L'éditorial d'Eric Benhamou. Régulation bancaire : encore un effort...à faire

Autre temps, autre moeurs. C'est dans un relatif désintérêt de l'opinion, et dans un hémicycle désert, que le projet de loi sur la régulation bancaire et financière a été adopté en première lecture à l'Assemblée nationale. Le texte, qui doit désormais passer entre les mains du Sénat, n'est pas vide. En une vingtaine d'articles, il renforce les pouvoirs d'investigation et de sanction de l'Autorité des marchés financiers, engage - on ne sait trop comment - la responsabilité des agences de notation en cas « d'erreurs », encadre (mais pas trop) les produits dérivés et les ventes à découvert, institue auprès des conseils d'administration des comités des risques ou de suivi de la rémunération des traders. Autant de mesures qui ne sont a priori guère contestables. Mais elles apparaissent bien ternes à l'aune des déclarations aussi fracassantes que déterminées des politiques au plus fort de la crise financière à l'automne 2008. Il s'agissait alors que remettre à plat la régulation afin d'en finir avec le capitalisme financier, comme l'avait proclamé Nicolas Sarkozy lors de son discours de Toulon. Réforme passée de modeLes interrogations des politiques sur la cotation en continu, l'utilité de certains produits dérivés, comme les CDS, l'opportunité de taxer les banques (ou les transactions), de promouvoir les activités de crédit au détriment des activités de marchés se sont finalement évanouies dans un train de mesures sans grande conséquence. Pire, la réforme de la régulation semble même être passée de mode : le gouvernement a abandonné sa posture de « trader killer » pour adopter celle de « cost killer » ou de père la rigueur. En soi, ce n'est guère étonnant. Ni le gouvernement, ni l'Assemblée nationale, n'ont le pouvoir de changer les choses en matière de finance. La régulation, la vraie, se joue ailleurs. A Washington tout d'abord où le projet de réforme d'Obama fait l'objet d'une lutte féroce au Congrès et dont personne ne peut dire, à cette heure, qui en sortira vainqueur. Mais aussi, de façon bien plus discrète mais tout aussi efficace, à Bâle où se négocient de nouvelles règles prudentielles pour les banques. Ces dernières ne s'y sont pas trompées en ciblant leurs attaques sur les propositions de « Bâle 3 ». Mais à la prochaine crise, c'est bien au gouvernement et à la représentation nationale que l'opinion demandera des comptes.
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