La taxe carbonnet d'âne

Par François Lenglet, rédacteur en chef à La Tribune.

Ce devait être l'étendard de la modernité fiscale française, la synthèse audacieuse de la vertu écologique et de la justice sociale. Notre président le claironnait dans tous les sommets internationaux avec la modestie qui lui est habituelle : la taxe carbone allait séduire l'Europe, le monde, peut-être même au-delà. Pour concevoir cet impôt français, donc parfait, nous avions réuni nos meilleurs cerveaux. Michel Rocard, ancien Premier ministre au verbe cristallin, et le ministre de l'Environnement, Jean-Louis Borloo, dont la pensée est aussi touffue que la chevelure.

On connaît la suite. Nos deux experts ont inventé le borborygme fiscal, le galimatias de l'impôt, l'amphigouri à la sauce Bercy : la taxe carbone, ou le prélèvement payé par ceux qui ne polluent pas et remboursé aussi à ceux qui ne l'acquittent pas, mais seulement les jours pairs, sauf quand le temps est couvert. Ubu roi, le prince de l'absurde, le disait déjà il y a plus de cent ans : "pompe à phynances" et "machine à décerveler" marchent toujours de concert. En 2010, le second de ces engins semble avoir fait de sérieux ravages parmi nos élites.

Fort heureusement, le Conseil constitutionnel a censuré ce projet de loi aventureux. C'est moins la Loi fondamentale de la république qui était ici malmenée, que la raison la plus élémentaire. Le martyre que celle-ci subit à cause de la taxe carbone n'est pas près de se terminer, si l'on en croit les projets de refonte de l'impôt "vert". Il s'agirait aujourd'hui de frapper aussi les entreprises industrielles, mais de façon différenciée, selon leur exposition à la concurrence internationale.

A supposer même qu'on puisse mesurer le degré d'ouverture, cela reviendrait à s'aligner sur les pays les moins-disants - ceux-là même que le sommet de Copenhague voulait subventionner, pour les aider à polluer moins ! Brillante idée. Si les neuf sages du Palais-Royal sont désormais préposés à la défense du bon sens, ils ne vont pas manquer de travail dans les mois qui viennent.

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Commentaire 1
à écrit le 06/01/2010 à 16:58
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Bien dit, et bien vrai. Si seulement nos gouvernants, et leurs éminences grises pouvaient comprendre les inepties de cette taxe. " franco- française". Vont-ils nous resservir d'autres "rocardises" de cet acabit ? Peut-on croire que la France dont l...

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