Ile de Ré  : des limites de l'autonomie financière des territoires en question

Par Jacques Marceau, président d'Aromates et enseignant à l'IEP d'Aix-en-Provence.

En regardant les digues de l'île de Ré emportées par la mer, on ne peut que s'interroger sur la politique d'investissement de certains territoires...

Il n'échappera pas au visiteur que cette île, prisée des Parisiens qui y comptent de nombreuses résidences secondaires, s'est considérablement modernisée ces dernières années : luxueuse voirie, ronds-points giratoires, équipements collectifs, ports de plaisance, etc., jusqu'à un éclairage qui confère aux rues de certains villages des allures de Disneyland une fois la nuit tombée.

Ce sont ces mêmes rues qui ont été englouties sous une marée aussi violente qu'inattendue, la nuit du 27 au 28 février dernier, ravageant tout sur son passage et laissant derrière elle un paysage de désolation.

A l'origine de cette catastrophe, la rupture des digues qui protègent l'île en de nombreux endroits et qui n'ont pas résisté à la conjonction de deux facteurs historiques que sont les plus forts coefficients de marée de l'année et une violente tempête.

Construites au XIXème siècle, ces digues protègent l'île des assauts de la mer et y ont permis le développement d'une vie économique aujourd'hui principalement basée sur le tourisme. Depuis des années, les habitants de l'île de Ré qui s'inquiètent de leur état de délabrement en réclament la réfection. Ces digues ne sont en effet plus qu'une succession de rafistolages et c'est donc un vieux mur branlant qui a été emporté par les flots. Les parties neuves, car il y en a quelques-unes, n'ont, quant à elles, pas subi la moindre égratignure. C'est dans le cadre de cette "politique de rustines" que le conseil communautaire de la communauté de communes de l'île de Ré, néanmoins conscient du danger encouru, avait décidé, à l'occasion d'une récente réunion, de travaux de réparation d'urgence en cofinancement avec le conseil général de la Charente-Maritime. Il n'y a donc point de fatalité dans cette catastrophe annoncée de longue date. Face à cette hypothèse, les élus territoriaux ont préféré faire le dos rond depuis des années, choisissant de financer une piscine à 10 millions d'euros plutôt que reconstruire leur seule protection contre les assauts de la mer.

En cette période de grand emprunt et donc, de grandes dépenses publiques, cette catastrophe nous rappelle à point nommé que l'autonomie de gestion des territoires a ses limites et qu'il est temps de repenser nos politiques d'investissements et de contrôle de la bonne gestion, donc de la "bonne dépense", publique.

La réforme territoriale voulue par le gouvernement est sans doute le bon moment pour poser la question de la conciliation entre l'autonomie de gestion et le contrôle de la cohérence des politiques locales. En effet, et sans remettre en cause la poursuite du nécessaire processus de décentralisation engagé de longue date dans notre pays, il convient de mettre en place, d'urgence, des moyens modernes pour coordonner, harmoniser et contrôler l'action des différents échelons territoriaux. Ces moyens sont des outils de management et de gestion, les mêmes que ceux en place, et depuis des années, dans absolument toutes les grandes entreprises et dans de nombreux Etats. Ce sont ces outils qui auraient obligé les élus de l'île de Ré et du conseil général de la Charente-Maritime à concentrer, en priorité, l'investissement sur la réfection totale des digues et non sur des réalisations que la rupture de ces dernières a rendu caduques et anachroniques.

De plus, et dans le contexte de crise qui est aujourd'hui le nôtre, l'augmentation de la dépense publique risque, si de telles catastrophes se reproduisent, de porter préjudice à l'image de nos politiques (qui n'ont pas besoin de cela...) et, par effet rebond, à la stabilité de notre démocratie.

Restaurer le lien entre le citoyen et la puissance publique passe aujourd'hui par de nouvelles garanties de transparence et par une certaine culture du résultat qu'il faudra bien finir par imposer. Une raison de plus de mener à bien, et dans les meilleurs délais, la réforme territoriale !

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 18
à écrit le 07/03/2010 à 9:16
Signaler
Entendu sur France Info et cela peut quand même nuancer votre propos il me semble : "En crevant les digues, les inondations de la tempête Xynthia ont coupé l?île de Ré en trois. Elle retrouve ainsi la configuration qu?elle avait au Moyen-Age. Mais su...

à écrit le 06/03/2010 à 10:10
Signaler
la décentralisation a détruit la structure administrative qui faisait laforce du système français. La gestion de l'urbanisme et des équipements voirie, digues permis de construire était de la compétence des services de l'équipement, et si parfois l'o...

