Ces entreprises qui font la part belle aux femmes

« Les entreprises qui pratiquent la diversité et la mixité hommes-femmes sont largement récompensées », affirmait Dominique Reiniche, présidente pour l'Europe de Coca-Cola, à l'occasion du Women's Forum, qui s'est tenu récemment à Deauville. Carlos Ghosn, le PDG de l'Alliance Renault-Nissan va plus loin : « Je suis pour les quotas, pour la rupture. La diversité est vraiment un point d'amélioration de la compétitivité des entreprises. » L'affaire semble entendue : alors que le monde économique porte encore les stigmates de la crise, les entreprises ne peuvent, dans le but d'accroître leur compétitivité, qu'adopter la mixité. Les femmes seraient donc aujourd'hui perçues comme un atout indispensable ?Une nuance, toutefois. Certains secteurs, ou certains pays, sont encore autant de forteresses pour les femmes. « Je ne pense pas que, dans notre industrie, la proportion de femmes atteindra un jour 50 %, avoue Christine Hodgson, PDG de Capgemini Technology Services (TS) pour l'Europe du Nord-Ouest. 30 % de femmes au plus haut niveau serait déjà une avancée fantastique. » Pour l'heure, si Capgemini compte une femme, Laurence Dors, à son conseil d'administration, et 22 % de salariées en Inde, l'industrie des services informatiques dans son ensemble n'affiche que 15 % de femmes managers. « J'ai embauché beaucoup de femmes au Japon », remarque de son côté Mouna Sepehri, managing-director de l'Alliance Renault-Nissan. Si ses origines iraniennes - emblème de la diversité dans cette entreprise - lui ont permis, lors de la fusion des deux constructeurs, d'amadouer les hommes d'affaires nippons, elle le sait : les traditions ont la vie dure.Une loi, qui vient d'être adoptée en France, après avoir été mise en oeuvre dans d'autres pays - de la Norvège à l'Espagne - permettra certes de féminiser les conseils d'administration. Toutefois, le dispositif ne propulse en rien les femmes aux postes intermédiaires, des comités exécutifs au top management. « Le laisser-faire n'est donc pas une option », s'exclame Sandrine Devillard, directeur associé senior - et l'une des huit femmes partners chez McKinsey en France. Les résultats des études menées par le cabinet sont sans appel : au plus haut niveau de l'entreprise, les hommes sont, à 62 %, convaincus des bienfaits de la diversité (contre 90 % des femmes, tout de même). Mais le « middle management » semble plus mitigé : 50 % d'hommes seulement sont convaincus, contre 28 % imperméables au concept. « Il faut donc encore faire évoluer les mentalités à ce niveau », conclut Sandrine Devillard. Sur plus de 1.500 entreprises étudiées à l'échelle de la planète par McKinsey, seules 13 % ont appliqué, au cours des cinq dernières années, six mesures ou plus en faveur de la promotion des femmes. C'est vrai dans 24 % des grandes entreprises. Dans les PME, le pourcentage chute à 7 %. De quoi désespérer les femmes, pourtant majoritaires, désormais, à sortir des universités un diplôme en poche ?À moins que... Les entreprises dirigées par Carlos Ghosn, Muhtar Kent, le PDG de Coca-Cola, Michel Landel, celui de Sodexo, et bien d'autres, ont non seulement décidé de promouvoir les femmes, mais aussi de surveiller eux-mêmes les progrès - politiques quantitatives et qualitatives à l'appui.Les mesures les plus communes vont de la mise en place de procédures d'évaluation centrées sur la seule performance à l'obligation, pour chaque poste ouvert et chaque promotion, de proposer des femmes. De même, la flexibilité des horaires et des carrières est de mise. Sans oublier évidemment augmentations et promotions - y compris au retour d'un congé maternité. « Car ce sont souvent dans ces moments-là que les entreprises perdent les femmes de talent », explique encore Sandrine Devillard. À cela s'ajoute la formation au leadership. Chez GDF Suez, par exemple, les femmes peuvent visionner des films illustrant comment poser sa voix ou projeter une image d'autorité. L'entreprise mise également sur le « mentoring ». « Pour moi, il y a un avant et un après, raconte Alisson, l'une des bénéficiaires du programme. J'ai parcouru un chemin énorme en six mois. À l'avenir, je souhaite prendre plus de responsabilités dans le groupe », ajoute-t-elle, dynamisée par le travail qu'elle accomplit avec Dominique, son mentor. Cette dernière, directrice financière d'une filiale de GDF Suez, apporte son écoute et « reformule énormément », pour faire évoluer la façon dont Alisson perçoit son travail et son comportement.Chez Axa, Armelle Vercken, chargée de communication, souligne que le but « n'est plus de faire entrer des femmes dans l'entreprise - qui composent déjà 54 % des effectifs en France - mais de « faire monter les femmes dans le top 300 des plus grands patrons ». « À l'heure actuelle, seulement 9 % de femmes font partie de ce classement. Nous nous donnons jusqu'à 2015 pour tenter d'atteindre 25 % », ajoute-t-elle. En France, Axa a signé en 2006 un accord sur l'égalité hommes-femmes et débloqué 2,25 millions d'euros pour corriger les écarts salariaux. Une aubaine pour près de 600 femmes, qui ont déjà bénéficié de ce bonus. Du côté de la Belgique, Axa mise en revanche sur l'exemplarité et la visibilité. Un prix « Axa Woman at Work » a été créé cette année. Ce trophée honore le patron ayant le plus amélioré la place des femmes dans son entreprise. Les récompenses sont encore plus claires chez Sodexo. Afin de s'assurer que les cadres s'appliquent dans la promotion des femmes, la société a décidé de lier une partie de leur bonus à leur performance, évaluée qualitativement et quantitativement dans ce domaine. Le pourcentage est de 15 % pour les « middle » managers, et de 25 % pour les top managers, et ce, quelle que soit la performance financière de l'entreprise.Les résultats se font déjà sentir. Aujourd'hui, sur les 300 top managers que compte la multinationale, 18 % sont des femmes. Et l'objectif est d'atteindre 25 % dans quelques années. Chez GDF Suez, si les bonus ne sont pas affectés par la promotion des femmes, ces dernières font des progrès : sur 46 promotions en six mois, 5 ont concerné des femmes, grâce en particulier au programme de « mentoring ». Ces initiatives semblent faire des émules. À l'occasion du Women's Forum à Deauville, vingt grands patrons internationaux, dont Chris Viehbacher, le PDG de Sanofi-Aventis, se sont engagés à renforcer le rôle des femmes. Des patrons décidés à revenir l'an prochain, accompagnés chacun d'un nouveau PDG, qu'ils auront convaincu de promouvoir les femmes dans l'entreprise.Lysiane J. Baudu, avec Elisa Perrigueu
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