Le marché de l'électricité français adopte un prix plancher dissuasif

Payer pour pouvoir produire son électricité : voilà ce qui pourrait bientôt arriver aux électriciens français. Dans le cadre de l'harmonisation des règles entre les différentes places européennes, qui devraient prochainement n'en faire qu'une dans le projet Central West European (CWE)*, le conseil de la place de marché Epex a décidé de modifier le prix plancher de vente du mégawatt, qui passera de 1 centime à ?3000 euros par mégawatt en France. « Pour les producteurs, c'est un gros changement. Produire pour 1 centime ne serait-ce que pour quelques heures pose déjà problème; il va donc falloir s'ajuster » assure Mathieu Pottlitzer, responsable du trading à la Société Nationale d'Electricité et de Thermique. Ce qui est justement l'objectif de l'instauration d'un prix négatif : mieux refléter la réalité du marché en cas de surcapacité, ce qui incitera les installations qui le peuvent à... couper le courant. Contrairement à toute autre matière première, l'électricité ne peut être stockée : tout mégawatt produit doit immédiatement être vendu. Et surtout, bon nombre de capacités de production ont peu de souplesse : si on les arrête, le redémarrage peut prendre du temps. L'hypothèse de prix négatifs n'est pas que théorique. En France, les échanges ont parfois touché leur plancher de 1 centime. Et sur le marché secondaire, où RTE ajuste les écarts d'équilibre, des prix négatifs de quelques euros ont déjà été observés. La limite de ?3000 euros est en revanche nettement plus inquiétante, notamment pour les petits acteurs du marché. Problème de trésorerieEn octobre dernier, l'envol des cours vers les 2000 euros par megawatt a posé un sérieux problème de trésorerie aux plus petits acheteurs du marché. Avec un plancher abaissé à ?3000 euros, ce sont les petits producteurs qui risquent de souffrir. En Allemagne, le 4 octobre dernier, le cours du mégawatt pour livraison entre 2 et 3 heures du matin avait chuté jusqu'à -500,02 mégawatt. L'Allemagne traverse clairement aujourd'hui une période de trop-plein d'électricité. « On a construit en éolien 20 gigawatt de capacité de production, ce qui pose problème parce que les éoliennes ne s'arrêtent jamais », assure Mathieu Pottlitzer. La loi allemande prévoit en effet que les énergies renouvelables soient systématiquement prioritaires. Il suffit que la demande fléchisse, ou que les vents soient forts, pour que les prix chutent fortement. Une situation qui frappe également l'Espagne, où des capacités de production importantes en éolien mais aussi en centrales à gaz, pèsent lourdement sur les prix. Avec la CWE, qui devrait être mise en place au premier trimestre de cette année, les cours du mégawatt en France devraient logiquement être tirés vers le bas par la légère surcapacité des voisins. * Projet de couplage qui regroupe la Belgique, la France, l'Allemagne, le Luxembourg et les Pays-Bas.
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