Aux États-Unis, un tour de vis comptable et prudentiel

Une réforme peut en cacher une autre. Dans le chahut provoqué, depuis jeudi dernier, par l'annonce du plan de Barack Obama pour réduire la taille et la prise de risque des banques, dont les détails restent à préciser par le Congrès, une autre réforme réglementaire est passée pratiquement inaperçue. Pourtant, ces mesures, déjà ficelées, vont entrer en vigueur progressivement dès cette année.Les quatre régulateurs fédéraux du secteur bancaire, Réserve fédérale en tête, ont en effet amendé leur cadre prudentiel en intégrant les effets d'une réforme du référentiel comptable US Gaap, adoptée en juin dernier. Les nouvelles normes FAS 166 et FAS 167 ont pour effet de restreindre la capacité des banques à comptabiliser hors de leur bilan certaines entités, qu'elles ne contrôlent que partiellement (VIE). À commencer par les véhicules (CDO, CLO, ABCP, etc.) utilisés pour transformer des crédits bancaires en titres financiers.L'intégration de ces changements comptables par les régulateurs américains aboutit à un sérieux tour de vis prudentiel. « Il est encore trop tôt pour estimer l'impact précis, mais les grandes banques américaines vont mécaniquement subir une baisse de leurs ratios de solvabilité, en proportion de leur recours à ce type de véhicules », anticipe Sophie Sotil-Forgues, senior manager chez KPMG. Sans compter que les régulateurs se sont ménagé la possibilité de prendre en compte, dans leurs exigences de capital, des véhicules que les normes comptables permettent pourtant de sortir du bilan.L'impact sur les besoins en fonds propres des banques américaines devrait toutefois être limité. En effet, les banques ont levé le pied sur la titrisation, certaines ayant même été contraintes de rapatrier dans leur bilan des véhicules qui s'effondraient après l'éclatement de la bulle du crédit. dissuasionEt les régulateurs ont anticipé l'entrée en vigueur de ces réformes, notamment lors des tests de résistance (« stress tests ») conduits au printemps par le Trésor sur 19 grands établissements. Le principal effet devrait donc être de dissuader les banques de recourir à la « fausse titrisation », celle qui vise non pas à transférer le risque de crédit au marché pour accroître leur capacité de financement, mais à le dissimuler dans des structures opaques et non régulées pour réduire leurs besoins en fonds propres, et ainsi doper leur rentabilité. « C'est un pas significatif dans la bonne direction », estime-t-on ainsi dans l'entourage du comité de Bâle, qui rassemble les principaux superviseurs bancaires de la planète.Benjamin Jullie
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