Plans sociaux chez SFR et Bouygues : Free Mobile a-t-il bon dos ?

Restaurer ou sauvegarder la « compétitivité ». C\'est l\'expression employée par la direction de SFR et par celle de Bouygues Telecom pour justifier les plans sociaux que les deux opérateurs vont mettre en œuvre dans les mois à venir après l\'arrivée tonitruante de Free Mobile. La filiale de Bouygues a présenté mardi en comité central d\'entreprise un plan de départs volontaires portant sur 556 postes et s\'est engagé à ne procéder à « aucun licenciement.» Dans son communiqué publié mardi soir, le troisième opérateur mobile français qui emploie 9.800 personnes, rappelle qu\'il « avait déjà annoncé que le développement des offres « low cost » et la guerre des prix rendue possible par les conditions offertes au 4e opérateur [Free Mobile] conduiraient à une baisse de son chiffre d\'affaires, une dégradation de sa rentabilité et de son cash-flow », alors qu\'un « haut niveau d\'investissements » est nécessaire « pour adapter son réseau aux nouvelles technologies. » Un cadre de l\'entreprise souligne que « c\'est la première fois dans l\'histoire du groupe Bouygues qu\'il y a un plan social, nous ne le faisons pas avec légèreté. »Un plan « inéluctable » chez SFR après 1 million de clients perdusDiscours quasi identique chez SFR mardi matin. Le nouveau PDG de SFR, Stéphane Roussel, a expliqué aux représentants du personnel en comité d\'entreprise « qu\'une transformation en profondeur est nécessaire pour restaurer la compétitivité de l\'entreprise, sinon nous risquons de nous retrouver devant un mur d\'investissement avec la 4G notamment » raconte un cadre de l\'opérateur. Un plan de départs volontaires est selon Stéphane Roussel « inéluctable », en raison du « nouvel environnement de marché » et du « séisme Free », d\'après les comptes-rendus de participants. « Si on en est là, c\'est à cause de Free, bien sûr, selon la direction. Il paraît que nous avons perdu 1 million de clients, en brut sans doute, quand on nous disait 600.000 il y a trois semaines » rapporte un délégué syndical, contre 208.000 en net annoncé à fin février. Le directeur général délégué Pierre Trotot a indiqué qu\'il faudrait atteindre 1 milliard d\'euros d\'économies d\'ici à 2015, soit un doublement par rapport aux 450 millions de réduction de coûts prévues cette année. « Les chiffres présentés nous rendent un peu plus pessimistes sur les suppressions d\'emploi, nous allons revoir nos estimations, largement au-delà de 500 » explique Olivier Lelong, de la CFDT. Stéphane Roussel, ex-DRH de Vivendi, la maison-mère, et de SFR, qui avait mené l\'externalisation des trois centres d\'appel de l\'opérateur en 2007, a promis que ce plan social, dont il n\'a pas précisé l\'ampleur et qui ne sera présenté qu\'en novembre, serait « exemplaire. » Les syndicats redoutent un impact de l\'ordre de 10% des effectifs (10.245 à fin 2011), soit entre 800 et 1.200 surpressions d\'emplois.Affichage et « un peu d\'effet d\'aubaine » Aux yeux de la CGT de SFR, « ce projet de PDV est infondé et dangereux non seulement pour les salariés mais aussi pour la performance de l\'entreprise et au-delà le développement des télécoms en France » : les délégués du syndicat dénoncent dans un tract « un navire qui perd 3 commandants en trois mois, qui est sans gouvernail depuis les annonces de Free Mobile en janvier », ce qui a « de quoi inquiéter équipage et passagers », comprendre salariés et clients. S\'ils considèrent que « SFR traverse une tempête », ils relèvent que « l\'arrivée de Free n\'est qu\'une anecdote » dans l\'histoire de l\'opérateur, martelant que « le problème de l\'entreprise et du secteur » est la distribution de « dividendes supérieurs aux bénéfices. » Free Mobile est-il le prétexte invoquée pour une réorganisation qui serait arrivée tôt ou tard ? Difficile d\'aboutir à une réponse claire. « Ce sera un plan social à la SFR, très généreux, avec un an de salaire, beaucoup de garanties, qui va coûter très cher » relève un cadre de l\'opérateur : « c\'est pour des raisons d\'affichage, car commercialement, on ne souffre pas tant que ça » assure-t-il. La direction aurait-elle noirci le tableau, alors que selon le discours officiel la \"vague\" Free est retombée ? « Il y a un peu d\'effet d\'aubaine, tout n\'est pas nécessairement dû à Free Mobile, ce n\'est pas le premier loupé stratégique, il y a eu l\'affaire de la TVA. Free a cassé le confort dans lequel on vivait, la stratégie de Vivendi étant de protéger la marge » glisse une source syndicale. Certains analystes financiers aussi s\'interrogent : et si Free Mobile servait de prétexte à un dégraissage envisagé depuis des mois dans un marché devenu mature et surtout de moyens de pression sur le gouvernement pour obtenir des allègements de charges fiscales ou des contraintes réglementaires ?« Assurer la pérennité de Bouygues Telecom »Chez Bouygues, l\'heure est à la dramatisation sur l\'impact de la « spirale négative et la guerre des prix » en cours sur le marché français du mobile : « il faut assurer la pérennité de l\'entreprise, sa situation économique s\'est profondément dégradée, vous verrez lors de la publication des résultats semestriels fin août » prévient un cadre de l\'opérateur. Pourtant, le 15 mai, Bouygues affirmait n\'avoir perdu que 210.000 abonnés au premier trimestre. Et lors de la présentation des résultats annuels 2011 à la fin février, Martin Bouygues lui-même avait souligné que les charges de personnel ne représentaient que 12% des coûts de l\'opérateur (voir page 41 des slides de la présentation). Un plan d\'économies de 300 millions d\'euros a été alors engagé, axé sur les coûts commerciaux (18% du total, comprenant les subventions des téléphones par exemple) et les charges externes (dont le recours à la sous-traitance, les achats informatiques, etc, soit 24%). Il ne sera semble-t-il pas suffisant. Bouygues Telecom, qui a proportionnellement à sa base d\'abonnés mobiles (10,9 millions) des effectifs plus élevés que SFR (20,8 millions) notamment parce qu\'il a moins externalisé ses centres d\'appels, précise uniquement que « les centres de relations clients et les boutiques » ne seront pas concernés par le plan de départs volontaires, « afin de maintenir le niveau de service à l\'ensemble des clients. » Pour mémoire, la direction de France Télécom s\'est engagé jusqu\'ici à ne procéder à aucun plan social, conformément à ses promesses de recrutement sur trois ans.  
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