelle la « parité réseau. »S'il est favorable à un bonus accordé aux produits français (tels que les panneaux de Photowatt, repris par EDF EN, ou ceux de SunPower, passé dans le giron de Total et fabriqués en Moselle), il rappelle que la fabrication des produits n'est pas l'étape la plus intensive en main d'œuvre. En revanche, outre les installateurs (emplois non délocalisables chers au gouvernement), le savoir-faire développé sur le marché français peut s'exporter facilement, tout comme les fournisseurs de câbles, d'onduleurs, etc.« Si j'avais une meilleure visibilité sur le marché français - qui représente aujourd'hui près de 80 % du chiffre d'affaires de Générale du solaire - je pourrais être plus actif à l'international et recruter plus », témoigne Daniel Bour.Une hausse de tarif insuffisanteParmi les mesures demandées par la filière : un tarif de 20 cents/kWh pour les moyennes toitures (plus ambitieux que celui de 18,4 annoncé aujourd'hui par la ministre de l'Ecologie en remplacement du précédent de 17,5 cents/kWh, même si celui-ci peut-être bonifié de 10 % selon l'origine des panneaux) ; des règles plus transparentes pour des appels d'offres sur grandes toitures simplifiés, informatisés et récurrents ; enfin, l'abandon du tout « intégré au bâti ». Aujourd'hui, seules les installations faisant intégralement partie du bâtiment bénéficient des meilleurs tarifs, ce qui renchérit le coût des travaux, de façon inutile selon de nombreux professionnels.    
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