Comment EDF a évité le pire aux Etats-Unis face à Constellation

Le nucléaire aux États-Unis est certainement une très belle opportunité de long terme. Est-ce que cela veut dire que, dans les conditions actuelles, nous réaliserions le projet ? La réponse est non », déclarait lundi Thomas Piquemal, directeur financier d'EDF en commentant les chiffres trimestriels du groupe. Une prudence de rigueur face à des marchés inquiets de voir EDF s'exposer davantage outre-Atlantique. Et pourtant, c'est le même homme, proche du PDG d'EDF Henri Proglio, qui vient de livrer une bataille éclair pour qu'EDF se sorte du guêpier Constellation tout en préservant sa faculté de participer, un jour, au renouveau du nucléaire aux États-Unis.La nouvelle courait dans les milieux financiers américains depuis juin. L'électricien Constellation, que l'ancien patron d'EDF Pierre Gadonneix avait sauvé de la faillite fin 2008 en lui achetant la moitié de ses centrales nucléaires pour 4,5 milliards de dollars (3,3 milliards d'euros), répétait à l'envi qu'il exercerait avant la fin de l'année une option signée par EDF. Coût potentiel pour l'électricien français : près de 1 milliard de dollars. Henri Proglio, déjà peu convaincu par cette acquisition américaine, s'est senti particulièrement trahi. « Ce même mois de juin, il recevait dans son bureau à Paris les dirigeants de Constellation, venus lui dire leur satisfaction d'être le partenaire d'EDF aux États-Unis », se souvient un proche. Mi-septembre, Constellation refusant d'abandonner cette option, Thomas Piquemal organise la riposte, à trois niveaux.D'abord, l'ancien banquier de Lazard fait part de sa ferme intention de se battre en faisant appel à George Bilicic, associé chez Lazard à New York. « Et il le fait savoir, pour mettre Constellation sous pression », raconte un analyste américain. Ensuite, EDF passe à la menace en faisant entrer au conseil d'administration de Ceng, qui exploite les centrales, Steve Wolfram, ancien patron du cabinet d'avocats Paul Weiss à Paris. Sa mission : dénoncer le contrat qui assure à partir de 2014 au distributeur Constellation, le courant produit par Ceng. En clair, lui couper le robinet. Enfin, EDF fait savoir qu'il ne paiera pas l'option et la dénoncera en justice.Clause annulée« Lorsque Thomas Piquemal a expliqué cette volonté à une trentaine d'analystes lors d'un déjeuner à New York le 4 octobre, le cours de Constellation a plongé de 5 % en séance », se souvient l'un d'eux. Après trois échanges publics de fin de non-recevoir, les deux ex-associés se sont mis à négocier. « Constellation, cerné, a compris que, sinon, tout allait être très compliqué », selon un proche du dossier. En échange de l'abandon de l'option, EDF va payer 249 millions de dollars (dont 140 millions en cash) mais récupérera 50 % de l'électricité de Ceng (et non plus 15 %) à partir de 2015. La clause, qui restreignait ses droits d'actionnaire de Constellation, a été annulée. « En restant seuls aux commandes d'Unistar, nous retrouvons notre autonomie sur le projet d'EPR de Calvert Cliffs », se félicite-t-on chez EDF. Ainsi que l'intégralité des frais de développement, qui se montent déjà à 650 millions de dollars, dont 580 millions réglés par EDF.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.