Les souvenirs dessinés de William Kentridge

L'exposition était au Moma, le musée d'Art moderne de New York, il y a quelques semaines. Elle arrive bientôt à Paris, au Jeu de paume. Au fil de 40 oeuvres, « William Kentridge, cinq thèmes » revient sur le travail de l'un des artistes sud-africains les plus importants de la scène contemporaine. En France, on avait rarement eu l'occasion de l'apprécier, si ce n'est au sein de la galerie Marian Goodman qui représente l'artiste. Car même s'il a aujourd'hui 55 ans, cela fait à peine vingt ans que William Kentridge a fait son entrée dans le milieu des arts plastiques.Né à Johannesburg en 1955 en plein apartheid, l'artiste est bien diplômé des Beaux-Arts. Mais c'est au théâtre qu'il fait ses premières armes en tant qu'acteur, metteur en scène et dramaturge. Dans les années 1980, il passe même un an à Paris pour étudier le mime.Il faudra attendre 1989 pour le voir produire sa première « projection pour dessins » qui a marqué le début de sa notoriété. Ses films d'animation révèlent une technique très particulière. L'artiste effectue ses animations à partir de dessins au fusain ou au charbon. Mais plutôt que d'utiliser un calque différent pour chaque croquis comme le veut la technique habituelle, lui utilise toujours la même feuille. Une fois un premier dessin capté, il l'efface pour entamer le suivant. Le résultat est un film d'animation dont chaque mouvement laisse une trace diffuse, comme une mémoire du trait qui persisterait. Ses premiers films mettent en scène le personnage de Soho Eckstein, industriel puissant, capitaliste jusqu'au bout des ongles, mais pourtant rongé par la culpabilité. Évoluant durant les dernières années de l'apartheid, ses tourments reflètent le climat politique et social de l'époque. William Kentridge y dénonce les dangers de la colonisation dans un climat sombre qui laisse peu de place à l'espoir. Présenté en 1997 à la Documenta de Kassel, le sixième épisode de cette première série rencontra un vif succès. Depuis, la cote de l'artiste n'a cessé de grimper.Sa popularité lui aura permis de revenir à l'univers du théâtre mais à un niveau tout autre que celui de ses débuts. Ainsi, il a mis en scène « la Flûte enchantée » de Mozart en 2005. Au Jeu de paume, on peut voir des dessins préparatoires de ce travail mais aussi une installation vidéo qui s'en inspire. Plus loin, un autre dispositif visuel fait référence à l'opéra « The Nose » de Chostakovitch qu'il a monté pour le Metropolitan Opera de New York il y a tout juste trois mois. William Kentridge continue son art selon cette alchimie. Un pied sur scène, une autre dans les galeries.Olivier Le Floc'h
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