Ne plus pouvoir aider Ryanair : cette menace qui plane sur les petits aéroports français

Menaces pour une grande partie des aéroports régionaux français. Principalement pour les plus petits d\'entre eux, ceux qui accordent à certaines compagnies à bas coûts en général, à Ryanair en particulier, de larges soutiens financiers pour les attirer sur leur tarmac. Au premier trimestre, Bruxelles va publier de nouvelles règles européennes en matière d\'aides d\'Etat qui devraient être durcies. Auquel cas, les aides versées aux compagnies aériennes seraient touchées, rendant ainsi plus compliquée la façon de travailler de plusieurs aéroports avec ces compagnies. « Il existe une préoccupation des aéroports sur l\'évolution des textes, a déclaré ce mardi Jean-Michel Vernhes, le président de l\'Union des aéroports français (UAF), également directeur de l\'aéroport de Toulouse, lors de l\'assemblée générale du Board Airlines Representatives (BAR) qui regroupe l\'ensemble des compagnies étrangères basées en France (Air France est également membre). Pour certains d\'entre eux c\'est très important ». Et de préciser : « Un certain nombre de gestionnaires d\'aéroports se posent des questions sur la pérennité de leur exploitation (...) car leur modèle peut être remis en cause», notamment les aides au démarrage de lignes. Bruxelles pourrait notamment abaisser le seuil de passagers accueillis à partir duquel, l\'aéroport doit notifier des aides. Aujourd\'hui, les aéroports traitant moins d\'un million de passagers ne sont pas obligés de faire cette déclaration.Plaintes d\'Air FranceDans le même temps Bruxelles doit se prononcer sur les plaintes déposées par Air France contre les aides accordées par plusieurs aéroports régionaux à Ryanair. «Il semble que la Commission européenne veuille avoir un peu de recul sur les lignes directrices avant d\'arrêter sa décision sur les plaintes d\'Air France », a indiqué la semaine dernière Yves Tatibouet, sous-directeur en charge des aéroports à la direction du transport aérien de la DGAC (direction générale de l\'aviation civile) devant les journalistes de l\'AJPAE (association des journalistes professionnels de l\'aéronautique et de l\'espace).Echange passagers contre chèquePour attirer les compagnies aériennes, les aéroports jouent la carte de la modération tarifaire. S\'ajoute aussi un accompagnement promotionnel des lignes des transporteurs. Un système qui a entraîné des dérives de la part de certains aéroports qui ont transformé le soutien marketing en subvention déguisée pour le compte de Ryanair, essentiellement. Pour convaincre la compagnie d\'ouvrir une ligne, de nombreux aéroports, qui n\'avaient pas d\'autre choix pour disposer d\'une offre aérienne, ont octroyé des ristournes sur le prix des prestations, et de manière non pas temporaire comme l\'autorise Bruxelles, mais pérenne. Certaines plates-formes font même cadeau des coûts d\'escale. Au bout du compte, les aides se comptent en millions d\'euros en échange des milliers de passagers britanniques, belges ou allemands transportés par Ryanair. Un système jugé contraire aux règles européennes par Air France, qui a déposé plainte à Bruxelles contre 25 aéroports français fin 2009. « Ces subventions sont d\'autant plus contraires aux règles européennes de la concurrence qu\'elles ne sont ni temporaires ni dégressives dans le temps. Au surplus, les mesures d\'aides octroyées à Ryanair sont souvent financées par le produit des redevances payées par les autres compagnies présentes sur ces aéroports », soulignait Air France en mars 2010, le jour où elle rendait publique sa plainte.\"Ryanair vers les grands aéroports\"? « Il ne faut pas nier qu\'il y a un problème, explique Jean-Michel Vernhes. Comment va-t-il être résolu, nous n\'en savons trop rien », a-t-il convenu devant l\'AJPAE. Comment va réagir Ryanair si elle doit rembourser les aides reçues et/ou si ces aides deviennent plus restrictives ? Dans les deux cas, le risque de la voir quitter l\'aéroport est une réalité. Déjà, certaines plates-formes, comme Angoulême ou Pau, ont pris l\'initiative de mettre fin aux subventions. Et Ryanair a mis les voiles... « Il faudra voir la réponse des compagnies low-cost à la nouvelle donne. Ryanair fera-t-il évoluer son modèle, vers les aéroports de plus grande taille ou restera-t-il sur les petits aéroports? », s\'interroge Jean-Michel Vernhes.Fortes retombées économiquesLe débat sur les subventions est pour beaucoup une question de survie. Et il pose, par ricochet, la question des retombées économiques pour la région. «Chaque million de passagers génère 1000 emplois, l\'impact économique n\'est pas négligeable », explique Philippe Ayoun sous-directeur des études de la statistique et de la prospective à la DGAC.\"Les sommes pour le financement du transport ferroviaire sont plus importantes\"Surtout, cette évolution de la règlementation s\'inscrit dans un débat plus large sur le financement des petits aéroports. « Les collectivités territoriales ont des moyens limités et, à l\'avenir, choisiront-elles de continuer à investir alors que l\'aéroport est un coût pour les aéroports qui accueille moins d\'un million de passagers », s\'interroge la Jean-Michel Vernhes. Et de préciser : « les collectivités territoriales vont avoir à faire des choix budgétaires». Un coût estimé néanmoins « globalement assez modéré », pour Yves Tatibouet. En outre, « les aides aéroportuaires sont largement inférieures aux sommes mobilisées pour le financement du transport ferroviaire, par exemple, », nuançait en novembre dans les colonnes de La Tribune Pascal Personne, directeur de l\'aéroport de Bordeaux. Pour lui, « le débat est plus compliqué, au regard des retombées pour les territoires de la présence d\'un bon réseau aérien à proximité ».Pas de fermetures d\'aéroports dans les cinq ansAlors quel avenir pour les petits aéroports français ? « Je ne vois la fermeture d\'une vingtaine d\'aéroports au cours des quatre ou cinq prochaines années, explique Jean-Michel Vernhes. Il y a eu beaucoup d\'enquêtes en Europe et elles n\'ont pas entrainé la fermeture d\'aéroports ». Un avis partagé par Michel Ayoun. Pour autant, il risque d\'y avoir des changements importants pour rationaliser le maillage aéroportuaire français et mieux coordonner les plateformes entre elles. Reste à définir lesquels. Car si des regroupements entre gros et petits aéroports pourraient avoir du sens, la multiplicité des acteurs (régions, départements, communautés urbaines...), constitue un obstacle majeur.
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