Mettre les normes IFRS au service de l'économie

Comptabilit髠La comptabilité doit refléter l'entreprise comme un processus de création de valeur, et non comme un simple portefeuille d'actifs et de passifs négociables sur le marché. » C'est sur la base de ce postulat que Didier Marteau propose, dans un rapport remis le 13 octobre à Christine Lagarde et dont « La Tribune » s'est procuré une copie, de réformer la gouvernance des normes IFRS, en vigueur en Europe depuis 2005.Directeur associé chez Aon et professeur à ESCP Europe, ce spécialiste des marchés financiers conclut, après avoir consulté 39 experts (hommes du chiffre et régulateurs pour l'essentiel), qu'il est temps de « remédier à la défaillance de la gouvernance » du processus de normalisation comptable internationale, qui dépend de l'IASB (International Accounting Standards Board), une entité privée à but non lucratif. « Il faut d'abord redéfinir le cadre conceptuel de l'IASB en prenant en compte l'intérêt public, et pas seulement celui des investisseurs de court terme, et le faire valider par une instance disposant d'une légitimité démocratique, idéalement le G20 », avance l'économiste. Cela permettrait de contrôler le processus d'écriture des normes, dans lequel l'IASB est régulièrement taxé d'autisme par des parties prenantes qui ont le sentiment d'être consultées pour rien. « On pourrait alors contester telle ou telle norme si on estime qu'elle n'est pas conforme au cadre conceptuel, comme on le fait en droit devant le Conseil constitutionnel », explique Didier Marteau.«?vrais enjeux identifiés?»Le rapport se penche aussi sur les modalités d'application de la « juste valeur » (évaluation des actifs au prix de marché). Outre l'abandon de ce terme, trop normatif pour être honnête, il propose de créer un régulateur comptable européen qui pourrait suspendre l'application de la valeur de marché lorsque la liquidité fait défaut, pour éviter que des valeurs déprimées ne contaminent le bilan et les résultats des institutions financières. Il ébauche même une démarche pour identifier ces situations en décomposant les primes de liquidité.Interrogé, l'entourage de Christine Lagarde précise qu'elle ne reprendra pas à son compte l'intégralité du rapport, mais le juge néanmoins « très utile, car il identifie les vrais enjeux de la normalisation, notamment les failles de sa gouvernance », qui ne fait aucune place aux États, pourtant garants de l'intérêt général. Le rapport devrait d'ailleurs être publié dans les prochains jours en vue de « contribuer à la nécessaire réflexion sur le sujet ». Benjamin Jullien
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