Si l'on tue le capital-investissement français, qui va financer les PME ?

« Comme je me sens bien dans ce pays qui aime les entrepreneurs, comme j\'ai l\'impression d\'être entendu ! » Louis Godron, président de l\'Association française des investisseurs pour la croissance (Afic) et directeur général de la société de capital-investissement Argos Soditic, a l\'ironie amère. Le projet de loi de Finances (PLF) 2013, présenté vendredi dernier, lui reste en travers de la gorge. Ses confrères gérants de fonds de capital-investissement sont eux aussi tombés à la renverse, en apprenant que les plus-values mobilières seraient désormais taxées à plus de 60%, contre 28% en Allemagne et au Royaume-Uni, et 16,5% en Belgique.En effet, le métier d\'un fonds de capital-investissement consiste justement à placer l\'argent de ses actionnaires dans des entreprises, et à revendre ces dernières quelques années plus tard avec une plus-value destinée à rémunérer les actionnaires en question. « Au motif de dissuader les plus-values spéculatives, le PLF 2013 frappe sans discernement les investissements de moyen et long terme », déplore l\'Afic.2,3 milliards d\'euros investis dans 834 entreprisesDe fait, il ne faut pas confondre « hedge funds » et fonds de capital-investissement ou de private equity. Si les premiers s\'invitent au capital d\'entreprises dans une optique purement spéculative et de très court terme, les seconds restent au capital des sociétés durant cinq à sept ans, le temps de les développer, de les redresser. Certes, les fonds de capital-investissement ne sont pas des philanthropes, leur but est de faire fructifier leurs placements afin de rémunérer au mieux leurs actionnaires, mais les entreprises dans lesquelles ils investissent y trouvent souvent leur compte, elles aussi. Au premier semestre, le private equity français a encore investi près de 2,3 milliards d\'euros dans 834 entreprises, principalement des PME françaises. Une somme bienvenue à l\'heure où les banques se font tirer l\'oreille pour accorder des crédits et où la Bourse répond aux abonnés absents.« Le carried interest n\'a rien de comparable à un salaire »« 9% des entreprises françaises ont des fonds propres négatifs. Il existe un vrai problème de fonds propres dans l\'économie française. Et c\'est nous, sociétés de capital-investissement, qui pouvons le résoudre », insiste Louis Godron. A condition qu\'on ne décourage pas le private equity d\'exercer son métier. Or, outre la hausse de la taxation des plus-values de cession, le projet de budget 2013 entend assimiler le « carried interest » à un salaire et, partant, porter sa taxation à 95%. Le « carried interest », c\'est la part (20% généralement) de la plus-value de cession d\'une entreprise empochée par les gérants de fonds de capital-investissement.Mais, pour toucher ce « carried interest », certes parfois très élevé, encore faut-il que le prix de cession excède deux fois la mise initiale, et que les gérants aient investi, de leur poche, 0,25% à 1% du fonds. Aussi n\'y a-t-il « rien de comparable entre un salaire perçu en fin de mois et le risque pris par les gérants de fonds », s\'insurge l\'Afic.Plus de 5.000 entreprises soutenues« Je ne pleure pas sur notre sort à nous (capital-investisseurs), on se reconvertira, on partira à l\'étranger », affirme Louis Godron. Ce qui fait mal au patron de l\'Afic, qui a effectué toute sa scolarité à l\'école publique, des petites classes à Centrale, c\'est que, comme nombre de ses confrères, il ne demanderait pas mieux que de continuer à financer les PME de son pays. « Notre profession soutient plus de 5.000 entreprises en France, rassemblant 9% de l\'emploi salarié », souligne Louis Godron. Si le gouvernement pousse le capital-investissement français à l\'exil, qui les financera, ces entreprises ? 
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