La filière bovine souffre de la concurrence allemande

Philippe Chalmin rend sa copie ce jeudi à Bruno Lemaire. L'économiste, nommé président de l'observatoire des prix et des marges en novembre dernier par le ministre de l'Agriculture, aura eu un mois à peine pour disséquer les prix, marges et charges de toute la filière bovine. Début novembre, des éleveurs en colère avaient occupé pendant près d'une semaine les abattoirs du groupe Bigard, leader du secteur, obligeant le ministre à exiger un rapport en urgence. Les éleveurs protestaient contre un prix inchangé depuis 1997 de 3 euros par kg pour leur carcasse, alors que ceux aux consommateurs ont augmenté de 40 %.Le parent pauvre du secteurPourtant, pas de dénonciations à prévoir ce jeudi. « Je ne peux montrer personne du doigt », confie Philippe Chalmin à « La Tribune ». « Tous les acteurs de la filière souffrent même si les industriels et les distributeurs ont pu répercuter la hausse de leurs charges aux consommateurs alors que les agriculteurs, non. » La filière bovine serait une des moins profitables de l'agriculture et il paraît difficile de savoir ou se réalisent les quelques points de rentabilité. « Les Leclerc ou Intermarché, avec leur filiale intégrée, font un boulot d'industriel, et les producteurs comme Charal, livrent comme des distributeurs directement dans les rayons avec leurs barquettes », continue Philippe Chalmin. « Si le prix du steak a augmenté pour le consommateur, c'est que la viande consommée aujourd'hui n'a plus rien à voir avec celle de 1997 », ajoute le directeur général du syndicat de la viande (SNIV) Pierre Halliez. Entretemps, la vache folle a entraîné son lot de contrôles sanitaires, de traçabilité obligatoire et d'élimination des sous produits agricoles. Autant de coûts supplémentaires. La consommation a elle aussi évolué vers des viandes plus élaborées, mieux découpées, moins grasses dans des barquettes sous vide qui assurent une durée de vie des produits de 20 jours contre quatre pour les précédentes barquettes en polystyrène. Autant de facteurs qui nécessitent une réorganisation de fond de la filière, encore trop éclatée. En amont, la France compte 200.000 exploitations d'élevage bovin et en aval, malgré une concentration récente (Bigard pèse à lui seul 42 % du marché), les acteurs ne font pas le poids face aux mastodontes européens comme le néerlandais Vion ou le danois Danish Crown.Une plainte déposéeLa filière vient d'ailleurs de rejoindre son homologue porcine dans un comité de lutte contre le dumping social de leur voisin allemand. « Les abattoirs allemands embauchent des travailleurs de l'Est qu'ils paient trois fois moins cher qu'en France et comme le personnel représente 80 % du coût de transformation, leur boeuf est huit centimes moins cher du kilo, ce qui leur permet de rafler tous les appels d'offre européens », dénonce Pierre Halliez. Une plainte auprès de la commission européenne sera déposée au cours du mois de janvier par le collectif.Sophie Lécluse
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