Bakou : cap sur l'Union européenne ?

Exemple méconnu de géopolitique, l'Azerbaïdjan, première république laïque de la sphère orientale créée en 1918, est en fait proche des démocraties occidentales. De profondes réformes y ont été menées, le pays s'est ouvert vers l'Occident et a apporté un soutien actif à la lutte antiterroriste. De surcroît, son rôle stratégique dans le domaine énergétique en fait, pour l'Europe, un pays à ne pas négliger.

Comparé aux autres nations du Sud-Caucase, l'Azerbaïdjan apparaît indéniablement comme un exemple géopolitique spécifique et, paradoxalement en apparence, plus proche des démocraties occidentales de l'Union européenne que de ses proches voisins.

Cette spécificité est directement issue de la pérennité de tendances lourdes liées à l'histoire.

On le sait, le processus de libération de la société azerbaïdjanaise a commencé dès le XIXe siècle, en plein régime tsariste. À partir de la seconde moitié de ce siècle, parallèlement à la montée de la contestation politique face à l'hégémonie impériale, les investisseurs occidentaux vont prendre une place non négligeable dans l'économie du pays : la société des frères Nobel s'implante à Bakou en 1879. L'année suivante, le capital français y fait son apparition, avec les Rothschild, bientôt suivis par les intérêts britanniques. On connaît la suite, et le rayonnement du pays au chapitre des hydrocarbures... Grâce aux milieux intellectuels, et au centre de gravité de leurs réflexions (Comment combattre les facteurs empêchant la promotion des valeurs humaines ?), Bakou se met rapidement à intégrer la science et la culture européennes, voire à les concrétiser avec, par exemple, la création du premier Opéra ou du premier ballet professionnel du monde oriental.

Dans la foulée de l'action des intellectuels et des juristes, partisans d'institutions fondées sur les grands principes en vigueur au sein des démocraties occidentales, la République démocratique d'Azerbaïdjan, première république laïque de la sphère orientale, est établie le 28 mai 1918. La même année, l'Azerbaïdjan reconnaît le droit de vote et le droit d'être éligible aux femmes, bien avant maints pays occidentaux, comme les États-Unis (1920) l'Espagne et le Portugal (1931), la France (1944), le Japon (1945) ou la Confédération helvétique (1971) !

Rien d'étonnant alors si, au lendemain de l'indépendance, à la suite de l'effondrement de l'Union soviétique, Bakou axe délibérément sa politique extérieure vers l'Occident. La signature du "contrat du siècle" au plan énergétique, en 1994, en constitue un vigoureux exemple. En dépit de fortes pressions, tant du Nord que du Sud, le président Heydar Aliyev opte pour les projets d'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan et de gazoduc Bakou-Tbilissi-Erzurum ! Son successeur, le président Ilham Aliyev, poursuit cette ouverture en resserrant les liens de l'Azerbaïdjan avec les principales organisations occidentales : Conseil de l'Europe, OSCE, Otan et, bien entendu, Union européenne.

Au plan de la géopolitique interne, et bien que le jeune État ait encore une gamme indéniable de problèmes à résoudre, Bakou va initier, au cours de la dernière décennie, de profondes réformes juridiques et institutionnelles : ce n'est sans doute pas un hasard, par exemple, si l'Azerbaïdjan adopte l'abolition de la peine de mort, (toujours en vigueur dans certains pays occidentaux, et non des moindres !) pionnier en la matière, non seulement au sein des pays membres de la CEI mais aussi dans l'ensemble du monde oriental.

Dans les domaines de la paix et de la sécurité internationale, Bakou a été également l'un des premiers pays à apporter un soutien actif dans la lutte contre le terrorisme international. Témoin, cet acte, certes symbolique : dès le 12 septembre 2001, le président Aliyev signait un décret pour commémorer les victimes de l'attaque atroce du 11, et déclarait sa solidarité avec la coalition formée par George W. Bush. Malgré son appartenance culturelle à l'univers musulman, et en dépit des pressions de certains États de la zone, les militaires azerbaïdjanais participent ainsi aux opérations de la coalition internationale antiterroriste en Irak et en Afghanistan.

À l'échelle du Sud-Caucase, Bakou, sans modifier quant au fond sa position face à Erevan, s'efforce enfin, au sein du Groupe de Minsk et de l'OSCE, de trouver une solution respectant les principes démocratiques dans le règlement du conflit arméno-azerbaïdjanais.

Au-delà de son rôle capital dans le domaine énergétique, l'Azerbaïdjan s'avère ainsi plus que jamais soucieux, (sans négliger l'intérêt géostratégique que représente, pour l'Europe et pour ces puissants voisins, sa position géographique) de se rapprocher de plus en plus de l'Europe, voire, à moyen terme, de mettre le cap sur l'Union européenne.

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