Jérôme Kerviel accablé

Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous ». Cette phrase devait résonner dans la tête de Jérôme Kerviel ce jeudi matin, au troisième jour de son procès. Les avocats de la banque, partie civile, ont en effet utilisé contre lui des confidences qu'il a faites à un collègue de son équipe, Salim Nemouchi, avec qui il avait aussi des relations d'ordre amical.Salim Nemouchi raconte qu'au moment où la banque commençait à tirer l'affaire au clair, le 19 janvier 2008, Kerviel lui a envoyé un SMS : « je vais me faire virer. Adieu, content de t'avoir connu ». Ce qui permet à l'un des avocats de la banque, Maître Reinhart, de souligner que l'attitude de Kerviel n'était « pas celle de quelqu'un qui a travaillé de concert avec sa hiérarchie », alors que l'intéressé affirme que « tout le monde était au courant » de ses positions, qui ont culminé à 49 milliards d'euros.Sans un regard pour son ancien collègue, Salim Nemouchi qualifie ces positions de « débiles », et explique avoir été « déçu et révolté », en tant que collègue, en apprenant que Kerviel avait fait prendre des risques « stratosphériques » à la banque et à ses employés. « En tant que trader, on a tous des limites à respecter », assène-t-il, alors que la défense de Kerviel fait tout pour présenter ces limites comme « poreuses ». Le témoin affirme ensuite ne jamais avoir eu recours aux méthodes de dissimulation utilisées par Kerviel, mais il admet qu'elles existent, même si elles ne sont « pas courantes ». Il est alors taclé par Kerviel, qui affirme que Salim Nemouchi et d'autres membres de l'équipe ont pioché dans son résultat caché de 1,4 milliard pour alimenter leur trésorerie, et que c'est la raison pour laquelle certains ont été licenciés, ce que la banque dément. « C'est possible que des membres de l'équipe aient fait des opérations de trésorerie avec Kerviel, mais je ne crois pas l'avoir fait personnellement », corrige le témoin. Plus tard, Claire Dumas, qui représente la banque, fait projeter un document retraçant l'évolution du résultat potentiel qu'aurait généré la position prise par Kerviel début janvier, si elle n'avait pas été débouclée en urgence par la banque du 21 au 23 janvier. De quoi relativiser l'idée que Kerviel avait trouvé une « martingale » : « la position perdait déjà 2,7 milliards quand nous avons commencé à la découvrir, et par la suite elle a continué à se dégrader pour perdre jusqu'à 29 milliards au printemps 2009 », lorsque les marchés ont touché leur point bas, martèle Claire Dumas.JokersComme pour effacer cette impression défavorable, l'avocat de Kerviel, Maître Metzner, profite de la dernière demi-heure pour sortir un de ses jokers : un document qui montre que l'automate de trading employé par l'ex-trader permettait à son manager de limiter le cumul des ordres qu'il pouvait passer dans la journée. « La limite d'engagement en nominal fixée à Jérôme Kerviel, comme d'ailleurs à d'autres traders de la Société Généralecute; Générale, indique zéro, ce qui signifie qu'elle a été désactivée », accuse Metzner. Mais pour Claire Dumas, il n'y a là rien de nouveau. La banque avait en effet expliqué dès l'annonce des faits que l'absence de limite en nominal, pratique courante dans les salles de marchés à l'époque, était « une des failles qui ont permis la fraude  ». « Avec les opérations fictives et les faux e-mails de justification de Jérôme Kerviel », en profite pour rappeler Claire Dumas.
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