La petite musique de Su-Mei TseElle a représenté le Luxembourg à la Biennale de Venise en 2003 et obtenu le lion d'or pour la meilleure participation nationale. Reçu le soutien du plasticien chinois Cai Guo-Qiang, qui l'a invitée à exposer dans un bunker de Taïwan un an plus tard. Remporté en mai dernier le 43e prix international d'art contemporain de la Fondation Prince Pierre de Monaco pour « Some Airing », une pièce impressionnante figurant une gigantesque hélice de 9,5 m de diamètre tourbillonnant dans une crayère du domaine Pommery à Reims. Pas étonnant que le travail de Su-Mei Tse soit cet automne au c?ur de toutes les attentions. La Fondation Prince Pierre lui consacre une exposition à Monaco, tandis que Serge Le Borgne présente dans sa galerie parisienne (et à la Fiac) d'autres pièces. L'occasion de découvrir une artiste dont la délicatesse contraste avec l'?uvre, puissante et assurée.C'est par la musique que Su-Mei Tse est venue aux arts plastiques. Née au Luxembourg en 1973 de parents sino-britanniques musiciens de profession, elle opte d'abord pour le violoncelle pour lequel elle reçoit plusieurs prix décernés par le conservatoire de musique de sa ville natale. Avant de bifurquer vers des études aux Beaux-Arts de Paris. « C'était une question de liberté. Et un énorme privilège puisque l'art me permet d'intégrer tout ce que je peux faire et qui m'intéresse, comme la danse », confie-t-elle. Reste que la musique est omniprésente au sein de son ?uvre.Elle commence tout d'abord par y questionner l'apprentissage de cette discipline, notamment à travers une vidéo dans laquelle elle se met en scène telle une marionnette entravée par des fils pour jouer du violoncelle. Et ne conserve pour la bande-son que les couacs provoqués par ce harnachement.Su-Mei Tse crée aussi de drôles d'objets comme cet étrange et élégant casque audio « Sumy », présenté à Monaco, dont les écouteurs ont été remplacés par des coquillages emprisonnés dans la résine, qui donnent néanmoins à entendre la mer. Il y a aussi « White Noise », dont le titre fait référence à ce crépitement, cette respiration qui précède le début d'un disque ou l'achève. Soit un beau tourne-disque en bois à l'ancienne, sur lequel tourbillonne un 33 tours piqué de petites boules blanches comme autant de perles de neige.Avec la Biennale de Venise, l'artiste a pu commencer à expérimenter le travail dans des espaces plus imposants. Alors elle imagine avec un souffleur de verre des sabliers de différentes tailles à écoulement variable. « Le temps est un paramètre omniprésent en musique », reconnaît-elle. Elle s'intéresse aussi au néon dans lequel elle conçoit une balançoire grandeur nature au va-et-vient continue, tel un métronome.IntemporelleTout inspire Su-Mei Tse. Un souvenir d'enfance, un mot, une expression, un livre. Tel « le Maître ou le Tournoi de go ». À chaque fois, elle cherche avec son partenaire Jean-Lou Majerus le meilleur médium pour exprimer l'image qui s'impose à elle. Pour l'ouvrage de Kawabata, ce sera la photographie qui lui permet d'immortaliser les pions dans différentes figures de jeu évoquées par le livre, comme une métaphore de l'existence.Au fil des pièces présentées à Paris ou à Monaco, on s'aperçoit de l'extraordinaire lisibilité de l'?uvre de l'artiste. Elle ne s'accorde aucune facilité. Ce qui permet à son travail de s'inscrire dans la durée. Raison de plus pour considérer avec beaucoup d'attention le travail de Su-Mei dont les prix, déjà conséquents, risquent de prendre plus d'ampleur dans les années à venir. Aujourd'hui, il faut compter entre 10.000 et 15.000 euros pour les premières vidéos comme « Marionnettes » éditées entre 3 et 5 exemplaires. Les sculptures comme « Swing », la balançoire en néon, et les installations, telles les quatre photos du « Maître ou Tournoi de go », se vendent pour leur part entre 20.000 et 38.000 euros.Yasmine You

latribune.fr

29 Oct 2009, 13:53

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