Les Roms, le problème qui fâche les Européens

Sur le bord de la rue principale de Calvini, un petit village roumain situé au pied des Carpates, Victor Muscaloiu, un Rom d'une soixantaine d'années, grignotedes graines de tournesol en regardant passer les voitures. Grand et mince, son sourire est clairsemé de quelques dents en or et sa petite moustache est parfaitement taillée. « J'étais à Paris et j'ai entendu que la France donnait de l'argent pour créer sa petite entreprise en Roumanie. Alors je suis revenu », dit-il sans cesser de mâchouiller. Le 28 janvier dernier, il a signé un papier s'engageant à quitter le territoire. Il a aussi touché les 300 euros en liquide, versés à chaque candidat au départ (ce pécule n'est que de 100 euros pour les enfants). Arrivé en Roumanie, il a déposé un dossier pour obtenir les 3.600 euros censés l'aider à monter une petite affaire, dont il avait entendu parler. Il attend toujours une réponse. « Je préfère vivre ici, chez moi, plutôt qu'en France, mais si ça ne marche pas, je retourne là-bas », argumente-t-il tranquillement.Sur les 5.000 habitants de Calvini, près de 40 % sont d'origine Rom. La majorité d'entre eux sont partis en France. « Sous Ceausescu, ils étaient saisonniers. Aujourd'hui, il n'y a plus de travail en Roumanie, alors ils partent à l'étranger. Si la France veut qu'ils restent à Calvini, il faut créer des emplois et non pas donner des subventions, », estime Mircea Stoica, le représentant de la communauté Rom à la mairie de Calvini.Depuis la mise en place des aides au retour volontaire et à la réinsertion pour la population roma de Roumanie, en septembre 2006, un peu plus de 420 projets économiques ont été financés. Un faible bilan si l'on compte les quelque 20.000 Roms d'origine roumaine qui ont été rapatriés durant cette même période et qui, bien souvent, sont repartis. Excédé par cette immigration dérangeante, Paris accuse Bucarest de ne rien faire pour intégrer cette minorité, même si de nombreux fonds européens lui ont été alloués à cet effet. La France a d'ailleurs subtilement menacé la Roumanie, le mois dernier, de lui bloquer son adhésion à l'espace Schengen, prévu en 2011. Catalin Predoiu, le garde des Sceaux roumain, a vivement réagi, affirmant qu'une coopération avec les autorités françaises « ne signifie pas utiliser les bulldozers pour détruire des campements et blâmer publiquement la Roumanie ». C'est dans ce climat que Pierre Lellouche, le secrétaire d'État français aux Affaires européennes, et Éric Besson, le ministre de l'Immigration, sont attendus à Bucarest les 9 et 10 septembre prochain. La nomination il y a quelques jours par le gouvernement roumain d'un secrétaire d'État chargé de la réinsertion des Roms a permis de calmer les esprits. Mais rien n'est encore réglé.Jonas Mercier, envoyé spécial à Calvini (Roumanie)
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