Tepa, "t'es pas cap ! "

Par Pierre-angel Gay, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune.

Bien sûr, ce n'est pas le moment de diminuer les impôts. Et encore moins d'en supprimer un. Crise aidant, les recettes fiscales ont fondu d'un quart au premier semestre, ouvrant les vannes à des déficits abyssaux. Et le gouvernement, engagé dans une difficile translation d'une taxe professionnelle finissante vers une taxe carbone à venir, a d'autres priorités. Mais la fameuse loi Tepa ("sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat"), qui fête son deuxième anniversaire sur un bilan beaucoup moins négatif que ne le disent ses détracteurs, illustre à merveille, dans son volet fiscal, toutes les contradictions du gouvernement Fillon.
Depuis plus d'un quart de siècle, la France détient l'étonnant privilège d'une triple imposition sur le capital, la taxe sur les plus-values, les droits de succession et l'ISF, l'impôt de solidarité sur la fortune. Aucun de nos grands partenaires n'en compte plus de deux. Trois, c'est donc un de trop. Ce qui, dans une économie ouverte, est déraisonnable.
Le bon sens commanderait donc d'en supprimer un. À choisir prioritairement, entre droits de succession ou ISF, la taxation des plus-values relevant d'une tout autre logique. Faute de l'avoir expliqué, de l'avoir osé, le gouvernement Fillon a choisi d'en réduire le poids et le nombre d'assujettis. Plus de 95 % des successions sont aujourd'hui exonérées de toute taxe, et les montants des droits acquittés par les plus fortunés ont été sensiblement diminués.
La démarche a été la même pour l'impôt de solidarité sur la fortune, mais inversée, entre un bouclier fiscal protégeant cette fois les vrais riches et un allégement plus modeste en faveur des classes moyennes. Un allégement intelligent toutefois, puisqu'il permet de réduire son impôt en investissant dans de petites entreprises ou en faisant des dons à des organismes d'intérêt général.
Les PME françaises, que l'on sait en mal de fonds propres, bénéficieront ainsi de 1 milliard d'euros de financement cette année. C'est loin d'être négligeable. Mais le bénéfice politique que le gouvernement peut en attendre, lui, l'est. L'opposition et, sans doute, une large partie de l'opinion restent vent debout contre ce qu'on appelle le "paquet fiscal". Et les bénéficiaires, désorientés par les subtilités et les lourdeurs des lois à la française, perdent de vue ce qu'ils y ont gagné. Et, pour finir, l'image de la France à l'étranger reste celle, exagérée, d'un enfer fiscal. Tepa, ou "t'es pas cap !". Le gouvernement récolte les fruits de sa pusillanimité.

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