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Il était encore là aux dernières Rencontres d'Arles, l'été dernier, pour profiter du bel hommage que lui rendait le festival. Dommage que Willy Ronis (1910-2009) nous ait quittés quelques mois avant de fêter son centenaire à la Monnaie à Paris.La rétrospective qui y est présentée, en partenariat avec le Jeu de paume, est incontestablement l'une des plus belles expositions qui lui ait jamais été consacrée. Car il n'est pas ici question de se focaliser sur un thème en particulier ou de pleurer un Paris disparu, mais de montrer à travers 150 images en noir et blanc dont beaucoup d'inédits, l'oeuvre dans sa globalité. Portées par un accrochage somptueux, ses photos apparaissent enfin telles qu'il les voulait, vivantes et non plus confites dans la nostalgie. Et ses compositions se révèlent plus virtuoses que jamais. Comme pour cette image désormais célèbre d'une jeune femme enjambant une flaque d'eau dans laquelle se reflète la colonne Vendôme. « J'ai d'abord fait un mariage de raison avec la photographie, qui s'est transformé en un mariage d'amour », disait Willy Ronis. Fils d'un photographe de quartier, il délaisse l'atelier familial parisien à la mort de son père pour se consacrer au reportage en 1936. Si ses premières images rappellent parfois celles de Brassaï, comme cette vue nocturne d'un taxi saisi au pied d'un escalier de Montmartre un soir de pluie, la plupart témoignent d'emblée d'un engagement fort aux côtés de « ceux qui revendiquent une vie meilleure ». Il y a bien sûr la désormais célèbre syndicaliste haranguant la foule en 1938, un jour de grève chez Citroën. Mais aussi ces mineurs, ces ouvrières qu'il magnifie devant leur machine comme s'il s'agissait d'un reportage pour la mode.On découvre aussi ici pour la première fois plusieurs photos d'un ensemble réalisé en RDA où il s'était rendu en 1960. Willy Ronis y montre la reconstruction, les amphis pleins d'étudiants, un pays où il fait bon vivre. Sa vision de Moscou est plus distanciée. À New York, c'est le quartier alors miteux de Greenwich Village qu'il photographie en 1981.Chose étrange, dans chaque ville, il épouse l'ambiance du pays. Folle à New York, méditerranéenne en Italie. Il y a aussi ces pingouins en goguette, échappés du cirque Pinder, déambulant dans les allées d'un château de Touraine. Parce que c'était aussi cela le travail de Willy Ronis. Une oeuvre parfois drôle mais jamais anecdotique, tendre sans jamais être mièvre, distante mais fraternelle. Celle d'un grand humaniste.Yasmine Youssi Exposition « Willy Ronis, une poétique de l'engagement », à la Monnaie de Paris jusqu'au 22 août. Catalogue : coédition Democratic Books-Jeu de paume-Monnaie de Paris, 192 pages, 35 euros. www.monnaiedeparis.fr.
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