à écrit le 04/03/2010 à 17:45
Signaler
Egalement d'accord avec cette analyse de M.Marceau Il faut bien sûr renforcer le contrôle de la gestion des territoires. Le contrôle est la condition même de l'autonomie. Intéressant de lire les commentaires. Quel déluge ! Pour ma part, et pour fini...

à écrit le 04/03/2010 à 15:19
Signaler
Tout a fait d'accord avec cet article, il est grand temps de mettre un terme au gaspi organisé par nos élus,, souvent plus par ignorance de la réalité que par mauvaise foi.

à écrit le 04/03/2010 à 9:11
Signaler
Faire preuve de si peu d'esprit d'analyse est navrant surtout quand on est enseignant ! Un conseil dans ce cas : se cantonner à la comm' !

à écrit le 04/03/2010 à 6:39
Signaler
Je crois comme les deux commentaires précédents que M. Marceau est ici plus dans le registre de la communication que d'un point de vue fait par l'enseignant... Cela ne me dérange pas que cela soit l'homme de communication mais en revanche cet article...

à écrit le 03/03/2010 à 13:52
Signaler
Dans l'antiquité, l'exercice auquel M. Marceau vient de se livrer s'appelait un sophisme ... Apparemment le concept dialectique a traversé les temps ! Mais franchement mélanger une tempête de vent, des digues et une piscine, il faut être plus sérieux...

à écrit le 03/03/2010 à 8:06
Signaler
Je trouve très étonnant que ce point de vue d'un enseignant d'établissement d'enseignement supérieur manque d'analyse, de recul, de prise d'information... Très étonnant car ce n'est pas ce que l'on enseigne aux étudiants il me semble. A moins que ce ...

à écrit le 02/03/2010 à 18:50
Signaler
UMP, UMP, UMP ! Je m'appelle UMP ! Une cata et je surfe UMP ! Une tempête et je souffle UMP ! mais c'est quoi ce texte qui mélange tout ! on dirait Fréderic Lefebvre qui s'énerve ! Nul ... Remontez le niveau SVP

à écrit le 02/03/2010 à 18:45
Signaler
D'un événement (si triste soit-il), vous tirez des généralités .. Vous êtes comme les politiques ! Opportuniste pour la ramener mais quand on commencera à reconstruire notre pauvre région endommagée, serez-vous là pour porter les sacs de ciment ? Les...

à écrit le 02/03/2010 à 18:34
Signaler
Mais quel est ce curieux amalgame que vous établissez un peu abruptement entre une catastrophe naturelle et un projet de décentralisation ? On a l'impression d'entendre M. Sarkozy en campagne ! Un beur qui vole une mobylette et hop, je fais une loi c...

à écrit le 02/03/2010 à 17:17
Signaler
Pour votre information ;) Le code civil est clair concernant la gestion et l'entretien des digues : cela relève de la compétence du maitre d'ouvrage (propriétaire privé, une association, une collectivité locale ou bien l'Etat). En cas d'accident, s...

à écrit le 02/03/2010 à 11:57
Signaler
Chatelaillon ! sous les eaux !? Quelles belles vacances en famille. Ile de Ré ! 1962 est un terrain vague et sa prison, un ami me disait combien tout y était impeccable, agréable ... sous les eaux ! Lorsque les digues cèdent c'est toujours une catast...

à écrit le 02/03/2010 à 11:52
Signaler
Votre argument : des limites de l'autonomie financière des territoires en question Ma question : parce qu'un état centralisateur est plus compétent selon vous ?

à écrit le 02/03/2010 à 11:49
Signaler
Réaction typique du parisien qui sait tout, qui voit tout. "Je vous l'avais bien dit, ma bonne dame" ! Cette tentation permanente et rassurante de trouver une victime expiatoire à tout est horripilante ! Dans ce cas précis, la pataugeoire rétaise à...

à écrit le 02/03/2010 à 10:41
Signaler
Dommage que vous ne vous soyiez pas plus informé avant d'écrire votre article. la modernisation de l'Ile de Ré n'est pas un effet récent lié à l'arrivée des parisiens, mais une action entamée suite à l'ouverture d'un pont en 1988, et générée par l'au...

à écrit le 02/03/2010 à 9:39
Signaler
C'est typiquement le genre d'article écrit par un bobo parisien qui va en vacances dans une région et découvre les problèmes... N'êtes vous donc jamais allé dans d'autres régions pour constater tous ces problèmes.... et cela ne date pas de la réforme...

à écrit le 02/03/2010 à 8:26
Signaler
Je suis tout à fait d'accord avec ton article , il est grand temps de contrôler ce que nos élus font de l'argent public . dommage qu'il faille une catastrophe pour révéler toutes ces dérives inacceptables . bravo pour ce combat

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.