Le carnet de bord décalé de Gaël Vautrin et Fabio Marquetty

- - -Lundi. Le retour du soldat grecIl fallait le sauver. Dans un esprit de cohésion patriotique, les Etats membres de la zone s'y sont attelés : l'avenir du soldat grec, sans être tout tracé, n'est plus menacé. Du moins dans un futur proche. Le temps de se faire oublier. De toute façon l'attention des opérateurs se concentre désormais ailleurs. Après le temps des dérives budgétaires, vient celui des plans d'austérité. De Paris, à Madrid en passant par Berlin, on craint pour la croissance. Le serrage de ceinture pourrait bien compresser le porte-monnaie déjà bien amaigri des consommateurs du Vieux Continent. Pendant ce temps-là, du haut de sa montagne élyséenne, Nicolas donne le tempo. Réduction du train de vie de l'Etat, postes en sursis dans la fonction publique... Tout y passe. Il faut trouver 40 milliards d'euros d'ici à 2011 pour résorber le déficit. Il faut en passer par là pour se refaire une crédibilité financière. Mieux vaut repartir sur des bases saines. Tout le monde en profitera. A commencer par l'Etat hellénique, qui prévoit déjà d'émettre pour 4 à 4,5 milliards d'euros de dette en juillet. Maintenant que l'Union Européenne et le FMI lui ont garanti 110 milliards d'euros sur factures, tout est permis. Ou presque.Mardi. Haro sur les actionsDevant leurs écrans, les opérateurs voient la Bourse de Paris comme une noix de coco. Creuse (en volumes), difficile à percer (dans son fonctionnement), et peu nourrissante (en plus-value). La tentation est grande de changer de fruits. Consommable en toute saison, constante dans son rendu, et énergisante, la banane obligataire a tout d'une grande. La dette a beau être devenue la bête noire des chefs d'Etats, elle n'en demeure pas moins une denrée prisée lorsqu'elle est émise par des entreprises. Le marché s'inquiète moins de la capacité des sociétés à honorer leurs créances que de leur propension à livrer une croissance bénéficiaire en ligne avec les attentes.Plus globalement les investisseurs sont las. Las d'encaisser les décrochages de cours sur des actions, victimes d'un scénario économique que l'on redoute en W. Une décennie de perdu, c'est déjà assez comme ça. Aujourd'hui encore, le CAC 40 plonge de 4%. Fini de supporter les doutes d'un jour sur la vivacité du PIB chinois ou les craintes d'un autre sur l'état de l'emploi aux Etats-Unis. Heureusement, les obligations d'entreprises, dont la valeur nominale reste stable depuis le début de l'année pour un rendement proche de 4%, sont là pour réchauffer l'atmosphère. Mercredi. Cartellement vôtreAttention ! Quand la Commission européenne se fâche, ça fait mal. Houououou ! On a peur dans les rangs des aciéristes. Tremblements, sueurs froides et claquement de dents. Le verdict tombe. Dix sept aciéristes ont bien trempé dans un vaste cartel d'entente sur les prix de l'acier, entre 1984 et 2002. Dix huit ans ! Même le commissaire à la Concurrence n'en croit pas son verdict et s'étonne que la combine ait fonctionné aussi longtemps. Le préjudice est très très très très très grave. Et pour ce cartel en acier trempé, la sanction est... En maître de cérémonie Joaquim Almunia, le commissaire européen (himself) décachette l'enveloppe : 518 millions d'euros, dont 276 millions pour le premier d'entre eux ArcelorMittal. Houlalala ... Ça fait mal hein ?!!! Seul le marché, un peu fébrile ces derniers temps, s'en émeut et sanctionne le géant mondial de l'acier avec une baisse de 1,89 % (après une chute de plus de 6 % la veille, quand même !). Reste que 276 millions d'euros pour 18 ans d'entente illégale, c'est pas cher payé. Et pour cause. Vu la conjoncture actuelle, il ne faudrait pas les mettre à genoux ces pauvres petits aciéristes. A tel point que les amendes sont en solde en ce moment. La Commission avoue elle-même avoir fait des ristournes de 25%, 50% et 75% pour trois entreprises non identifiées. Décidément, les amendes sont vraiment à géométrie conjoncturelle variable...Jeudi. Un dernier pour la route ...Hips ! L'abus d'alcool est peut-être dangereux pour la santé, mais il est parfois salutaire pour la survie d'un fonds de pension. Si, si ! L'idée du jour pour ne pas laisser ses retraités sur la paille nous vient de Diageo. Le numéro un mondial des spiritueux-à-consommer-avec-modération a un gros problème. Ses ex-employés ont, pourrait-on dire, un verre a moitié vide pour couler des jours heureux jusqu'à trépas. Bref il y a un trou à combler et l'addition est loin de celle d'une soirée bien arrosée : 865 millions de livres. Oups ... « Va falloir colmater ». Les services financiers se creusent les méninges autour d'un verre, puis deux, puis trois ... Eureka ! « Primo, on va verser 200 millions au fonds de pension. Deuzio, on va faire un montage complexe sur la base d'un partenariat de financement qui sera doté de 2 à 2,5 millions de barils de whisky ». Rien qu'un tiers des barriques de la firme. Pas l'esprit assez clair pour comprendre mais, sur dix ans, l'opération devrait rapporter 25 millions de livres par an. Et, cerise dans la liqueur, la part du fonds de pension pourrait lui rapporter jusqu'à 430 millions de livres dans quinze ans. Ça c'est de la maturation ! Sûr que pour fêter ça, les petits retraités de chez Diageo reprendront bien un verre pour la route. Attention tout de même à ne pas arriver dans l'au-delà avec une gueule de bois...Vendredi. Course aux soldesPetits budgets et grosses besaces jouent des coudes pour profiter des soldes. Dans les grands magasins comme dans le monde des affaires, la course aux petits prix a commencé. Qu'importe la sinistrose conjoncturelle ambiante, mieux vaut investir pendant qu'il est encore temps ! Ce n'est pas lorsque la valeur des biens et des sociétés se renchérira qu'il faudra réagir. Les opérateurs ont beau être déstabilisés par les destructions nettes de 125.000 emplois au mois de juin, cette relative confiance en l'avenir affichée par les groupes cotés ravive leurs âmes égarées. De Google à Walt Disney en passant par Sanofi Aventis, tout le monde s'empresse d'exposer ses nouvelles emplettes.La fièvre acheteuse a commencé il y a déjà quelques petits mois. Les entrepreneurs flairent le bas de cycle et veulent saisir des opportunités bon marché, là où la communauté financière s'attend encore au pire. Pour le moment, la vision du clan des hommes et femmes de terrain l'emportent sur celle des traders. Et c'est tant mieux. Cela évite les travers des réactions épidermiques en réponse à des signaux macroéconomiques souvent contrariants.
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