Réussir en Chine est un gage de compétitivité

Avec la montée d'un nationalisme économique en Chine, n'est-il pas devenu trop risqué d'y investir massivement ?Être en Chine est devenu une nécessité, sous peine de s'exclure de la guerre économique. Et on ne peut plus y être présent sans avoir une production locale qui permette de servir ses clients chinois dans des délais très courts, et d'être attentif aux concurrents chinois qui dament le pion aux entreprises occidentales sur les marchés extérieurs. Réussir sur ce marché hypercompétitif a un effet vertueux : ceux qui s'y implantent ont la meilleure productivité, génèrent le plus de flux d'exportations et le plus de créations d'emplois en France.Alors, comment l'aborder : faut-il toujours en passer par un joint-venture avec un partenaire local ?Non, ce n'est plus un passage obligé. D'ailleurs, les JV ne représentent plus que 9 % des implantations d'entreprises françaises présentes en Chine, 28 % étant présentes sous la forme d'un bureau de représentation. Ainsi, plus de 60 % d'entre elles ont une filiale locale contrôlée à 100 %.Seulement, c'est très coûteux...Il est vrai qu'à Shanghai, par exemple, les locaux peuvent coûter plus cher qu'à Paris, que le package des expatriés est onéreux, et qu'avec l'obligation légale d'offrir une sécurité sociale aux collaborateurs chinois, ils coûtent à l'entreprise 1,35 fois leur salaire brut. Le retour sur investissement est donc long, et ceux qui ont un horizon qui ne dépasse pas deux à trois ans doivent s'abstenir d'y venir.Mais comment résister à la concurrence chinoise ?Dans ce pays où la liberté d'entreprendre, comme celle de consommer, est une des plus grandes libertés, la concurrence locale n'a pas fini de se développer. Mais les Occidentaux qui y ont d'importantes parts de marché continuent d'enregistrer une activité et des profits en hausse. Et c'est bien pour préserver leurs parts de marché qu'un jour ils décident de produire sur place, y compris des centres de R&D.Mais à vouloir tout transférer en Chine, ne faites-vous pas la promotion des délocalisations ? Que restera-t-il comme emplois en France ?Les études de Natixis Pramex ont montré que les investissements en Chine d'entreprises françaises sont générateurs de chiffre d'affaires, d'environ trois fois le montant des exportations vers la Chine, soit un CA de 27 milliards d'euros, de valeur ajoutée, mais aussi d'exportations, et donc d'emplois en France.Alors, existe-t-il un risque d'y surinvestir, comme on le murmure ?Dans certains secteurs, l'arrivée d'un grand nombre d'acteurs a entraîné un effritement des marges. Aussi notre culture d'ingénieur qui exige une qualité élevée et durable, mais se paie de prix plus élevés, souffre-t-elle. Certains ont fini par offrir une qualité « tout juste suffisante » pour le marché. Mais cela ne durera peut-être pas, car l'on voit apparaître des Chinois prêts à s'offrir des produits qui durent.Par la taille de son marché et de son industrie, la Chine finira-t-elle par fixer les normes techniques et environnementales mondiales ?Sur le marché appelé à être le plus grand au monde, les investissements en R&D seront amortis plus vite qu'ailleurs. Pour autant, la Chine va-t-elle tirer les normes mondiales vers le bas ? Les exigences de sécurité les contraignent à s'aligner sur les normes mondiales. Nous sommes encore dans une phase de transition où les standards se mettent en place.Mais le rapport de force ne risque-t-il pas d'être de plus en plus défavorable aux entreprises étrangères ?Il est clair que nos amis chinois ont une conscience aiguë du cadeau qu'ils font au reste du monde. Mais si le climat des affaires est nettement moins favorable aux étrangers qu'il ne l'a été depuis trente ans, je ne vois pas Pékin chercher à les faire fuir. Il y a plus de 300.000 sociétés étrangères implantées en Chine - dont 2.200 sociétés françaises - qui emploient plus de 45 millions de Chinois. Or, en Chine, les travailleurs chinois tendent à devenir un vrai contre-pouvoir.Propos recueillis par Valérie Segond ? Demain : entretien avec Jean-Pascal Tricoire, président de Schneide
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