Ce qu'il faut savoir sur la pépite frenchy Criteo avant son entrée sur le Nasdaq

« CRTO ». Ce sera le code sous lequel la société française Criteo cotera bientôt sur le Nasdaq. C'est désormais officiel : l'entreprise, dont le siège se situe rue Blanche à Paris, vient de déposer son prospectus d'introduction de 320 pages auprès de la Securities Exchange Commission, le gendarme boursier américain. La consécration pour une success story de la publicité sur Internet, à la croissance météoritique, mais encore peu connue du grand public.Au carrefour des tendances des « big data », ces grandes masses de données numériques que nous produisons, et du « real-time biding », ces enchères publicitaires en temps réel qui deviennent le nouveau standard du marché, Criteo a tout pour séduire les investisseurs en quête de pépite aux perspectives exponentielles. Dans ce document très codifié en anglais, la société dévoile tous ses secrets, son modèle, ses points forts et ses faiblesses, ses comptes détaillés et la répartition de son capital.L'entreprise est rentable depuis 2009Criteo, dont l'activité a bondi de 200.000% en cinq ans, ce qui lui a valu le prix Fast50 de Deloitte l'an dernier, révèle ainsi qu'elle a réalisé un chiffre d'affaires de 194,3 millions d'euros au premier semestre 2013, en croissance de 71%, un bénéfice brut d'exploitation de 5,2 millions et une perte nette de 4,9 millions (contre un bénéfice de 4 millions l'année précédente). Fondée en 2005, l'entreprise était rentable depuis 2009, mais elle met les bouchées doubles pour accélérer sa croissance et son expansion internationale : ses dépenses en R&D et ses coûts opérationnels ayant explosé.Des bannières publicitaires personnalisées en 150 millisecondesL'aventure Criteo a donc démarré en 2005. L'entreprise a développé des algorithmes de prédiction et de recommandation qui lui permettent de proposer de la publicité ciblée aux sites d'e-commerce, payée à la performance, au clic. Criteo génère en temps réel (« en moins de 150 millisecondes ») des bannières publicitaires de « reciblage » personnalisé, en fonction de la navigation Web de l'internaute sur des sites marchands clients de sa solution.L'entreprise revendique désormais plus de 4.000 clients dans 37 pays, qui lui seraient fidèles à 90% (ils ne paient que si l'internaute clique sur la bannière), et réalise les deux tiers de son business auprès d'e-commerçants et de sites de réservations de voyage (63,5% au premier semestre), comme la Redoute, les 3Suisses, CDiscount, Expedia, Rakuten, Sarenza, Zalendo, etc.Criteo veut précisément élargir sa clientèle et s'attaque aux télécoms (Orange en fait déjà partie), à l'auto et aux services financiers. A la fin juin 2013, la part de l'activité réalisée en Europe est tombée à 52% contre 63,5% l'an passé et 83% en 2011. Les ventes ont bondi de 131% dans la zone Amérique, où Criteo, implanté aux Etats-Unis à Palo Alto et à New York, compte notamment Macy's et eBay parmi ses clients. L'entreprise française emploie 746 salariés à fin juin, dont 555 en Europe et 132 outre-Atlantique.Une valorisation attendue de 2 milliards de dollarsCombien vaut Criteo et combien d'argent espère-t-elle lever ? Ce prospectus préliminaire ne le précise pas, même s'il mentionne un placement de 190 millions de dollars. Selon l'agence Bloomberg, Criteo pourrait être valorisée 2 milliards de dollars, chiffre que ne confirme pas l'entreprise. Ce serait plus que ValueClick, un de ses concurrents américains coté au Nasdaq, qui capitalise 1,6 milliard de dollars pour un chiffre d'affaires supérieur mais une croissance faible.En 2007, Google avait acquis DoubleClick, également spécialiste du ciblage comportemental et concurrent de Criteo, pour 3,1 milliards de dollars. Google est à la fois un rival et un de se principaux partenaires, puisque Criteo achète les inventaires publicitaires de sa plateforme, mais aussi auprès des Ad Exchange de Facebook, de Yahoo et de Microsoft.Les trois cofondateurs, Jean-Baptiste Rudelle (44 ans), le PDG, Romain Niccoli (35 ans), le directeur technique, et Franck Le Ouay (36 ans), le « chief scientist » décrit comme le cerveau à l'origine de l'outil prédictif, détiennent un peu moins de 20% du capital à eux trois, dont 10% pour le premier et 4,6% pour les deux autres (voir le détail du capital page 158).47 millions d'euros ont déjà été levésLe premier actionnaire est le fonds américain Index Venture (23,4%), juste devant les français Idinvest (22,6%) et Elaia Partners (13,5%), qui avait participé au premier tour de table en 2006. Au total, Criteo a levé 47 millions d'euros à ce jour, dont 30 millions en octobre dernier auprès de Softbank Capital, Yahoo Japan, SAP Ventures et les fonds Adams Street et Bessemer Venture (qui possède 9,5% du capital).Les curieux pourront aussi regarder le salaire que se paient les dirigeants (226.000 euros pour le PDG) et surtout leur rémunération en actions (l'équivalent de 2,4 millions d('euros en action pour le directeur financier par exemple), et apprendre que la société a perçu 2,4 millions d'euros au titre du Crédit d'impôt recherche l'an dernier.Le débat sur l'usage des données personnelles en toile de fondCriteo insiste sur la nécessite d'innover et de savoir s'adapter sur ce marché, en particulier de ne pas rater la bascule des usages des internautes du web sur PC vers le surf sur tablette et tablette. L'entreprise met le turbo dans la pub sur mobile : elle a nommé cet été un directeur du mobile, Jason Morse, ancien d'AdMob, la régie spécialisée dans le mobile rachetée par Google en 2009, et a acquis le britannique Ad-X Tracking, un spécialiste de l'analytique sur mobile, pour 5,5 millions d'euros (plus 3,7 millions en paiement différé).Autre enjeu de taille pour la jeune entreprise : les questions de respect de la vie privée, de confidentialité. Criteo indique que la CNIL poursuit son enquête engagée l'an dernier sur la manière dont elle utilise les données personnelles, et combien de temps elle les stocke ainsi que les cookies qui suivent la navigation Web des internautes.L'entreprise n'exclut pas d'écoper d'une amende (voir page 22) et souligne les risques règlementaires existant dans ce domaine des données personnelles dans plusieurs pays. Criteo a d'ailleurs nommé en juin une responsable de la protection de la vie privée (« global privacy officer »). Jean-Baptiste Rudelle avait lui-même relevé que « la protection de la vie privée est au premier rang des préoccupations des consommateurs et nous prenons ces sujets très au sérieux. »
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