Vaclav Klaus, seul contre l'Europe

Par Sophie Gherardi, directrice adjointe de la rédaction de La Tribune.

En tant qu'Européen, on peut éprouver du soulagement après la ratification du traité de Lisbonne par les Irlandais. Mais on ne risque pas d'éprouver de la fierté. Rien ni personne ne sort grandi de cette séquence. Ni l'Europe, vaste projet historique incapable de s'imposer comme une évidence auprès de ses peuples. Ni l'Irlande, qui votait non il y a quinze mois dans l'arrogance de sa prospérité, et a voté oui cette fois-ci sous la morsure de la récession. Ni la démocratie, tirée à hue et à dia et pour tout dire ridiculisée.

Car l'Union européenne se retrouve ce matin dans une situation politique totalement absurde. Vingt-cinq de ses vingt-sept Etats membres ont achevé la ratification, dont l'Allemagne il y a seulement deux semaines. Vingt-six parlements ont approuvé le texte, auxquels s'ajoute l'Irlande qui sera finalement la seule à l'avoir adopté par voie référendaire. Le président polonais, Lech Kaczynski, conditionnait sa signature à un "oui" irlandais, il devrait donc normalement s'exécuter.

Reste un homme, un seul, le président tchèque Vaclav Klaus, un ultralibéral eurosceptique qui refuse de ratifier le vote de son propre parlement. L'avenir institutionnel de l'UE est suspendu à ce presque septuagénaire, économiste de profession et provocateur par goût. L'Europe, il n'y croit pas et il n'aime pas. Et quand Vaclav Klaus n'aime pas, il est capable d'aller très loin. Jusqu'à détruire son propre pays, par exemple. En 1993, c'est lui qui a divisé la Tchécoslovaquie, en accord avec le nationaliste slovaque Vladimir Meciar, sans consulter les peuples.

Le président tchèque va essayer de gagner du temps : attendre que la justice tchèque se prononce sur un recours contre le traité de Lisbonne déposé par ses amis politiques, voire démissionner. Son espoir, c'est que David Cameron, le leader conservateur britannique, gagne les élections au printemps prochain et remette tout sur le tapis en soumettant le traité à référendum. Mais Vaclav Klaus présume peut-être un peu et de ses propres forces et de son "allié" anglais : Cameron a déclaré qu'il n'y aurait pas de référendum si la ratification du traité était conclue ailleurs en Europe.

Si bien que Klaus est vraiment tout seul. Une pression phénoménale va s'exercer sur lui. En tout état de cause, il faut d'urgence que les responsables politiques de l'Union réfléchissent à une procédure de consultation des Européens qui soit juste pour tous, et non seulement pays par pays, et qui évite à l'avenir de revivre un tel calvaire.

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Commentaires 2
à écrit le 14/10/2009 à 17:28
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En effet, on ne peut pas trop se fier à David Cameron. En fait je le soupçonne de souhaiter que le traité soit ratifié avant les élections britannique ce qui le dispense de tenir parole. D'ailleurs, s'il était de bonne foi, il n'aurait qu'à décla...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Un grand classique de la langue de bois et de la pensée unique : - on est contre le traité de Lisbonne donc on est anti européen. Quel raccourci ! Comme s'il y avait une seule conception de l'Europe possible. Heureusement que tout le monde n'est pas...

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