Le capital-risque en difficulté

La situation est paradoxale. « Il y a beaucoup d'entrepreneurs en France, mais pas beaucoup de fonds d'investissement, car ce n'est pas dans la culture », se désole Pierre Kosciusko-Morizet, qui pilote Isai, un fonds créé pour les start-up. « Nous recevons 300 dossiers par jour, et nous concluons un investissement par trimestre. Il reste donc beaucoup d'entreprises à financer. » Jusque-là, l'on savait que la France manquait de « business angels », ces particuliers qui financent des petits tickets (quelques centaines de milliers d'euros au maxi) dans des entreprises en début de vie.Désormais, c'est le capital-risque qui est en difficulté. « Le manque de financement pourrait ralentir le développement des start-up alors que la technologie n'est pas touchée par la crise », explique Pierre de Fouquet à la tête d'Iris Capital. Essentiels dans le cycle de vie des jeunes pousses, ces fonds prennent la suite des business angels et investissent à hauteur de quelques millions d'euros. À ce moment-là, les modèles économiques sont encore balbutiants et les revenus ne sont pas toujours là. Problème?: ces fonds, dont les investissements sont par nature très risqués, ont de plus en plus de mal à se financer auprès d'investisseurs institutionnels (banques, assurances, fonds de fonds...). «Depuis dix-huit mois, il y a un vrai souci pour lever de l'argent car la rentabilité est insuffisante pour les institutionnels. Sur le long terme, la plupart des fonds perdent de l'argent », se désole le dirigeant d'un fonds de capital-risque en quête de capitaux. « Les performances de ces fonds ont pu être décevantes », admet Guillaume Aubin, cofondateur d'Alven Capital (Companeo, Liligo, Wanimo, etc.). «Il est vrai qu'entre 2003 et 2008, les fonds de capital-risque ont souffert d'un écart de performance par rapport au capital transmission [ou LBO?: financement de rachat d'entreprise par de la dette] », indique Pierre de Fouquet. La situation n'est pas homogène. « Il y a une grosse disparité entre les fonds qui s'en sortent et les autres. Les investisseurs institutionnels sont donc très sélectifs », explique Guillaume Aubin.Et la situation devrait se durcir. Les futures normes réglementaires (Solvency II et Bâle III), qui obligent banques et assurances à avoir plus de fonds propres pour compenser les risques pris, « sont un frein aux levées de fonds », complète Guillaume Aubin. « Les nouvelles règles, comme Solvency II, qui ne s'appliquent qu'en 2012, sont déjà dans les têtes. Croire que des grandes institutions vont attendre cette date pour s'y conformer est d'une naïveté confondante », s'indigne Pierre de Fouquet. S. C.
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