Premières querelles entre chaînes et acteurs du Net autour de la TV connectée

Malgré sa promesse d'une expérience plus interactive, grâce aux icônes en bas de l'écran appelées « widgets » qui donnent accès à une sélection de sites Internet, la TV connectée ne fait pas forcément le bonheur des acteurs en place de l'audiovisuel. Laurent Solly, le président de TF1 Digital, raconte la mésaventure arrivée dernièrement à la filiale de Bouygues. Le 24 avril, TF1 a diffusé en prime time en direct la dernière du spectacle de Gad Elmaleh. « Nous n'avions pas les droits pour la télévision de rattrapage donc nous ne l'avons pas diffusée sur notre widget accessible sur la TV connectée de Samsung. Or quinze minutes après la diffusion, la vidéo du spectacle était disponible sur le widget de Youtube, sans doute captée par un internaute », a-t-il relaté au colloque organisé jeudi par le cabinet NPA sur « les équilibres contenus/réseaux de la première décennie numérique ». Il s'agit des premiers problèmes rencontrés sur ce marché naissant. Il devrait s'écouler cette année un peu plus de 2 millions de TV connectées en France, soit 25 % à 30 % des ventes de téléviseurs prévues.Création audiovisuelle« Le même téléspectateur passe d'une minute à l'autre d'un marché historique de l'audiovisuel complètement régulé, avec des obligations de production, d'examen préalable des contenus, des règles de respect des ayant-droits, au marché de l'Internet », qui ne supporte pas ces contraintes, a analysé le responsable de TF1 Digital. « Or nous sommes les financeurs de la création audiovisuelle », a-t-il rappelé. Le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, semble partager ces craintes. « L'essor de la TV connectée peut être à l'origine d'une distorsion de concurrence néfaste à ceux qui contribuent aujourd'hui à financer la création », a-t-il déclaré lors de ce colloque, s'alarmant que « toute la chaîne audiovisuelle et donc la solidarité financière entre acteurs pourraient être remises en cause. » Pour Xavier Couture, le directeur des contenus d'Orange, la TV connectée « constitue une énorme menace pour nous tous ». Les fournisseurs d'accès à Internet proposent déjà des services enrichis de télévision via leur Box ADSL (accès direct au service de télévision de rattrapage, VOD, etc.), qui se trouvent concurrencés par ces widgets. Revendiquer la neutralitéCependant, les acteurs ont presque tous signé des accords, souvent exclusifs, pour être présents sur ces postes connectés : TF1 avec Samsung, M6 avec Sony, Canal Plus avec TCL (sous la marque Thomson) Orange avec LG. Du côté des fabricants de téléviseurs, André Bousquet, de Samsung France, justifie cette exclusivité par la nécessité, au démarrage, de s'adosser aux « seigneurs » du métier pour amortir les investissements dans ces nouveaux services. Mais à terme, il estime que « l'on doit revendiquer la neutralité du téléviseur », comme on parle de celle du Net, à savoir la non discrimination d'accès aux différents services. Si les grandes chaînes se sentent menacées, les plus petites pourraient trouver dans la TV connectée « l'occasion de développer leurs marques, d'enrichir leurs services et de s'affranchir éventuellement des distributeurs » selon Xavier Spender, Pdg de l'Équipe TV et président de l'Association des chaînes du câble et du satellite.
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