L'arrêt des exportations russes de blé oblige l'Égypte à en importer de France à prix élevé

Ce vendredi la FAO, l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, réunit d'urgence à Rome son groupe intergouvernemental sur les céréales et le riz. Les États veulent trouver une parade à la flambée soudaine des cours du blé suite à la sécheresse en Russie, car ils craignent que les crises alimentaires de 2007-2008 ne se reproduisent. L'inquitéude est ainsi vive en Égypte, le premier consommateur de blé au monde. Ce pays de 82 millions d'habitants, à la géographie désertique, avec 5 % seulement de terres cultivables, avale chaque année 14 millions de tonnes de blé, dont près des deux tiers sont importées. Début août, l'annonce de l'arrêt des exportations russes a soufflé un vent de panique dans le pays et le gouvernement a dû réagir très vite. « Les Russes représentaient 60 % des importations égyptiennes. Depuis, le Gasc (l'organisme qui achète le blé destiné au marché public) se tourne vers d'autres fournisseurs : la France, les États-Unis et le Canada », explique Roland Guiragossian, responsable Moyen-Orient de France Export Céréales, une association de promotion du secteur, basée au Caire. L'Égypte attendait ces jours-ci la livraison de 500.000 tonnes de blé russe. Pour éviter toute pénurie, Le Caire a finalement acheté au prix fort 1,6 million de tonnes de blé français, canadien et américain : lors du dernier appel d'offres du Gasc, les prix Fob (Free On Board) ont grimpé jusqu'à 306 dollars (229 euros) la tonne, contre 250 dollars (187 euros) en juillet. La carte de la prudenceLa note est salée, mais le gouvernement égyptien n'a pas d'autre choix. Dans ce pays, où une personne sur cinq vit avec moins de 1 dollar par jour, nombreux sont ceux qui vivent des produits subventionnés. Aliment de base, le pain en fait partie. Vendu dix fois moins cher que dans les enseignes privées, l'Eish mouda'am, ce pain subventionné, est un héritage de la période nassérienne. Même s'il plombe le budget de l'État (coûtant 1 milliard de dollars en 2008, environ 750 millions d'euros), le gouvernement ne prendra pas le risque de le remettre en question. « Les émeutes de 1977 contre l'arrêt des subventions du pain ont fait peur au régime. Depuis, chaque gouvernement porte en lui ce traumatisme et n'ose pas toucher à cette aide sociale », analyse Magdi Sobhi, économiste au centre de recherches Al-Ahram, au Caire. À la veille d'élections cruciales pour le pays, des législatives en novembre suivies du scrutin présidentiel en octobre 2011, le gouvernement joue donc, plus que jamais, la carte de la prudence. Quoi qu'il lui en coûte.
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