Oxygéner la démocratie

Une \"réalité politique parfaitement dissociée\"Baudrillard parlait déjà d\' « une réalité politique parfaitement dissociée. D\'un côté, la classe politique, micro-société parallèle secrètement en chômage technique, évoluant impunément ... De l\'autre, une société «réelle» de plus en plus déconnectée de la sphère politique. Toutes deux, s\'éloignant l\'une de l\'autre à une vitesse grand V, ... maintenue sous perfusion par le seul cordon ombilical des médias et des sondages. »Dans l\'enchainement Cahuzac il y a surtout l\'une des faces sombre, celle-là, de l\'exception française: cumuler, encore et toujours, et avec ces épaisseurs multiples s\'isoler du terrain et s\'éloigner du peuple. Trop de narration, pas assez d\'intéraction et de conversation. Trop tard pour revenir en arrière ? Comme dans un monde à part, propriétaire et figé, les mêmes têtes politiques s\'installent dans nos écrans au delà de deux voire trois générations. Pour le citoyen balloté par les vents de la mondialisation, le citoyen pour qui tout change dans sa propre vie, famille, emploi, géographies, ... tout sauf les acteurs du politique.Une culture de l\'impunitéAu delà, la permanence semble nourrir une sorte de culture de l\'impunité et du déni de vérité. Engagements électoraux oubliés, gouvernance météorologique, actes du passé nié et finalement avoués : répétition de faits qui témoignent d\'une dérive démocratique.  Le phénomène qui est loin d\'être l\'apanage du politique tant les élites françaises excellent dans l\'art d\'additionner les mandats, les emplois, les charges et les missions. Conseils d\'administration du CAC 40, offre médiatique, monde universitaire, secteur public et secteur privé, tous les espaces sont occupés, sur-occupés et dans la durée. Principal effet pervers, les cumulards édifient une barrière presqu\'impossible à franchir pour de nouveaux entrants. Le problème est tout sauf mineur. On bloque le renouvellement fluide des élus et des élites. Résultat, la moyenne d\'âge de la classe politique française est la plus élevée d\'Europe et, ailleurs, le casting se renouvelle peu ou pas.Les salariés du privé exclus de la candidatureSi nous voulons réellement oxygéner et fluidifier la vie politique de notre pays, il faut la rendre plus accessible aux citoyens. Fonctionnaires, retraités, surtout, professions libérales, chefs d\'entreprises un peu, constituent dans des proportions respectives qui bougent selon les niveaux d\'élection, l\'essentiel du corpus des élus mais surtout, et c\'est beaucoup plus grave, celui des candidats. L\'ensemble des salariés du privé, comme les jeunes sont quasiment exclus de l\'accès à la candidature avant même de parler d\'élection. Comment peut-on imaginer aujourd\'hui une représentation locale, nationale ou européenne aussi peu fidèle de la société française ?Réguler sévèrement le cumulRéguler sévèrement le cumul, en nombre et dans la durée, des mandats politiques et demain des autres mandats de gouvernance, c\'est créer les conditions du renouvellement des élus et demain des élites. C\'est faire monter de nouveaux candidats, aux histoires différentes. Quel salarié du secteur privé peut aujourd\'hui se présenter devant son employeur pour lui annoncer qu\'il va être candidat et qu\'il se pourrait qu\'il soit élu et qu\'il voudrait donc pouvoir revenir à la fin de son mandat ? Aucun ou presque !Un statut de l\'éluEn complément de la régulation du cumul, c\'est aussi du statut de l\'élu qu\'il est question. Une évolution vitale pour oxygéner la démocratie, la renforcer et la renouveler dans sa dimension représentative. Retour à l\'emploi, retraite, aménagement du temps de travail, pour que les passages de la société civile à la société politique puissent se faire sans obstacle ... Alors que le statut du syndicaliste est heureusement depuis longtemps incontestable, quel engagement sociétal plus puissant, plus nécessaire et plus responsable que celui d\'élu de la République ! La démocratie est un organe vivant, s\'il s\'agit de renouveler le personnel politique pour renouveler la démocratie, il s\'agit aussi de protéger l\'élu pour protéger la démocratie. Notre société produirait ce qu\'elle fabrique si peu : de la confiance, du respect et une volonté commune. La vraie démocratie participative contre les populismes ou la démocratie forcée. Nous ne pouvons attendre 2017 monsieur le Président.*Professeur associé à l\'Université de Paris 1 la SorbonneConseil en communication d\'influence Membre de la SEAP, Society of European Affairs Professionals 
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