Disculper les sorcières de la finance

Si au XVIe et au XVIIe siècle, la France a brûlé pas mal de sorcières, en ce début de XXIe siècle, un banquier s'interroge pour savoir si ses confrères méritent le même sort. En se laissant aller à prêter à des Américains insolvables et à structurer des produits extrêmement rémunérateurs pour les investisseurs, tout en gagnant de somptueux bonus, les banquiers auraient-ils pactisé avec le diable ? Non, nous dit l'auteur, banquier, mais aussi docteur en économie, dont l'ouvrage, volontairement didactique et pédagogique, pointe surtout la responsabilité des autres.Alors que l'Inquisition ne laissait pas beaucoup d'issue à ses inculpées, Georges Pauget, directeur général de Crédit Agricolegricole SA, prend la balance de la justice : « Le procès fait aux banquiers est foncièrement injuste. Ils ont été chargés de tous les maux alors que le système bancaire est essentiel à un fonctionnement normal de l'économie. Un procès a été fait aux banques françaises alors qu'elles ont plutôt très bien géré la crise. Les Français n'ont pas à rougir de leurs banques. L'impact de la crise sur celles-ci a été plus faible qu'ailleurs. »Au travers de chapitres titrés sous forme d'antienne (« les banques se font de l'argent sur notre dos et ne servent à rien », elles sont « coupables de la crise », elles ont « profité de la crise », « les marchés financiers ne fonctionnent pas »?), l'auteur explique le métier de banquier, le rôle de la banque et les mécanismes qui ont prévalu à la crise. Celle-ci a une origine politique, la volonté des gouvernements américains que chaque citoyen ait un foyer à lui. Une fois avérée, la liste est longue de ceux qui ont failli à leur mission : les régulateurs, les normalisateurs comptables, les agences de notation, les assureurs? Et les banquiers dans tout ça ? Pour Georges Pauget, leur responsabilité est circonscrite : « Les banquiers se sont trompés dans leur analyse du risque. En matière de risque de marché, ils se sont appuyés sur les outils de la finance moderne. Or aucun modèle historique ne permettait d'évaluer le risque à sa juste mesure. L'origine de la crise est donc dans une erreur d'appréciation. À partir de là, le mimétisme des marchés a joué et la contagion de la crise s'est étendue, ce que personne n'anticipait au début de la crise. On a assisté à une fuite en avant qui a sorti le modèle de son épure. » On est alors étonné : le métier de banquier n'est-il pas précisément de savoir évaluer le risque ? nGuénaëlle Le Solleu« Faut-il brûler les banquiers ? », Georges Pauget. JC Lattès, 249 pages, 13,90 euros.
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