Marine Le Pen mûrit son ascension sociale

Chaque semaine, Hélène Fontanaud, journaliste au service France de "La Tribune", propose son regard sur la politique française. Un point de vue décalé pour prendre la mesure des stratégies, des idées et des jeux de pouvoir avant la prochaine élection présidentielle. Aujourd'hui : la double offensive du Front national pour reconquérir son électorat.

À seize mois de l'élection présidentielle, les sondages sur les intentions de vote des Français sont encore en points de suspension. Mais la dernière livraison du baromètre Ifop pour "la Lettre de l'opinion" contient un avertissement sérieux pour Nicolas Sarkozy : le président sortant y est crédité de 26% des voix au premier tour de scrutin, à un petit point seulement devant la socialiste Martine Aubry. Et l'enquête pointe la progression de Marine Le Pen, créditée de 14% des intentions de vote, soit 4 points de plus que Jean-Marie Le Pen il y a trois ans. C'est notamment parce qu'il avait su rallier pendant sa campagne nombre d'électeurs du Front national, sur le double thème de la sécurité et du travail, que Nicolas Sarkozy avait obtenu 31,18% des suffrages le 22 avril 2007, au premier tour de la présidentielle, loin devant Ségolène Royal, à 25,87%.

Trois ans plus tard, pour l'institut Ifop, Marine Le Pen "semble bénéficier doublement du contexte : tout à la fois du malaise social important qui touche les catégories populaires, comme des frustrations d'une partie des classes moyennes face aux blocages des transports et que de nombreux Français trouvent excessifs et injustes".

L'Ifop relève aussi que Marine Le Pen, qui succédera très probablement à son père à la tête du parti d'extrême droite à l'issue du congrès organisé à Tours les 15 et 16 janvier 2011, effectue notamment sa progression chez les ouvriers et les jeunes.

Dans son irrésistible ascension vers la direction du FN, Marine Le Pen suit en effet depuis plusieurs mois une stratégie à double facette qui rappelle un peu celle du candidat de l'UMP en 2007. Tout d'abord en contestant avec virulence le bilan de Nicolas Sarkozy en matière de sécurité. Dénonçant des opérations de communication à répétition, elle durcit le ton notamment sur le terrain de l'immigration, pour ne pas laisser à l'UMP le champ libre pour venir « siphonner » les thèses de "la droite nationale".

Dans le même temps, Marine Le Pen donne une coloration sociale à ses interventions. En pleine crise du secteur, elle a ainsi effectué des déplacements auprès des producteurs de lait. Interrogée la semaine dernière sur France Info à propos du conflit des retraites, la vice-présidente du FN a lancé qu'elle ne voulait pas "calmer le jeu". "Je n'attends qu'une chose du système, c'est qu'il implose. Je veux que les Français se rendent compte que tout est à reconstruire, que notre pays est en train de s'effacer, que l'État s'effondre, que la souveraineté nationale a disparu et que la pérennité de notre civilisation est en cause", a-t-elle insisté.

La gauche et l'extrême gauche appellent les Français à se méfier du discours de Marine Le Pen, qui cache, selon elles, une politique "encore plus libérale que celle" de la droite. La future chef de file de l'extrême droite française n'en a cure. Elle ne travaille qu'à une chose, le rapport de forces qu'elle instaurera avec Nicolas Sarkozy au premier tour de la présidentielle. Le FN rêve d'un "21 avril à l'envers", qui verrait Marine Le Pen se qualifier pour le second tour de la présidentielle au détriment du président sortant. C'est pourquoi Marine Le Pen combat pour l'instant avec fermeté l'idée d'une future alliance entre l'UMP et le FN défendue début octobre par le député UMP Christian Vanneste.

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